Émission Libre à vous ! diffusée mardi 17 septembre 2024 sur radio Cause Commune Sujet principal : Parcours libriste avec Maud Royer

Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous dans Libre à vous !. C’est le moment que vous avez choisi pour vous offrir une heure trente d’informations et d’échanges sur les libertés informatiques et également de la musique libre.

Parcours libriste avec Maud Royer. Nous allons parler de son parcours de développeuse de logiciels libres et aussi de ses engagements. Ce sera le sujet principal de l’émission du jour. Avec également au programme la chronique de Gee, « IA partout (justice nulle part) », et, en fin d’émission, la chronique de Vincent Calame qui nous parlera d’Ivan Illich.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous ! l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter.

Nous sommes mardi 17 septembre 2024, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

À la réalisation de l’émission du jour, Julie Chaumard. Bonjour Julie.

Julie Chaumard : Bonjour Frédéric. Bonjour à tous.

Frédéric Couchet : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Les humeurs de Gee » - « IA partout (justice nulle part) » (rediffusion de la chronique enregistrée le 28 mai 2024)

Frédéric Couchet : Nous allons commencer par la chronique « Les humeurs de Gee ». Gee, auteur du blog-BD Grise Bouille vous expose son humeur du jour : des frasques des GAFAM aux modes numériques, en passant par les dernières lubies anti-internet de notre classe politique, il partage ce qui l’énerve, l’interroge, le surprend ou l’enthousiasme, toujours avec humour. L’occasion peut-être, derrière les boutades, de faire un peu d’éducation populaire au numérique.
Aujourd’hui, Gee n’est pas avec nous au studio, en direct, il a eu un empêchement, ça va donc être une rediffusion. Le thème du jour, « IA partout (justice nulle part) », une rediffusion d’une chronique diffusée en mai 2024.

[Virgule sonore]

Gee : Salut et salut à toi, public de Libre à vous !.
Allez, ça y est, là, je crois qu’on y est, cette fois, l’IA, j’en ai officiellement plein le cul ! Pardon pour le langage, mais il fallait que ça sorte. Non, là je n’en peux plus d’entendre parler d’IA dix fois par jour. Sérieux. J’en suis presque à regretter la mode des NFT [non-fungible token] ou même le Métavers !
Qu’est-ce qu’ils ont tous, là ? C’est le printemps, c’est ça ? La nature se réveille, les abeilles se replongent dans les fleurs et les startuppers dans la coke ? Y en a marre ! Je ne connais pas l’avenir. Peut-être qu’on est au début d’une nouvelle ère et que l’IA va devenir aussi omniprésente et incontournable que les ordinateurs ou Internet, et moi, en vieux paumé, je suis peut-être comme Pascal Nègre, qui déclarait, en 2001, « Internet, on s’en fout, ça ne marchera jamais ! ».

N’empêche que l’IA, en tout cas celle d’aujourd’hui, l’IA générative, celle qu’on nous vend à longueur de journée, ça ressemble quand même de plus en plus à une très grosse bulle. Tout le monde en parle, tout le monde essaie d’en intégrer partout très vite et, comme ça coûte une blinde, c’est, pour l’instant, un gouffre à pognon ! Quand il va être l’heure de rentabiliser tout ça, à mon avis, ça va faire mal. Tu connais l’histoire : lors de la ruée vers l’or, ce sont surtout les marchands de pelles qui se sont enrichis. Et là, à part Nvidia et ses cartes graphiques, j’ai du mal à piger qui va ressortir gagnant de tout ça. Jusqu’à Google, qui, pris de panique, veut sortir très vite une version IA de son moteur de recherche ! Ça faisait quelques années que les gens remarquaient que les résultats de Google étaient de moins en moins bons, car, tellement tournés vers la pub, qu’ils en devenaient gangrenés par des sites d’e-commerce bidons, reléguant les résultats pertinents, mais non lucratifs, bien loin derrière. Eh bien, il y a fort à parier que tu regretteras bientôt ces résultats déjà pas folichons ! Google utilise désormais par défaut Gemini, son intelligence artificielle qui, au lieu de te retourner juste une liste de sites, répond directement à ta requête via l’IA, en assimilant et en recrachant de façon plus ou moins exacte, plutôt moins, les informations glanées sur Internet… enfin, les informations volées sur Internet ! Ah oui !, parce que le droit auteur, quand c’est pour emmerder ton ado de 14 ans qui a piraté le dernier Taylor Swift, les pouvoirs politiques sont main dans la main avec les multinationales pour te pondre des Hadopi et bloquer des domaines comme The Pirate Bay à tour de bras ! Mais le droit d’auteur, quand c’est Google et Microsoft qui pillent tranquillement l’intégralité de ce qui est publié sur Internet !, alors là, on s’en fout, mais on s’en fout ! Bravo ! Bravo Microsoft ! Bravo Google ! C’est bien, les gars ! Continuez ! Pillez, pillez ! Tu comprends, c’est l’innovation, c’est l’avenir ! On ne va quand même se laisser enquiquiner par des trucs désuets comme le respect des artistes ou des journalistes ! C’est tellement ancien monde !

Et puis là, je parle juste du côté humain, social ! Ne parlons même pas du côté écologique, on se fâcherait. Oui parce que, soudainement, tout le monde s’en fout aussi !
Microsoft s’était fixé comme objectif d’atteindre la neutralité carbone en 2030, d’ailleurs leurs émissions de carbone avaient commencé à décroître, mais c’était avant ! Avec le boum de l’IA, les émissions de carbone de Microsoft ont bondi de 30 % depuis 2020 ! Foutus pour foutus, qu’est-ce qu’on en a à secouer ! C’est juste la survie à court terme de l’espèce humaine qui est jeu !
L’argument, pour défendre ça, je le connais : « Oui, mais si ça se trouve, l’IA va nous aider à infléchir le changement climatique ». Oui, c’est ça, et mon cul c’est du pingouin ! Pardon, c’est comme « la croissance verte », « l’écologie qui est chance pour l’économie », et s’imaginer que la cause d’un problème va aussi en être la solution. Comme si on éteignait un incendie avec du kérosène !

Bon ! Voyons le positif : au moins, avant de crever, on aura pu générer des images d’humains à 13 doigts, des longs textes insipides de marketeux pour répondre mal à des recherches internet et puis du code informatique généré automatiquement et incorrect dans 50 % des cas, c’est le résultat de la dernière étude sur ChatGPT.

De toute façon, comme l’IA utilise ce qu’elle trouve en ligne pour s’alimenter, et que ce qui se trouve en ligne devient de plus en plus le résultat de générations automatiques par l’IA, il y a fort à parier que l’IA va finir par se dissoudre dans elle-même, régurgitant et recrachant son propre vomi en boucle. Essaie donc de compresser la même image en JPEG 1500 fois de suite et tu verras ce que je veux dire : à la fin, tu n’as plus qu’une bouillie de pixels ! On peut facilement imaginer qu’après que le Web aura été digéré et recraché 1500 fois de suite par l’IA, il n’en restera qu’une bouillie d’informations. Déjà que certaines IA intègrent des sites parodiques comme The Onion ou Le Gorafi dans leurs sources, sans les distinguer des sites non parodiques, ça nous promet une belle dégringolade dans la qualité du Web !

Je crois que ce qui me gonfle le plus, dans tout ça, c’est que, finalement, on en arrive à la négation même de l’informatique. Je m’explique : le gros intérêt de l’informatique, outre la rapidité, c’était d’être fiable. Un programme informatique, à la base, ça part souvent d’un algorithme déterministe, donc, de quelque chose qui te garantit d’offrir toujours la même réponse à une même question. Alors oui, ce n’est pas très fun, mais quand je fais passer un correcteur d’orthographe, il me retournera toujours, invariablement, les mêmes fautes. C’est presque chiant, mais c’est pratique, c’est utile.
Alors que le principe même des IA génératives, qui ont le vent en poupe actuellement, c’est d’imiter l’être humain et, pour imiter l’être humain, il faut avoir des réponses variées, avec leurs cortèges d’erreurs. On a donc, maintenant, des algos non déterministes, avec des tas de biais intégrés au passage, dont très peu de gens pigent réellement le fonctionnement, qui mâchonnent des quantités délirantes de données pour en déduire des moyennes statistiques à la pertinence très variable et qui consomment trois forêts amazoniennes par an, mais ça, je l’ai déjà dit.

Et on s’interroge avec gourmandise, « mais est-ce que l’IA va bientôt dépasser l’être humain ? ». Question débile, à mon sens, car ça fait belle lurette que les ordinateurs ont dépassé l’être humain sur tout un tas d’aspects, notamment sur la rapidité, comme je le disais. Exemple : si je te demande de me trier un million de documents selon leur date, ça va te prendre des heures, sans doute des jours, voire des semaines – je n’ai pas fait le calcul, mais ça doit être dans ces eaux-là –, alors que si tu lances un programme de tri pour ce million de documents, au moment où ton doigt se relève de la touche « Entrée », ton million d’éléments est déjà trié. Et c’était déjà le cas il y a 20 ans, sans IA, juste avec des algorithmes bien foutus. Et c’est ça qui est cool avec le numérique ! Pas d’avoir des chatbots qui arrivent à imiter Jean-Michel de la compta pour passer le test de Turing. Je ne vais pas te refaire ma vieille BD qui s’appelait Les ordinateurs sont cons ! L’intérêt de l’informatique, au départ, c’est de faire très vite et avec beaucoup d’efficacité tous les trucs chiants et répétitifs que les êtres humains font mal et lentement. Pourquoi ? Pour nous libérer du temps pour des tâches plus épanouissantes.
Au lieu de ça, l’IA nous pique les tâches épanouissantes, en les faisant mal une fois sur deux, mais beaucoup plus rapidement que nous, tandis que les boulots précaires se multiplient. On voulait des robots qui fassent le ménage pendant qu’on apprenait la musique, on se retrouve avec des robots qui peuvent composer 15 000 chansons à la minute, pendant que des travailleurs et travailleuses sont sous-payés à corriger leurs erreurs en boucle. Super !

Après, soyons honnêtes ! IA ou pas, la culture de masse est déjà produite à la chaîne par des algorithmes ! Évidemment, les scénaristes Netflix ont un manuel hyper détaillé avec les bonnes ficelles, les bonnes recettes, les bonnes intrigues à dérouler en boucle, série après série, est-ce qu’on verra vraiment la différence si on les remplace par des IA ? L’IA fait exactement ce que Netflix veut : produire le résultat statistiquement le plus attendu, celui qui satisfera, en moyenne, le plus de monde, à la chaîne, de plus en plus vite.

Et l’art, dans tout ça ? Je crois qu’on sait très bien comment ça va finir ! L’IA ne va pas remplacer tous les artistes, ça va devenir le low cost de l’art, du journalisme, de tout ça. Des trucs passables, statistiquement moyens, produits à la chaîne pour de la consommation de masse, comme on produit de la malbouffe industrielle pour les pauvres, tandis que les riches continueront à avoir les moyens de se payer des artistes et des journalistes pour avoir accès à du contenu de qualité, garanti sans IA, comme on achète de la bouffe bio garantie sans pesticides et additifs.

On va me dire que cette chronique est quand même vachement manichéenne et sans doute caricaturale. Oui, c’est vrai, et il y a probablement du positif dans l’IA.
Allez, je vais être honnête, j’ai moi-même récemment utilisé un traducteur automatique, basé sur de l’IA, pour communiquer avec une personne qui ne parlait ni français, ni anglais, les deux langues que je maîtrise, oui, c’était vachement pratique et incroyablement efficace !
Ceci étant dit, j’ai quand même hâte que cette bulle de l’IA éclate et je nous souhaite, à toutes et tous, qu’elle ne fasse pas trop de dégâts. En attendant, c’est une grande part de nos espaces numériques qui risque d’être colonisée et pourrie par des IA mal finies, au nom du fameux Move fast and break things, l’ancienne devise de Facebook « Allez vite et tout casser », en gros, un joyeux programme !

Sur ce, je te laisse et je m’en retourne à mes petits dessins garantis sans IA, mais qui iront sans doute nourrir les IA des GAFAM, parce que, licence libre ou pas, de toute façon, les GAFAM se torchent avec le droit d’auteur. Je vais peut-être commencer par dessiner des personnages à 13 doigts du coup, juste pour les emmerder !
Allez, salut !

Frédéric Couchet : Merci Gee. On renvoie les auditrices et auditeurs qui veulent découvrir ces BD certifiées sans IA sur ton site, grisebouille.net. Je vais juste rappeler, peut-être pour les plus jeunes, que Pascal Nègre est l’ancien directeur ou patron d’Universal France, je ne sais pas ce qu’il fait aujourd’hui, il est peut-être toujours chez Universal.
En tout cas, c’était la chronique « Les humeurs de Gee », dont le titre était « IA partout, (justice nulle part) », je ne te demande pas la référence.

Gee : Pour la petite histoire, j’ai un ami qui, dès qu’on dit quelque chose qui finit par « partout », rajoute toujours « justice nulle part », ce qui fait que, maintenant, j’ai du mal à dire « partout » sans dire « justice nulle part » derrière.

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : Nous sommes de retour, en direct, mardi 17 septembre 2024.
Vous venez d’écouter une rediffusion d’une chronique de Gee, « IA partout (justice nulle part) ». Je vous rappelle que le site de Gee c’est grisebouille.net. Vous pouvez soutenir son travail ou lui passer des commandes.
Nous allons faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Frédéric Couchet : Après la pause musicale, nous passerons à notre sujet principal qui est le Parcours libriste de Maud Royer.
En attendant, nous allons écouter Yesterday par Kellee Maize. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Yesterday par Kellee Maize.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Yesterday par Kellee Maize, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution.

[Jingle]

Frédéric Couchet : Nous allons passer à notre sujet principal.

[Virgule musicale]

Parcours libriste avec Maud Royer, développeuse web, et experte en stratégies numériques de mobilisation et de plaidoyer

Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par notre sujet principal intitulé « Parcours libriste ». L’idée du Parcours libriste, c’est d’inviter une seule personne pour parler de son parcours personnel et professionnel, un parcours individuel, certes, mais qui va, bien sûr, être l’occasion de partager messages, suggestions et autres.
Notre invitée du jour est Maud Royer. Bonjour Maud.

Maud Royer : Bonjour.

Frédéric Couchet : N’hésitez pas à participer à notre conversation au 09 72 51 55 46 ou sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat », salon #libreavous, et je salue les personnes qui sont déjà présentes sur ce salon.
J’ai lu sur ton site web « développeuse web et experte en stratégies numériques de mobilisation et de plaidoyer », on reviendra évidemment là-dessus. L’émission va être consacrée à te présenter, mais j’ai envie de te demander comment toi tu te présentes quand, par exemple, tu vas à une soirée ou quand tu rencontres des personnes et que les gens te demandent ce que tu fais dans la vie. Quelle est ta réponse ?

Maud Royer : Ça dépend vraiment. Déjà, je vais dans beaucoup de soirées où les gens ne me demandent pas ce que je fais dans la vie parce que je suis une personne trans et les milieux trans sont notamment des milieux où il y a beaucoup de chômage et, quand la plupart des gens n’ont pas de travail, ce ne sont pas des questions qu’on pose de manière si franche. Bon ! Il m’arrive aussi d’aller dans des endroits où on me la pose. Généralement, je réponds assez franchement sur ce que je fais en ce moment. En ce moment, globalement, je suis développeuse freelance, à peu près à mi-temps, pour plusieurs clients dont l’incubateur des services numériques de l’État, la DINUM, pour qui, notamment, je développe des logiciels open source depuis quelques années.

Frédéric Couchet : Je précise juste que la DINUM c’est la Direction interministérielle du numérique.

Maud Royer : Je dis aussi que je travaille à mi-temps pour mon association, de manière entièrement bénévole, une association féministe et trans qu’on a créée en 2020 avec quelques amies. Je fais du plaidoyer pour les droits des personnes trans et les droits des femmes. Je ne rentre pas forcément dans les détails selon l’interlocuteur que j’ai en face, évidemment, parce que ce sont des questions qui suscitent parfois des réactions un peu hostiles, tout du moins désagréables.
C’est généralement ce que je dis et, parfois, je raconte aussi un peu ce que j’ai fait avant et c’est la partie experte en stratégies de mobilisation. J’ai été très longtemps responsable des outils numériques à la France Insoumise où j’ai construit, en gros pendant deux campagnes présidentielles, celle de 2017 et celle de 2022, avec une équipe, et où j’ai développé plein de choses, notamment le réseau social Action Populaire qui est la plateforme de mobilisation qu’utilisent les militants Insoumis pour organiser la vie du mouvement, les groupes d’action locaux, les événements, etc., qui est à la fois un site et une application mobile, qui est aussi un logiciel libre.

Frédéric Couchet : OK. De toute façon, on va en reparler. Tu n’as pas cité le nom de ton association, tu peux la citer.

Maud Royer : L’association c’est Toutes des Femmes, toutesdesfemmes.fr.

Frédéric Couchet : Toutes des Femmes. On parlera de ce sujet sans doute un petit peu à la fin, parce que, en plus, tu as une actualité en librairie, avec un livre qui sort bientôt. On en reparlera à la fin. On va surtout axer la discussion sur la partie développeuse, logiciel libre. Le principe du Parcours libriste c’est de comprendre un peu ce qui t’a amenée là, comment tu as découvert l’informatique, le logiciel libre. Donc, question un petit peu traditionnelle : à quel moment, dans ta vie, as-tu découvert l’informatique et/ou le logiciel libre ?, je ne sais pas comment ça s’est fait. Quand as-tu commencé à t’intéresser à ces sujets-là ? Vers quel âge ? Dans quel contexte ?

Maud Royer : Assez jeune. J’étais au collège, en cinquième/quatrième, on a 12/13 ans, je crois, en plus je suis de décembre. Mes amis jouaient beaucoup aux jeux vidéo et je n’avais pas l’argent pour payer l’abonnement à World of Warcraft à l’époque. Je passais beaucoup de temps sur l’ordinateur en conversation avec eux, mais avec rien d’autre à faire, pour le coup, de mes mains, puisqu’on avait un ordinateur qui ne permettait pas de faire tourner les derniers jeux, etc.

Frédéric Couchet : Chez vous, il n’y avait qu’un seul ordinateur ?

Maud Royer : J’avais l’ordinateur de ma mère.

Frédéric Couchet : Tu n’avais pas ton ordinateur.

Maud Royer : En tout cas au début. Je pense que j’ai commencé à cette période, un peu aussi pour passer le temps, à bidouiller un peu. Je ne saurais pas exactement dire comment ça a commencé, je n’ai pas le souvenir du détail, mais très vite, comme, je pense, c’est le cas de beaucoup de personnes de ma génération, j’ai terminé sur ce qui était le Site du Zéro à l’époque et j’ai appris un peu le développement web. Le Site du Zéro est un site plein de tutoriels pour apprendre à développer. Je crois que j’ai commencé par le langage de programmation C, que je n’utilise plus du tout aujourd’hui.

Frédéric Couchet : Tu n’as pas choisi le plus simple !

Maud Royer : Parce que c’était le tutoriel qui était en haut du site et, après, j’ai fait des langages de programmation plus pour le Web, j’ai fait du HTML, du CSS, du JavaScript, avec très tôt l’idée de faire un site internet, ce qui va me permettre de gagner de l’argent et je pourrai payer mon abonnement à World of Warcraft. J’ai eu très tôt cette idée-là. Donc, au départ, pas trop d’intérêt particulièrement pour le logiciel libre.

Frédéric Couchet : Je suppose que ton ordinateur était sous Windows ou Mac peut-être.

Maud Royer : Absolument. Il était sous Windows, même sous Windows Millennium alors que c’était la période de Windows XP et je n’avais pas le droit de passer trop de temps sur l’ordinateur, donc j’imprimais les tutoriels et je les lisais le soir dans ma chambre, c’était un peu sport !
Plus tard, je pense au début du lycée, j’ai eu mon propre ordinateur et je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas comment c’est venu, peut-être parce que je développais déjà pas mal, j’ai installé Ubuntu en dual boot, c’est-à-dire en gardant Windows et en installant Ubuntu qui était un peu la grosse distribution Linux, facile d’accès, on va dire grand public à l’époque. Je pense que j’ai commencé avec la 7.04 et, comme les distributions Linux sont datées en fonction des années, c’était en 2007, et j’ai commencé avec la 8, en tout cas je me souviens de la version 8.

Frédéric Couchet : Tout à l’heure, tu as parlé de génération, tu as la trentaine, c’est ça ?

Maud Royer : J’ai 31 ans. À ce moment-là, j’ai commencé à beaucoup me renseigner sur le logiciel libre. Ça a été très important dans ma trajectoire, parce que j’ai trouvé l’idée de la licence libre, la façon dont on utilisait, un peu par une sorte de retournement juridique, le copyright pour, finalement, créer du partage de propriété intellectuelle, ce qu’on appelle le copyleft, la gauche d’auteur. J’ai trouvé ça très intéressant, j’étais un peu obsédée et j’ai commencé à réfléchir, un peu comme quand on est ado et qu’on se dit qu’on a des idées sûrement géniales alors qu’en fait c’est juste qu’on n’en a discuté avec personne et, évidemment, des tas de gens y ont pensé aussi. J’ai commencé à réfléchir à la façon dont on peut étendre cette idée à d’autres domaines que l’informatique, etc. J’étais un peu obsédée par ça et, en même temps, je continuais à progresser en informatique. À ce moment-là, j’ai lu des manuels d’informatique qui étaient, normalement, vraiment des manuels de cours. J’ai arrêté un peu le Site du Zéro et j’ai commencé à acheter des gros manuels sur les systèmes d’exploitation, sur les réseaux, etc.

Frédéric Couchet : Comme c’était au lycée, c’est une période où on se pose des questions, en tout cas les parents se posent des questions sur l’avenir, sur ce que leur enfant va faire, est-ce que tu t’es dit « je vais m’orienter sur de la programmation, sur l’informatique » ?

Maud Royer : Eh bien pas du tout. Parallèlement, j’ai commencé aussi à rentrer dans le militantisme politique par d’autres aspects. Il y avait la loi Darcos, la loi Chatel qui étaient des réformes de l’éducation à cette époque-là, du nom d’anciens ministres de l’Éducation. À ce moment-là, on bloquait les lycées, j’ai bloqué mon lycée, normal ! J’étais à Lille dans les coordinations municipales des différents blocages de lycées, etc. Je pense que vers la fin du lycée j’ai un peu laissé ça de côté pour ce qui était mon engagement politique, mais j’allais à des rendez-vous de libristes à Lille, j’y suis allée deux/trois fois, je ne sais plus comment ça s’appelait.

Frédéric Couchet : Chtinux ?

Maud Royer : Non. Je pense que ça s’appelait autrement à l’époque, vraiment je ne sais pas, je crois que c’était au Café Citoyen je crois que ça existe toujours à Lille.

Frédéric Couchet : Je ne sais pas si ça n’existe toujours. Il y a eu la Braderie de Lille ce week-end et je sais qu’il y avait un stand logiciel libre où il y avait Chtinux. Chtinux est un Groupe d’Utilisateurs et d’Utilisatrices de Logiciels Libres qui faisait des ateliers au Café Citoyen. J’y suis allé il y a quelques années, mais peut-être qu’il y avait plusieurs groupes.

Maud Royer : Peut-être que c’était ça.

Frédéric Couchet : En tout cas, tu fréquentais des personnes qui étaient libristes.

Maud Royer : Je suis allée à deux/trois réunions. Je n’étais pas très assidue, mais toujours ce truc quand même très important dans ma trajectoire politique. Du coup, un engagement très tôt, aussi sur la question de la propriété intellectuelle, plus largement que sur le logiciel, qui, je pense, m’a marquée pour la suite de ma trajectoire et, aujourd’hui, je dirais que mon intérêt pour la question de la propriété intellectuelle est bien plus large que pour le logiciel libre, il est peut-être même plus centré sur d’autres trucs, sur les médicaments, sur les brevets qui, pour moi, sont un truc vraiment hyper-important.

Frédéric Couchet : Finalement relativement jeune, tu as lié l’aspect logiciel libre à un aspect plus politique que technique, si je comprends bien. Au début, c’est la technique qui t’a intéressée avec le Site du Zéro, etc., et, après, tu as vu dans le logiciel libre l’aspect politique, ce que tout le monde ne voit pas forcément.

Maud Royer : Oui, très tôt, parce que j’avais des parents très politisés, pour moi c’était un peu difficile de passer à côté. J’étais en filière ES, on faisait de la sociologie et de l’économie, pour moi, c’était assez important. Ensuite, plus tard, j’ai un peu fait une pause dans le développement et, dans mes études, je ne me suis pas du tout orientée dans l’informatique, j’ai fait des sciences sociales. J’ai fait, en particulier, de la sociologie et de l’économie, comme je faisais déjà au lycée. J’ai fait un master d’économie et je ne me suis pas du tout orientée dans l’informatique, parce que, pour moi, ça restait un loisir et je ne comptais pas en faire un métier. Je pense qu’il y a plein de raisons, notamment le fait que ce n’était pas forcément un milieu dans lequel je me sentais hyper à l’aise.

Frédéric Couchet : En tant que femme, comment as-tu été accueillie dans ces groupes qui sont quand même très fortement masculins, il faut le dire ?

Maud Royer : C’était en pré-transition, je n’étais pas une femme à l’époque, mais ça n’empêchait pas ! Pour le coup, cela n’a pas changé avec ma transition, c’était déjà le cas avant, je me suis toujours sentie mal à l’aise dans des espaces très majoritairement masculins. Je pense que c’est ça aussi : l’idée d’aller dans une école d’ingénieur, ou un truc comme ça, était vraiment inconcevable pour moi. Je n’en avais pas du tout envie. Ça n’a pas été vraiment une question, pour moi, de faire des sciences humaines, d’étudier d’un peu plus près aussi les questions politiques. J’ai fait de l’économie parce que, pour moi, c’était une des matières « les plus politiques qu’on puisse étudier », entre guillemets. Dans mes études d’économie, j’ai choisi de m’intéresser particulièrement à des sujets qui croisaient notamment l’informatique.
Un des premiers trucs que j’ai étudié, un peu parce que j’aimais bien : en économie, il y a ce qu’on appelle la théorie des jeux qui modélise les comportements des gens dans des situations où, globalement, ils ne savent pas trop ce qui va se passer. J’ai donc bossé sur une modélisation des systèmes d’enchères de publicité de Google, des trucs qui n’étaient pas trop modélisés. Google avait – je pense qu’il a changé depuis l’époque où j’ai bossé là-dessus – un système d’enchères sur des mots clés. En gros, on achète des mots clés pour afficher des annonces dans les résultats des moteurs de recherche. Ce système était un peu spécial, il combinait plein de caractéristiques, notamment avec des systèmes de prix plancher, etc., c’était un peu complexe. Le modèle qui représentait spécifiquement ce mode d’enchères, avec tous ces paramètres-là, n’existait pas, ça a donc été le sujet de mon premier mémoire de master. J’aurais probablement pu aller travailler chez Google, peut-être aller bosser là-dessus avec mon master d’économie. Du coup, dans mon deuxième master, j’ai fait un deuxième mémoire de master, j’ai travaillé vraiment sûr sur le logiciel libre et j’étais dans un master avec des économistes plus de gauche que dans mon premier.

Frédéric Couchet : C’était quel master ?

Maud Royer : C’était le master EPOG [Economic POlicies for the Global transition] à Paris 13, à Villetaneuse, avec beaucoup de gens qui travaillaient beaucoup sur les communs, qui, je pense, manquait encore de gens qui avaient envie de mettre en lien ce concept des communs développé dans tout un champ de l’économie – qui ne vient pas que de là – et le logiciel libre. On ne s’est pas soucié des gens qui n’avaient pas forcément l’expertise technique pour comprendre complètement ce qui se passait avec le logiciel libre, qui m’ont beaucoup encouragée à travailler là-dessus et je crois que ça m’a marquée. J’ai fait un mémoire là-dessus, sur comment étaient adoptés les logiciels libres dans les organisations. C’est aussi l’époque où j’ai fait un stage à Etalab qui était l’Agence des services du Premier ministre, qui s’occupait de l’open data.

Frédéric Couchet : Un service public. Ça existe encore.

Maud Royer : Je crois que ce moment a marqué un peu un tournant pour moi, parce que c’est le moment où je me suis dit « il y a beaucoup de gens, en particulier des gens avec qui je pouvais discuter dans le cadre de ce mémoire, qui pensent qu’on peut concevoir la question du logiciel libre en dehors de la question de qui le fait, qui l’écrit, qui l’utilise, etc. » À ce moment-là, en 2016, je finissais mes études, de toute façon cette page s’est refermée parce que je suis allée travailler dans la campagne de Jean-Luc Mélenchon, mais si j’étais restée je pense que je me serais plutôt attachée à essayer de montrer – c’est ce que beaucoup de gens ont fait depuis, j’ai vu des conférences au FOSDEM [Free and Open source Software Developers’ European Meeting ] il y a deux ans, je ne sais plus les noms, malheureusement, des deux personnes qui travaillaient là-dessus – comment il y a eu une certaine réappropriation du logiciel libre, d’ailleurs plus souvent appelé open source que logiciel libre, par le capitalisme et comment il a su en faire aussi quelque chose qui fonctionne très souvent à son profit. J’ai pris beaucoup de recul à cette époque-là, du coup j’ai décentré la question du logiciel libre plus largement sur des questions de libertés numériques, parce que je pense qu’on ne peut pas travailler l’un sans l’autre, en tout cas que ce n’est pas pertinent, même généralement, de penser la question du logiciel libre sans penser la question du capitalisme et comment le capitalisme concentre aussi ses moyens de production, sa propriété, etc. Je peux éventuellement détailler. Le truc dont je me suis un peu rendu compte à l’époque, c’est qu’en fait l’open source, comme ils l’appellent, c’est aussi un moyen, pour les GAFAM en particulier, mais aussi pour des entreprises de taille intermédiaire, de mettre en commun de la R&D, de la recherche et développement, qui va avant tout leur profiter et qui va profiter, de manière générale, à tout le secteur. Mais ça ne les dérange pas, parce que, de toute façon, ça fait des dizaines d’années que le fonctionnement des GAFAM, pour maintenir leur position dominante et leur position monopolistique sur le marché, consiste à racheter les petites boîtes, ils sont donc très contents si, entre guillemets, il y a « une barrière à l’entrée » qui facilite l’innovation. C’est une forme de subvention à l’innovation par les plus gros et ils savent que cette innovation par les petits va, au final, leur profiter parce qu’ils vont les racheter et qu’ils vont les intégrer à leur monopole. J’avais fait des statistiques, mais on le savait déjà à l’époque, sur les commits du noyau Linux, sur les modifications faites sur le noyau Linux, et 90 % sont faits par des salariés de boîtes très importantes du secteur.

Frédéric Couchet : On peut citer IBM, Google et d’autres, je n’ai pas les noms en tête. Le noyau Linux est une partie importante d’un système d’exploitation libre sur lequel beaucoup de grosses entreprises contribuent directement.

Maud Royer : Qui mettent en commun leurs coûts de développement et elles y gagnent beaucoup avec cette mise en commun. Ça c’est ce qu’a fait l’émergence des GAFAM au logiciel libre.
Plus récemment encore, j’ai un peu étendu la question, je l’ai fait notamment dans le cadre de mon travail à la France Insoumise où, à un moment, on m’a fait bosser sur le programme numérique : je me suis demandé ce qu’a fait l’émergence des GAFAM à des instances de gouvernance de l’informatique, au-delà de la question de la propriété intellectuelle, qui ont émergé dans les années 70/80, même dans les années 90. C’est l’exemple de l’IETF [Internet Engineering Task Force], un organisme international de standardisation des protocoles d’Internet, en gros les standards technologiques sur lesquels tout le monde se met d’accord pour qu’ils puissent communiquer entre eux. Autant la première version d’HTTP, le protocole qui est à la base de la navigation web, a été défini quasiment uniquement par des chercheurs du public, autant HTTP/3 est le résultat, dans la même instance, d’une discussion entre des ingénieurs de Facebook, des ingénieurs de Google et des ingénieurs de Microsoft. En fait, plus personne d’autre qu’eux n’a de pouvoir réel, en tout cas ne peut faire le poids, quand bien même ces discussions se passent au consensus.

Frédéric Couchet : En théorie, dans ces structures, n’importe qui peut participer. Mais ce que tu expliques, c’est que la mainmise de ces grands groupes, qui ont des salariés à temps plein pour travailler sur ces sujets-là, fait que, finalement, ils orientent les standards de l’Internet vers ce qui les intéresse avant tout, tout ce qui rapporte, tout ce qui renforce un modèle économique notamment basé sur la pub, les données personnelles, etc.

Maud Royer : Exactement. On parle de la recherche publique, on parle de la souveraineté des États, mais, en fait, il n’y a plus aucun État qui se donne les moyens d’agir, par exemple sur les standards du Web, parce que, pour s’en donner les moyens, il faut qu’il y ait des ingénieurs du public en nombre suffisant, payés pour le faire, pour participer à ces discussions et ce n’est pas le cas. Après, il y a des gens qui le font.

Frédéric Couchet : Sans doute quelques-uns, mais pas suffisamment.

Maud Royer : Voilà ! Vraiment pas suffisamment et, de toute façon, je pense que c’est complètement en dehors des radars de tous les gens qui font des grands discours sur la souveraineté numérique, alors que les protocoles avec lesquels on communique sur Internet sont des questions cruciales.

Frédéric Couchet : On voit cela notamment dans un protocole important qui est celui du mail, du courriel, où, pour tout ce qui est gestion anti-spam, etc., ce sont aujourd’hui les grands qui décident et on doit se conformer, par exemple, à ce que décide, en gros, Gmail, et adapter ses propres règles quand on gère ses propres serveurs de mails. Tu m’as dit que c’était en 2016 ?

Maud Royer : J’avais écrit ces trucs sur les organismes de standardisation pour l’Institut La Boétie qui est le think tank de la France Insoumise en 2021. Ce sont donc des trucs plus récents, mais qui, pour moi, vont dans la ligne de « le logiciel libre, c’est bien, mais si on ne pense pas la place des grosses entreprises là-dedans ! »

Frédéric Couchet : Donc, c’est une brique essentielle mais pas suffisante et ce qui t’a intéressée, dans ton parcours, c’est d’aller au-delà.
Il y a une question sur la zone de chat. Je rappelle qu’il y a une zone de chat sur le salon web, sur le site causecommune.fm, bouton « chat », salon #libreavous. Une personne te demande quelle différence tu fais entre open source et logiciel libre. Même si tu l’as un peu expliqué, est-ce que tu peux détailler ?

Maud Royer : Pour moi, dans le logiciel libre, même si ce n’est pas explicitement quelque chose d’anticapitaliste, il y a cette volonté de liberté, notamment de liberté de l’utilisateur final, qui me semble très importante, donc de liberté individuelle. C’est vraiment une différence personnelle.

Frédéric Couchet : C’est ton interview, c’est ton Parcours libriste !

Maud Royer : Alors que pour moi, dans l’open source, il y a vraiment cette idée de « on met en commun la propriété intellectuelle », qui est vraiment une approche économique, utilitaire, et il n’est pas du tout question de liberté individuelle, elle me paraît absente dans la réflexion de l’open source.

Frédéric Couchet : En fait, ce sont souvent les mêmes logiciels qui sont derrière, ce sont souvent des licences comparables, mais la philosophie et l’objectif ne sont pas les mêmes, tout simplement. Ce qui t’intéresse plus c’est vraiment la partie logiciel libre parce que, comme tu dis, tu mets au centre la personne utilisatrice de l’informatique, là où les grands, les GAFAM et compagnie, qui utilisent de l’open source, vont le faire pour d’autres fins.

Maud Royer : Oui clairement.

Frédéric Couchet : Vu qu’on est sur ce sujet-là, comment vois-tu les entreprises du logiciel libre – je ne vais en citer aucune comme ça je ne me fâcherai avec personne – qui disent faire de l’open source, soit qui font du service soit qui sont des sociétés éditrices d’un logiciel libre ? Quelle est ta position par rapport à ça ? Je parle vraiment de sociétés plutôt type PME, PMI.

Maud Royer : Je vais dire quelque chose d’un peu… Je ne pense pas que le capitalisme soit une force qui n’apporte que des mauvaises choses. C’est plutôt une bonne chose que le monde capitaliste de l’informatique se développe de plus en plus avec l’open source, quand bien même il le fait à son profit. C’est quand même mieux pour tout le monde que si on n’avait que des Microsoft qui ne font que du logiciel propriétaire, aux sources fermées, qui se font de la concurrence entre eux. En vrai, c’est plutôt pas mal que React, qui est une grosse librairie, avec laquelle beaucoup de gens font du Web aujourd’hui, ait été rendue open source par Facebook aujourd’hui, c’est une bonne chose !

Frédéric Couchet : Oui, parce que beaucoup de produits utilisés aujourd’hui par les développeuses et développeurs de logiciels libres ont été initiés, sont même développés par des GAFAM.

Maud Royer : Absolument et qui, souvent d’ailleurs, prennent un peu leur indépendance après. Ils ne prennent pas leur indépendance sous la pression des utilisateurs finaux, malheureusement, mais quand ça devient effectivement de la mise en commun de capital indispensable un peu à tout le monde, il y a de la pression entre gros acteurs du capitalisme : « s’il vous plaît, est-ce qu’on peut mettre ça en gouvernance partagée, parce que c’est quand même un peu embêtant qu’il n’y en ait qu’un d’entre nous qui ait la main dessus ». C’est pour cela que la Linux Foundation, que tout un tas de fondations, comme ça, gouvernent des projets open source, qui sont, en fait, des moyens de gouvernance qu’ont trouvé les grosses entreprises pour gérer ce qui est un capital commun.

Frédéric Couchet : Et arriver à se mettre d’accord dans l’intérêt de ces entreprises.

Maud Royer : De tout le monde, c’est ça, mais l’utilisateur final a généralement peu son mot à dire dans ce type d’instance. Mais c’est mieux que du logiciel propriétaire, pour moi ça ne fait ça fait aucun doute et je veux qu’ils continuent, parce que, en vrai, on peut faire plein de choses et on peut, notamment parfois, détourner ces technologies qui sont mises à notre disposition pour faire des choses très intéressantes. Pour moi, c’est tout le sens de la culture du hacking, encore aujourd’hui, qui est d’utiliser des choses qui sont là pour faire pas forcément exactement ce à quoi ça sert au début et en faire quelque chose d’utile à la société ou simplement de rigolo, parfois aussi. Mais oui, tant mieux que ça existe déjà.

Frédéric Couchet : OK. Je propose qu’on fasse une pause musicale, une petite respiration, comme cela, après, nous parlerons justement du hacking et aussi de ce que tu as fait en utilisant ces outils et aussi les outils tu as développé.
Nous allons faire une pause musicale. Nous allons écouter Burn The Whole Thing Down par Momma Swift. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Burn The Whole Thing Down par Momma Swift.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Burn The Whole Thing Down par Momma Swift, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution. La traduction c’est visiblement « on brûle tout », dans cette chanson. En tout cas, je vous encourage à écouter les paroles, je pense que ça a dû plaire à Maud.
Nous allons poursuivre notre discussion, toujours avec Maud Royer qui est développeuse web, experte en stratégies numériques de mobilisation et de plaidoyer. On va bientôt attaquer la mobilisation et le plaidoyer, on va expliquer ce que c’est. Avant, on a une question sur le salon web par rapport à ce que tu expliquais juste avant la pause musicale : Maud, est-ce que tu publies sur papier ou sur le Web ? Où pourrait-on lire toutes les idées et les travaux que tu développes ? Donc, est-ce que tu as publié ?

Maud Royer : Je crois que l’article sur les instances de gouvernance, notamment de standardisation du Web, n’est plus disponible sur le site de l’Institut La Boétie qui a été refait et les gens n’étaient pas au courant que les bonnes URL sont les URL qui ne bougent jamais !

Frédéric Couchet : Ou qu’il y a des redirections.

Maud Royer : Il est disponible sur mon site perso, maudroyer.fr, je ne sais plus quel est le titre, mais on le trouvera.

Frédéric Couchet : On mettra le lien dans la page de l’émission.

Maud Royer : Le mémoire, pour le coup, que j’ai fait en M2 n’est pas disponible, n’est pas publié et ne le sera jamais. Sinon, j’écris de temps en temps des articles sur mon site perso et mon livre paraît le 9 octobre sur la transphobie en France ces dernières années, mais ça n’a rien à voir avec ce dont on a parlé jusqu’à présent.

Frédéric Couchet : Ça n’a rien à voir, mais autant l’annoncer tout de suite, parce que, parfois, on oublie des choses évidentes. C’est Le lobby transphobe chez Textuel et ça paraît le 9 octobre. Présente-le en une phrase ou deux.

Maud Royer : C’est un livre qui revient sur ce qui, en France, depuis début 2020, est une sorte de résurgence des discours transphobes comme on n’en avait pas connu depuis longtemps, et, en particulier, leur pénétration importante dans le champ médiatique et politique, notamment à la droite et l’extrême-droite. Ça été très progressif, ça a commencé en 2020 par quelques personnes, puis, en 2021, CNews, Éric Zemmour et Valeurs actuelles s’y sont mis, puis, en 2023, on a vu les premières propositions de loi voulant enlever des droits aux personnes trans, quelques mois avant la dissolution. C’est donc un peu un retour sur tout cela, comment ça s’est organisé et comment les personnes trans et leurs alliés peuvent y répondre aussi politiquement. Ça n’est absolument pas un bouquin qui explique ce qu’est la transidentité, qui va vous expliquer ce qu’est la transidentité si vous n’y connaissez rien, il y a plein d’autres bouquins qui le font très bien, ça n’est pas l’objet. C’est vraiment un bouquin sur un combat politique important que je mène, parce que je suis concernée au premier chef, mais aussi important pour des milliers de personnes.

Frédéric Couchet : Notamment à travers ton association Toutes des Femmes, toutesdesfemmes.fr, dont tu es la présidente, si je me souviens bien.

Maud Royer : Absolument.

Frédéric Couchet : Donc, ça sort le 9 octobre et, si vous voulez le commander, il y a une librairie parisienne qui s’appelle A Livr’Ouvert, une librairie très sympathique dans le 11e où vous pouvez le commander, vous demandez Magali qui est, par ailleurs, aussi présidente de l’April, elle est multitâches elle aussi, en tout cas multi-activités plutôt que multitâches.
Juste avant la pause, tu parlais de l’importance du hacking et aussi de faire des choses rigolotes. Déjà, est-ce que tu peux expliquer ce qu’est le hacking ?

Maud Royer : En français, ça veut dire « bidouiller » et, pour moi, c’est vraiment la bonne réponse. Moi, j’ai appris en bidouillant, j’ai appris parce que le logiciel libre existe. Je n’aurais pas pu apprendre l’informatique sans le logiciel libre, puisque je ne suis jamais allée en école d’informatique et que, au départ, je n’ai même pas commencé par des technologies web qui sont un peu, par essence, open source, quand bien même elles ne le sont pas juridiquement, puisque ce n’est pas du code compilé, donc on y a toujours un peu accès.
Après le C, j’ai eu une grosse période où j’ai fait un langage de programmation – je ne sais pas s’il est encore très vivant aujourd’hui –, le Vala, une tentative, un projet Gnome de construire un langage de programmation. Ça va être très court, après je reviens à des choses compréhensibles par tout le monde. C’est une tentative du projet Gnome concernant un langage orienté objet, autour de GObject, qui compilait un langage qui ressemblait un peu à du C++ vers du C, qui, ensuite, être compilé derrière.

Frédéric Couchet : C’est aussi une occasion de préciser que, dans l’informatique, il y a beaucoup de langages de programmation – C, Vala, etc. Par contre, partie logiciel libre, c’est le fait qu’on ait accès au code source ? Par exemple, tu as pu lire du code source et ça t’a appris les choses ou pas du tout ?

Maud Royer : Oui. C’est aussi la culture de la documentation qu’il y a dans le logiciel libre. J’ai passé ma vie à lire de la documentation, du coup, quand j’ai appris le Vala, c’était pour programmer mon propre player audio parce que je n’étais pas contente de celui qu’il y avait par défaut dans Ubuntu à l’époque et même d’aucun qui existait sous Gnome. Je n’ai, évidemment, jamais réussi à terminer ce projet seule. En fait, j’ai beaucoup appris l’informatique en me lançant dans des projets que je n’ai jamais pu achever, parce qu’ils étaient beaucoup plus titanesques que je n’en avais l’impression, mais, au moins, c’était facile d’essayer et c’est ça le hacking pour moi : il n’y a aucune barrière à l’entrée, du coup on peut essayer. On se plante, mais on apprend comme ça et ça ne coûte rien, le code source est à disposition, ça prend deux secondes à télécharger.

Frédéric Couchet : Vu ta génération, tu es d’une génération où il y avait aussi beaucoup de ressources, de forums, etc., par rapport à la mienne et celle de Vincent, on va dire, as-tu utilisé ces ressources, ces forums, par exemple pour poser des questions ou pas du tout ?

Maud Royer : Avec le recul, j’ai étonnamment passé peu de temps sur des channels IRC, j’ai peu rejoint des communautés en ligne où il y avait de l’échange par rapport à ce que j’aurais pu faire et, même, ce qu’il aurait été probablement utile, pour moi, de faire pour me renseigner. En fait, j’ai beaucoup lu, mais, finalement, j’ai peu contribué à autre chose que du code. J’ai eu une période où j’ai contribué beaucoup sur Stack Overflow, et c’est un peu absurde parce que j’ai vraiment, pour le coup, donné du savoir à une entreprise privée qui l’exploite commercialement. C’est un site de questions/réponses d’informatique et j’ai répondu un peu à quelques grandes questions qui étaient présentes sur Stack Overflow du type : peut-il y avoir des race conditions dans un programme à un seul thread ? C’est encore une réponse consultée quotidiennement par des dizaines de gens ce qui fait que, sur Stack Overflow, j’ai un compte avec énormément de points de réputation, comme ils les appellent, parce que j’ai contribué un peu à deux/trois questions très importantes comme ça. Mais c’est tout ce que j’ai fait comme participation à des communautés de développeurs.

Frédéric Couchet : OK ! Le temps passe très vite à la radio.
On va revenir sur la mobilisation du plaidoyer, notamment ton implication à La France Insoumise, dans la partie numérique. On a bien compris tes motivations à rejoindre ce mouvement, mais, concrètement qu’est-ce que tu as fait et qu’est-ce que le plaidoyer ? Peut-être que les gens connaissent d’autres mots. Peux-tu nous présenter ce qu’est le plaidoyer ?

Maud Royer : Ce sont deux choses différentes. Le plaidoyer c’est plutôt ce que je fais maintenant que ce que j’ai fait à La France Insoumise, mais j’ai aussi beaucoup appris à La France Insoumise pour faire ce que je fais maintenant.
À La France Insoumise, j’ai fait beaucoup de choses. Déjà, évidemment, j’ai géré l’infrastructure, j’ai géré l’hébergement des gros sites, lafranceinsoumise.fr, j’ai géré 2017.fr, puis melenchon2022.fr, toujours avec le même plaisir. Un de mes défis technologiques préférés c’est de gérer les énormes trafics qu’on a sur ce type de site internet au moment du 20 heures où Jean-Luc Mélenchon annonce sa candidature à l’élection présidentielle.

Frédéric Couchet : Ou quand il sort une phrase et qu’il y a un pic tout d’un coup.

Maud Royer : Ce n’est pas aussi rapide qu’à 20 heures rien ne bat le pic du 20 heures de TF1 ou de France 2 encore aujourd’hui, parce qu’il faut le temps que la phrase soit relayée par un journal, etc., c’est beaucoup plus étalé dans le temps, même si, au final, sur une journée, ça peut faire le même trafic qu’un pic après un moment d’une minute trente après qu’une URL ait été dite à la télé.
J’ai bossé là-dessus, ensuite j’ai bossé sur les outils de mobilisation et je pense que ce sont des choses qui n’existaient pas trop à l’époque. Je pense que quand j’ai commencé, en 2017, le projet Mobilizon, un projet de Framasoft pour développer, justement, un peu une plateforme comme ça où les ou les militants peuvent poster leurs événements, s’organiser, etc., n’existait pas ou c’était balbutiant. En tout cas en 2016, quand j’ai commencé, parce que la campagne de 2017 a commencé avant 2017, il n’y avait vraiment pas grand-chose.

Frédéric Couchet : Es-tu partie d’outils qui existaient déjà pour les agréger, quelque part, ou vous avez carrément fait aussi du développement pour ces outils ?

Maud Royer : À l’époque, par manque total de ressources par rapport à ce qu’on voulait faire et aussi parce que je n’avais pas, entre guillemets, « la position » dans La France Insoumise pour imposer un peu ce que je voulais, nous sommes même partis sur un SaaS è<em<Software as a Service], au début de la campagne, un service hébergé ailleurs, pas chez nous, donc on n’avait absolument pas accès aux sources. C’était NationBuilder, en plus un truc américain. Progressivement, on a remplacé une à une les briques de ce truc par des logiciels libres que nous avions écrits nous-mêmes.

Frédéric Couchet : Combien étiez-vous dans l’équipe ? Ou étais-tu seule ?

Maud Royer : En 2016, on était deux/trois, on avait un stagiaire, ce n’était pas fou !

Frédéric Couchet : Il faut relativiser. Trois personnes quoi ! Les gens s’imaginent qu’il y a beaucoup de personnes dans les partis !

Maud Royer : Mais aussi parce que, historiquement, très peu de moyens sont mis dans l’informatique dans les campagnes présidentielles françaises.

Frédéric Couchet : Contrairement aux États-Unis !

Maud Royer : Oui. Après, il y a aussi beaucoup moins de sous qui sont mis dans les campagnes tout court. Aux États-Unis, la primaire de Bernie Sanders, c’est un dollar par vote récolté, c’est phénoménal !
On a donc fait avec les moyens du bord, on a progressivement remplacé et je pense qu’en octobre 2017, après la campagne, on avait complètement viré NationBuilder et on tournait entièrement sous logiciel libre, avec un truc sous Django qu’on avait entièrement développé, Django est un cadre de développement libre et, je trouve, très bien foutu.

Frédéric Couchet : Je pense qu’à la radio il faudrait qu’on prévoie des traductions de tous les termes, même nous, parfois, nous réfléchissons avant de trouver la version française. Donc, ça c’était en 2017.

Maud Royer : Oui, c’était en 2017. On a fait ensuite pas mal d’outils de gestion interne et puis en 2022, l’équipe a beaucoup grossi, on a recruté une designeuse, on a recruté d’autres devs, etc., et là on a commencé à développer une application qui ressemblait beaucoup plus à un réseau social, qui est devenue actionpopulaire.fr, avec cette idée d’avoir vraiment une plateforme dédiée à l’action qui soit identifiée comme un objet séparé du site lafranceinsoumise.fr où il y avait les news, les vidéos, des discours, etc., alors qu’auparavant c’était une sous-section du site qu’on essayait, justement, au contraire, d’être visuellement la plus intégrée possible au site où il y avait les news.

Frédéric Couchet : Peut-être aussi, je suppose, pour élargir au-delà de La France Insoumise.

Maud Royer : Oui, pour élargir. La campagne présidentielle, c’est toujours un moment d’élargissement et, en même temps, cette plateforme devait aussi faire les régionales en 2021, donc il fallait un truc qui, effectivement, ne soit pas trop siglé France Insoumise pour que les gens qui voulaient faire la campagne présidentielle puissent s’y rendre sans forcément adhérer à La France Insoumise, juste en soutenant la candidature de Jean-Luc Mélenchon. Ce truc a très bien marché, je suis vraiment très fière de ce qu’on a construit, il y a des tas de gens de partout dans le monde qui nous ont contactés pour en discuter avec nous.

Frédéric Couchet : C’est marrant parce que j’ai une remarque sur le salon web qui me dit « il y a pas eu trop de pub autour de l’existence de ces sites », ce qui me surprend, peut-être que je suis trop politisé, parce que je les ai vus.

Maud Royer : Action Populaire est un outil à destination des militants.

Frédéric Couchet : Avant toute chose, ce ne sont pas des outils à destination du grand public.

Maud Royer : C’est un outil à destination des gens qui ont déjà mis leur adresse e-mail sur melenchon2022.fr, qui ont cliqué sur « Je veux agir » et on les renvoie vers l’appli qui sert à ça. Ce n’est pas un outil de propagande, c’est vraiment un outil d’auto-organisation des gens. Il y a eu un petit peu de couverture par la presse spécialisée, on en a parlé comme troisième point dans une conférence de presse. C’est un outil majeur de la campagne présidentielle de Jean-Luc Mélenchon en 2022, en tout cas, parmi les gens qui ont participé à cette campagne, personne ne peut l’ignorer. Mais, pour les gens qui ont vu juste de l’extérieur, c’est effectivement complètement possible d’être passé à côté, le but n’était pas d’en faire la pub, même si dans des milieux très spécialisés ça a pu nous aider. Je me souviens de gens sur Twitch qui comparaient les codes sources des différentes applications des candidats, qui disaient que c’est celui de La France Insoumise qui est le mieux écrit et j’étais très fière.

Frédéric Couchet : Il y a aussi l’aspect que dans les programmes de certains partis, dont La France Insoumise, Les Verts, les communistes et autres, il y avait un engagement logiciel libre et qu’une tradition c’est de vérifier un petit peu, dans les actes, ce qui se passait. Peut-être les années précédentes, comme tu le disais, on utilisait des sites extérieurs et finalement, en 2022, il y a eu la mise en pratique du positionnement par rapport aux actes avec du recours au logiciel libre et aussi, sans doute, avec l’absence de trackers type Facebook, Google et compagnie. Donc utiliser Matomo, qui est un outil libre d’analyse de sites web, à la place de Google Analytics.
Le temps passe super vite, il ne nous reste même pas une dizaine de minutes, après j’aurai deux questions traditionnelles.
Là, on a bien compris ton engagement dans La France Insoumise 2017, 2022. Sur ton site web, il y a un onglet « Ce que je fais » et il est indiqué « depuis le printemps 2022, je partage mon esprit et mon temps entre mes deux intérêts, donc, d’un côté, l’activité de ma société et, de l’autre, je consacre mon temps libre à militer dans des associations et collectifs sur des projets qui me semblent importants », dont tu as parlé tout à l’heure. Qu’est-ce qui a motivé, finalement, en 2022, ce choix de créer une société, je ne sais pas si tu es indépendante ou autre, et de n’y consacrer, entre guillemets, « que 50 % de ton temps », si je comprends bien, à peu près ?

Maud Royer : 50 %, ça dépend des moments, je ne suis pas sur un partage strict. Déjà, le fait que j’aie la chance, quand même, d’être dans un secteur du marché du travail où on ne gagne pas trop mal sa vie et, en même temps, j’aime bien bidouiller, j’aime bien faire des projets, j’ai toujours un petit projet personnel, des trucs que je développe, une petite application, mais ce n’est pas non plus mon grand kif de faire de l’informatique pour gagner ma vie. Ça m’allait bien à La France Insoumise parce que c’était en même temps militant, mais, de toute façon, si je n’ai pas beaucoup de temps pour militer à côté, ce qui est mon réel intérêt dans la vie et ce qui me fait me lever le matin, c’est compliqué. Après tant d’années passées à La France Insoumise où c’était hyper-intéressant et, globalement, j’étais très en accord avec tout ce que j’ai fait politiquement là-bas, c’est peut-être la volonté d’avoir un peu la liberté de consacrer beaucoup de temps à des causes politiques et de faire un peu ce que je veux, notamment de prendre le temps d’écrire ce bouquin et j’ai cette liberté parce que je suis freelance dans un métier où ça paye bien.

Frédéric Couchet : Et freelance avec que du logiciel libre ?

Maud Royer : Oui. En tout cas, je n’ai pas besoin de travailler pour des gens qui font du logiciel propriétaire, je ne suis même pas sûre que je gagnerais mieux ma vie. Je ne travaille qu’avec des gens qui font du logiciel libre, je dirais même que je ne travaille qu’avec des gens qui travaillent sur le logiciel libre. Je travaille notamment sur un logiciel qui s’appelle Hermine, qui est développé par le cabinet Inno3 de Benjamin Jean, avec plein d’autres partenaires. On automatise une partie de l’analyse juridique qu’il faut faire quand on inclut d’autres logiciels libres dans les logiciels qu’on produit. C’est hyper-intéressant, travailler là-dessus m’intéresse beaucoup parce que je suis quand même un peu une nerd de la propriété intellectuelle et du copyright.

Frédéric Couchet : Effectivement ! On a compris ! OK. C’est très cool.
Ma dernière question avant les deux questions traditionnelles des Parcours libristes : toujours sur ton site, à un moment tu évoques la charge militante qui repose toujours sur les mêmes personnes, c’est un bout de phrase. Dans ton implication militante, je me suis demandé comment tu gères, justement, cette charge militante, comment tu prends soin de toi, comment ça se passe en fait.

Maud Royer : Ce n’est pas toujours facile. Par exemple, le choix que j’ai fait, depuis je suis présidente, de consacrer vraiment beaucoup de temps à Toutes des Femmes, c’est un choix que je ne pourrais pas faire si, par ailleurs, je n’avais pas cette activité freelance dans laquelle je suis assez souple avec mon emploi du temps. Ce que je fais à Toutes des Femmes je le fais parce que je sais que ce n’est pas pour toujours. Je sais que je suis en train de donner du temps à une association qui est aussi en train de se construire, de se développer, on a cinq fois plus d’adhérentes qu’il y a un an et demi, par exemple. Mon souhait, c’est qu’un jour cette association fonctionne sans que moi j’aie besoin particulièrement d’y consacrer du temps, parce que j’aurai aidé à l’organiser, à la structurer, avec toutes les autres cofondatrices. Je conçois beaucoup de mes engagements comme des projets de construction plutôt que de « l’investissement de fonctionnement », entre guillemets, et je pense que c’est cela qui me donne envie de continuer, de dire que même si j’arrête il en restera quelque chose parce que d’autres gens en feront quelque chose. Je crois que c’est ce qui me fait lever le matin, mais, parfois, on a aussi ce truc que si c’est ça l’intérêt, il faut effectivement réussir à construire quelque chose. C’est là où ça devient stressant et angoissant, je ne sais pas trop comment je le gère, j’ai des périodes où je suis très stressée, comme, je crois, tout le monde.

Frédéric Couchet : D’accord !
Les deux dernières questions traditionnelles, celle-là est un peu particulière parce que c’est un Parcours libriste. Normalement, on demande à la personne qu’on invite de résumer, si possible en moins de deux minutes, les principaux messages qu’elle voulait faire passer. Qu’est-ce que tu dirais ou est-ce que tu as envie de rajouter quelque chose ?

Maud Royer : Je ne sais pas qui nous écoute, mais j’ai envie de dire que si vous êtes déjà convaincu par le logiciel libre, mais que vous n’y voyez que l’aspect liberté individuelle, allez plus loin et creusez la question de la propriété intellectuelle en général, notamment de la propriété intellectuelle sur la recherche, les brevets, les médicaments, les technologies de santé. Je suis aussi très proche des luttes historiques, par exemple du VIH. L’histoire d’Act Up, l’histoire de AIDES et de tous les gens qui ont lutté contre le VIH, sont des histoires qui ressemblent étonnamment à celle du logiciel libre. Ce sont des gens qui ont lutté contre la mainmise de gens sur des résultats de recherche qui devraient appartenir à tout le monde. Donc, creusez là-dessus, je pense ça va vous intéresser.

Frédéric Couchet : Je me permets juste une petite incise : il y a une vingtaine d’années, quand la notion des brevets sur les logiciels arrivait, on a fait pas mal d’actions avec Act Up à l’époque où Emmanuelle Cosse était la présidente, parce que, effectivement, il y avait une convergence.

Maud Royer : Il y avait une grosse convergence sur ces luttes-là. C’est un peu le message que j’ai envie de faire passer : la propriété intellectuelle, ce n’est, globalement, pas ouf !

Frédéric Couchet : Dernière question : est-ce que tu aurais un ou deux conseils de lectures, de podcasts ou autres, qui soient en rapport avec toi, avec le Libre ou avec autre chose ? Quelque chose qui te fait plaisir ou quelque chose qui peut faire du bien aux gens ?

Maud Royer : On a pas déjà pas mal parlé du livre, je comptais le dire comme un des deux. Donc, Le lobby transphobe, le 9 octobre aux éditions Textuel.
Pour le deuxième, j’ai réfléchi, et puis je n’ai pas envie de conseiller un bouquin sur le logiciel libre, ils sont souvent déjà conseillés. Je crois que le bouquin qui a été le plus important dans ma trajectoire d’informaticienne, qui a fait que je fais ce métier aujourd’hui, que je me suis même passionnée pour le noyau Linux et son histoire, etc., ça a été Systèmes d’exploitation d’Andrew Tannenbaum, un énorme manuel sur la façon dont fonctionnent les systèmes d’exploitation et que j’ai lu, peut-être un peu trop jeune pour comprendre tout ce qu’il y avait dedans. En fait, c’est aussi bien que toute personne qui découvre l’informatique en bidouillant, comme je l’ai fait ado, et qui apprend – moi j’ai principalement appris en essayant de faire –, de prendre du recul et, parfois, de lire des gros pavés de théorie, si on en a la force.

Frédéric Couchet : Je ne suis pas sûr, je vais peut-être commettre une erreur, c’était MINIX le système ?

Maud Royer : MINIX, c’est le « système éducatif », entre guillemets, qu’a développé Andrew Tannenbaum et qui est un peu l’illustration de son livre. Andrew Tannenbaum est un éminent professeur et Linus Torvalds, le créateur du noyau Linux, a été un de ses étudiants. Ce qui est très drôle c’est que quand Andrew Tannenbaum a vu les premières versions du noyau de Linux, il a dit que ça ne marcherait jamais et que les choix technologiques qu’il avait faits étaient une erreur ; Andrew Tannenbaum était pour des choix technologiques complètement opposés à ceux qu’a fait Linus dans le noyau Linux. Dans ce bouquin, Systemes d’exploitation, il reconnaît son erreur, à posteriori, d’avoir prêché « trop tôt », entre guillemets, pour une certaine architecture qui était bien sur le papier, mais qui, en pratique, ne pouvait pas marcher aussi bien que celle du noyau Linux. Le débat historique entre les deux est très intéressant, j’ai appris beaucoup de choses.

Frédéric Couchet : OK. On mettra toutes les références dans la page consacrée à l’émission, juste après, sur libreavous.org/218 puis c’est la 218e émission.
Merci Maud, c’était un plaisir de t’avoir. Je vais rappeler ton site web, maudroyer.fr. Passe une belle fin de journée.
On va faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Frédéric Couchet : Après la pause musicale, nous écouterons la première chronique de Vincent Calame sur son nouveau thème, La Convivialité d’Ivan Illich. En attendant, nous allons écouter El Jefe par San Blas Posse. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : El Jefe par San Blas Posse.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter El Jefe par San Blas Posse, disponible sous licence Creative Commons Partage dans les mêmes conditions.

[Jingle]

Frédéric Couchet : Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Chronique « Lectures buissonnières » de Vincent Calame - La Convivialité d’Ivan Illich

Frédéric Couchet : Vincent Calame, informaticien libriste, bénévole à l’April, nous propose des chroniques « Lectures buissonnières » ou comment parler du Libre par des chemins détournés en partageant la lecture d’ouvrages divers et variés.
Vincent, en cette saison de Libre à vous !, tu entames un cycle sur le livre La Convivialité d’Ivan Illich.
Vincent Calame : Oui, tout à fait. Pour celles et ceux qui nous écoutent, on ne va pas faire un virage à 180 degrés avec tout ce qu’a dit Maud, puisqu’elle nous a beaucoup parlé de liens entre logiciel libre et politique. On va un peu continuer sur ce thème-là.
Je me suis effectivement proposé, pour cette nouvelle saison de Libre à vous !, de faire un peu dans le lourd et de nous attaquer à un morceau de choix, à savoir les travaux d’Ivan Illich et, comme tu l’as dit, plus particulièrement son ouvrage La Convivialité.

Qui est cet Ivan Illich ? Première question. D’où sort-il et d’où me vient cette idée d’en parler ? Et, bien sûr, quel est le rapport avec le logiciel libre ?
Voici une série de questions que vous vous posez sûrement, auxquelles je vais commencer à répondre dans ma chronique d’aujourd’hui. Comme vous pouvez vous en douter, le sujet est vaste et une seule séance ne suffira pas, donc, attendez-vous à ce que je vous parle d’Ivan Illich plusieurs chroniques d’affilée.

Tout d’abord, je dois préciser que ce n’est pas la première fois que j’en parle. Si vous consultez le magnifique site de Libre à vous !, www.libreavous.org, qui, rappelons-le, archive l’intégralité des émissions, vous pourrez retrouver ma chronique du 14 juin 2022 intitulée « Logiciel libre, outil convivial », chronique tenue lors de l’émission 147.

Frédéric Couchet : Comme ce site est magnifiquement bien fait, je vais préciser que pour retrouver directement, il faut aller sur libreavous.org/147, le numéro de l’émission.

Vincent Calame : Exactement. Comme le titre de la chronique l’indiquait, j’y parlais déjà d’Ivan Illich et ce en quoi ses travaux trouvaient écho dans le mouvement du logiciel libre. Cependant, pour être honnête, ma connaissance d’Ivan Illich était très lacunaire, elle se limitait en tout et pour tout à une citation de lui dans l’ouvrage de Barbara Nicoloso, Petit traité de sobriété énergétique, ouvrage, au passage, qui, m’a servi de fil rouge pour une autre saison de chroniques sur la sobriété énergétique, que vous pouvez aussi retrouver sur le site de Libre à vous !. J’arrête là l’intermède publicitaire, si vous ne savez pas quoi écouter !
Une seule citation, me direz-vous, ce n’est pas grand-chose, mais c’est sans doute une des plus célèbres, car j’ai retrouvé cette citation par la suite à plusieurs endroits. Je vais vous la redonner aujourd’hui, car elle résume bien le propos. Elle est extraite de l’ouvrage La Convivialité paru en 1973 : « J’appelle société conviviale une société où l’outil moderne est au service de la personne intégrée à la collectivité, et non au service d’un corps de spécialistes. Conviviale est la société où l’homme contrôle l’outil. » Voilà !
Lorsque j’avais lu cette citation à l’époque, j’avais fait immédiatement le rapprochement avec le logiciel libre, car la question du contrôle de ce que font nos ordinateurs est centrale dans les logiciels libres. Les logiciels privateurs transforment nos ordinateurs en boîtes noires et il ne nous reste plus qu’à espérer qu’elles font bien ce qu’elles disent qu’elles font, ni plus, ni moins.
Je m’étais donc promis de revenir à Ivan Illich de manière plus approfondie, de ne pas me contenter d’une citation, mais de lire l’ouvrage en entier, histoire de vérifier que je n’avais pas trop sorti la phrase de son contexte et que je n’étais pas trop à côté de la plaque.
Pour m’accompagner dans mes pérégrinations, je me suis appuyé sur l’ouvrage Introduction à Ivan Illich de Thierry Paquot, aux Éditions La Découverte. Thierry Paquot est philosophe de l’urbain, professeur des universités et a connu Ivan Illich. Je conseille vivement la lecture de cet ouvrage, si, vous aussi, vous avez envie de vous plonger dans Ivan Illich. Vous y trouverez des éléments de biographie, le contexte de rédaction de ses œuvres, leur réception à l’époque, leur prospérité ainsi que l’évolution de la pensée d’Ivan Illich.

Le temps est court, je ne vais donc pas entrer aujourd’hui dans le vif du sujet, ce sera pour les prochaines.
Je vous propose de terminer par quelques éléments de biographie pour cerner qui était le personnage Ivan Illich.

Il nait à Vienne le 4 septembre 1926, son père est croate catholique, sa mère luthérienne d’origine juive, c’est un peu un pur produit de la société cosmopolite, héritée de l’empire austro-hongrois, avant que la barbarie nazie plonge la MittelEuropa dans l’obscurité. Il était polyglotte, parlait l’allemand, le serbo-croate, l’italien, le français, l’anglais et, plus tard, l’espagnol, le portugais, le tagalog qui est la langue des Philippines et l’hindi, excusez du peu ! Il n’a pas réussi le chinois ! Après des études de chimie, de philosophie, de théologie et d’histoire, il entre dans la prêtrise à 25 ans et, au lieu d’une carrière vaticane qui s’annonçait brillante, il part aux États-Unis où il devient prêtre d’une paroisse d’émigrés portoricains.
Très vite, sa critique de l’Église en tant qu’institution va lui attirer les foudres de sa hiérarchie et il enfonce le clou en animant, dans les années 60, un centre de formation de missionnaires et volontaires étasuniens à destination de l’Amérique latine où il dénonçait le modèle de développement imposé par les pays industrialisés.
Les années 70 sont sa période la plus médiatique où il publie ce qu’il a appelé par la suite des « pamphlets », comme La Convivialité, en 1973.
À 50 ans, il quitte les projecteurs, devient professeur dans plusieurs universités et se consacre, avec un groupe de fidèles, à explorer de nouveaux sujets. On distingue d’ailleurs, dans sa bibliographie, les deux périodes et on parle même de deux « Illich ».
Il meurt en 2002, cohérent avec ses idées puisque, très critique vis-à-vis de l’institution hôpital, il avait refusé de se faire soigner la tumeur qui rongeait sa mâchoire.

Voilà une petite biographie rapide qui rappelle combien le personnage était atypique. Il ne nous reste plus qu’à plonger dans ses thèses. Nous le ferons dans la prochaine chronique.

Frédéric Couchet : Merci Vincent. Tu vas nous faire toute l’année 2024/2025 là-dessus ?

Vincent Calame : Je vais essayer de tenir !

Frédéric Couchet : Tu vas essayer de tenir sur La Convivialité d’Ivan Illich. C’était donc la première chronique « Lectures buissonnières » de cette nouvelle saison de Libre à vous !. Merci Vincent.

Nous approchons de la fin de l’émission, nous allons terminer par quelques annonces.

[Virgule musicale]

Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre

Frédéric Couchet : En ce moment, il y a pas mal d’activités libristes.
Vous pouvez, par exemple, découvrir la cartographie collaborative libre OpenStreetMap. Des animations sont en effet prévues le samedi 21 septembre à Nantes et c’est proposé par OpenStreetMap Nantes.

Vous pouvez également découvrir la base de données libre de produits alimentaires, créée par toutes et tous pour toutes et tous. C’est la journée Open Food Facts du samedi 21 septembre au dimanche 22 septembre et ça se passe à Paris.

Côté communauté scientifique, la conférence PyData. Cet événement réunira la communauté du logiciel pour le calcul scientifique et les data science, par exemple le logiciel libre Jupyter dont nous avons déjà parlé dans Libre à vous !. Ça se passera du mercredi 25 septembre au jeudi 26 septembre à la Cité des sciences et de l’industrie.

Le magnifique site de Libre à vous ! est fait avec un logiciel libre de publication de contenu qui s’appelle Spip, mais il y en a d’autres, et nos camarades de Wordpress, un logiciel libre de publication de contenu sur Internet, organisent un camp en Bretagne, vendredi 27 septembre à Rennes, avec, notamment, des stands dont celui de l’April. Vous aurez le plaisir, si vous êtes sur place, de rencontrer ma collègue Isabella Vanni que vous entendez régulièrement au micro de cette émission.

Côté radio Cause Commune, je vous rappelle que la radio vous propose un rendez-vous convivial chaque premier vendredi du mois, à partir de 19 heures 30, dans ses locaux, à Paris, au 22 rue Bernard Dimey dans le 18earrondissement. L’occasion de visiter le studio, de rencontrer les personnes qui font vivre la radio, avec buffet participatif à la clé. La prochaine rencontre aura lieu vendredi 4 octobre, j’y serai présent et, à partir de 20 heures, il y aura une émission en direct spéciale Fête des Possibles, parce que, en ce moment, c’est la Fête des Possibles. Si vous souhaitez présenter une initiative pour construire une société plus durable, humaine et solidaire, que vous voulez en parler quelques minutes derrière le micro, eh bien venez vendredi 4 octobre au studio de la radio et si possible, pour faciliter l’organisation, inscrivez-vous sur le site de Cause Commune.

Vous pouvez retrouver tous les détails de ces événements sur agendadulibre. org et d’autres événements évidemment en lien avec les logiciels libres et la culture libre près de chez vous.

Notre émission se termine.

Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission du jour : Maud Royer, Gee en rediffusion, Vincent Calame
Aux manettes de la régie aujourd’hui, Julie Chaumard.
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang 1, Julien Osman, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.

Vous retrouverez sur le site web, libreavous.org, toutes les références utiles ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.
N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez nous poser toute question.

Si vous écoutez ce message, c’est parce que vous êtes resté jusqu’à la fin de cette émission, pour cela, merci à vous. D’ailleurs, aujourd’hui, nous voulions remercier particulièrement xnix, qui nous a laissé un commentaire de félicitations sur le site de la radio, concernant les personnes qui sont intervenues dans l’émission 214 consacrée aux actions logiciel libre de la ville de Malakoff. N’hésitez pas à faire de même, à nous laisser un commentaire sur la page consacrée à l’émission du jour, sur libreavous.org/218, car c’est tout simplement la 218e>/sup> émission Libre à vous.

Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission. Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et faites connaître également la radio Cause Commune, la voix des possibles.

D’ailleurs j’en profite, vu que j’ai un petit peu de temps, pour annoncer que cette rentrée voit l’arrivée de nouvelles émissions sur Cause Commune.
Julie, je ne t’ai pas prévenue, il va falloir que tu te prépares en 30 secondes, je suis désolé.
Première émission qui arrive sur Cause Commune c’est Du poil sous les bras, proposée chaque mercredi à 21 heures. C’est un entretien avec une personnalité qui, grâce à ses apports théoriques ou pratiques, nous invite à mieux comprendre les systèmes de domination et à agir pour plus d’égalité, d’équité et d’éthique. Du poil sous les bras, c’est d’abord un podcast que la radio a plaisir à diffuser et « La p’tite Blan » a déjà été interviewée sur la radio, vous pouvez déjà retrouver l’interview de « La p’tite Blan » sur causecommune.fm. D’ailleurs, on reste un petit peu dans les thématiques d’aujourd’hui.
Deuxième émission qui arrive, et là, c’est un peu de l’auto-promo, c’est Chemins de traverse chaque mercredi en direct à 22 heures, donc après Du poil sous les bras, une émission dans laquelle Julie, Élise que vous connaissez aussi, Mehdi qui est mon voisin, et moi-même nous espérons vous proposer de belles rencontres et mettre en avant des parcours personnels et professionnels, des passions, des engagements. Pour la première, nous avons eu le plaisir de recevoir Nathalie Achard qui est médiatrice et facilitatrice. Elle organise notamment des formations à la non-violence au sein d’associations. Nathalie Achard a parlé un peu de son parcours, comme aujourd’hui Maud l’a fait, et surtout des liens entre privilège et oppression. Le podcast est en ligne sur causecommune.fm.
Je profite de la présence de Julie, car demain soir, à 22 heures, mercredi 18 septembre, nous allons inverser nos rôles, je serai en régie, tu seras à l’animation et tu vas recevoir Virginie Bonnefon. Explique-nous, en 30 secondes, qui est Virginie Bonnefon. Je suis désolé, je ne t’ai pas prévenue.

Julie Chaumard : Donc demain soir, j’animerai l’émission Chemins de traverse à 22 heures avec, comme invitée, Virginie Bonnefon. Virginie Bonnefon est une personne qui a un parcours atypique, qui aime aider les autres. On va voir comment elle arrive à aider les autres par ce qu’elle est et par ce qu’elle fait. Ses deux gros sujets sont notamment la photographie/les arts et le sport. Donc, à travers ces deux sujets, ces deux thèmes de sa vie, comment elle arrive à aider les autres et comment elle a eu un parcours incroyable.

Frédéric Couchet : On peut citer qu’elle a participé au projet LES 42, faire courir le marathon d’Athènes à 20 jeunes en difficulté et, côté photographie, elle est coautrice du livre De l’espoir à la vie, l’histoire d’une promesse médicale qui raconte l’épopée de la première naissance française après une greffe d’utérus. Ça va être magnifique ! Donc, demain soir, tu seras à l’animation.
Et le 25, tu animeras toujours et tu recevras Geoffrey Dorne, designer graphique. Geoffrey utilise notamment le design pour œuvrer sur des sujets politiques, sociaux, environnementaux pour différentes entités militantes. J’ai l’impression que ça ressemble à quelqu’un qu’on a eu tout à l’heure au micro.

Côté Libre à vous !, la prochaine émission en direct aura lieu mardi 24 septembre à 15 heures 30. Elle sera animée, normalement, par ma collègue Isabella Vanni. Nous ne savons pas encore quel sera le sujet principal, ce n’est pas encore fixé.

Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 24 septembre et d’ici là, portez-vous bien.

Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.

Média d’origine

Titre :

Émission Libre à vous ! diffusée mardi 17 septembre 2024 sur radio Cause Commune

Personne⋅s :
- Frédéric Couchet - Gee - Maud Royer - Vincent Calame
Source :

Podcast

Lieu :

Radio Cause Commune

Date :
Durée :

1 h 30 min

Autres liens :

Page de présentation de l’émission

Licence :
Verbatim
Crédits des visuels :

Bannière de l’émission Libre à vous ! de Antoine Bardelli, disponible selon les termes de, au moins, une des licences suivantes : licence CC BY-SA 2.0 FR ou supérieure ; licence Art Libre 1.3 ou supérieure et General Free Documentation License V1.3 ou supérieure.
Logo de la radio Cause Commune utilisé avec l’aimable autorisation d’Olivier Grieco, directeur d’antenne de la radio.

Avertissement : Transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant⋅e⋅s mais rendant le discours fluide. Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l'April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.