Bonjour. Merci d’être venus à cette présentation.
Je vais vous parler un peu de l’écosystème des professionnels du logiciel libre et de l’open source dans notre région.
Je suis Philippe Scoffoni, je suis le président d’une association qui s’appelle le Ploss Rhône-Alpes [1], une association qui regroupe les professionnels du logiciel libre et de l’open source en Auvergne-Rhône-Alpes, tout simplement, c’est l’acronyme. Elle représente un ensemble d’entreprises, on va avoir un petit peu, on va parler de ça.
Je vais vous présenter rapidement l’association, ses actions, un petit focus sur les modèles économiques qui sont les nôtres, entreprises du logiciel libre, et puis une revue d’une étude qui est faite, tous les ans, par le Conseil national du logiciel libre [2], qui permet d’avoir une idée de ce que représente aujourd’hui le numérique libre dans le monde économique, en France et en Europe. Trois grosses parties.
Ploss-RA
Le Ploss Rhône-Alpes est une association qui existe, maintenant, depuis un peu plus d’une dizaine d’années, qui a pour objectif de réunir des entreprises qui sont en général plutôt ce qu’on appelle des plus des pure players, c’est-à-dire des entreprises qui ont à peu près, je dirais, 100 % de leur activité qui est organisée, centrée, autour du logiciel libre. Ces entreprises ont donc fait le choix de se regrouper au travers d’une association pour essayer de porter un peu la filière dans notre région. C’est le pourquoi de l’existence de cette association.
Aujourd’hui, ce sont à peu près 35 entreprises, de tailles diverses et variées, ça va de la micro-entreprise à des structures bien plus grosses comme Smile ou Alterway, où, là, on compte plusieurs centaines de salariés. Là, c’est uniquement leur représentation locale, on va dire, qui adhère au Ploss Rhône-Alpes.
On va porter un certain nombre d’actions locales, toujours pareil, sur trois axes principaux : un premier axe va être tout ce qui touche à l’éducation, la formation, puisque pour nous, entreprises, Scops et autres, un des freins, souvent, c’est de trouver les ressources et les compétences dont on a besoin pour développer notre activité. Donc, un de nos axes d’action, c’est effectivement d’essayer d’aller voir les formations, les universités notamment, pour les inciter à effectivement intégrer le plus possible le logiciel libre dans les cursus de formation des étudiants. Je prends mon cas, puisque je fais du logiciel de gestion d’entreprise, il y a une licence pro ERP [Enterprise Ressource Planning], ils sont formés à Cegid, à BusinessObjects, etc., des logiciels propriétaires. Je suis très content, cette année, puisqu’on va former les étudiants à un outil de reporting open source qui s’appelle Metabase. On essaye donc de pousser, de porter la bonne parole, j’interviens pour leur expliquer qu’il y a des ERP open source. J’ai une demi-journée d’intervention, je leur explique les modèles et pourquoi, etc., ils n’entendront plus jamais parler d’ERP open source après, dans leur formation, bon, c’est comme ça, mais ça permet de mettre un pied.
On essaye d’avoir des actions comme cela dans les licences de communication au niveau de l’université de Lyon 2. Sur la partie communication, il y a une filière, la licence CoLibre [3] notamment, formation de chef de projet en communication avec des logiciels libres, une toute petite section qu’on défend ardemment. Nous sommes au CA de l’Université Lyon 2, sur la partie communication, pour essayer qu’ils n’achètent pas que des Mac, mais c’est compliqué.
Donc un volet éducation.
On participe au Campus du Libre [4], ils sont par là, qui aura lieu en fin d’année.
On a des actions auprès des acteurs du secteur public. À l’origine, c’était déjà pour faire respecter le code des marchés publics, pour que, effectivement, on soit en mesure de répondre à des appels d’offres qui ne soient pas fermés. Pendant plusieurs années, on a eu une grosse action sur ce volet-là pour leur dire « votre appel d’offres est fermé, vous voulez du Microsoft, mais il faut ouvrir un peu, donc, vous devez être vous devez rajouter, dans votre appel d’offres, « ou équivalent », sinon vous nous empêchez de répondre à votre appel d’offres, ce qui était illégal. » Aujourd’hui, c’est moins problématique. Le secteur public, maintenant, a quand même commencé un peu à sa transition vers le logiciel libre, même si ce n’est pas gagné, ça reste quand même plus simple de répondre à des appels d’offres dans ce domaine-là.
Donc un travail auprès des acteurs du secteur public, institutionnel, pour défendre notre filière, encore une fois, du logiciel libre.
Et puis dans le business, puisque nous restons des entreprises, il faut donc qu’on vende des prestations, qu’on trouve des clients, etc. On va donc essayer de travailler de façon collective, de monter des actions – je parlerai notamment d’une à la fin, vous serez tous, bien évidemment, conviés – pour, quelque part, chasser en meute, si je peux utiliser ce terme-là. On utilise aussi un autre terme qui est « coopétition », coopération-compétition, et nous avons été amenés, notamment sur des gros projets dans le secteur public, à répondre de manière collective, c’est-à-dire à cinq/six prestataires avec chacun ses compétences, dans un domaine, pour répondre et adresser des gros projets : un projet qui s’appelle Territoire Numériques Ouvert, qui était porté par un syndicat qui s’appelle le SITIV [Syndicat Intercommunal des Technologies de l’Information pour les Villes], qui regroupe plusieurs communes et qui, aujourd’hui, essaye de fédérer la métropole et la ville de Lyon autour d’une plateforme collaborative basée sur des logiciels libres, Nextcloud, Jitsi, LemonLDAP, etc. Donc, en s’y mettant à plusieurs, on est plus fort, forcément.
Ce sont les trois principaux axes d’action de notre association, aujourd’hui, avec ses membres.
Ploss Auvergne-Rhône-Alpes, pour qui ?
Pour qui ? Comme je disais, tous les secteurs d’activité. On va s’adresser aux entreprises, bien sûr, aux associations, aux coopératives, le secteur public – villes, communautés.
Nos membres travaillent avec tout ce panel d’acteurs de la vie économique, aujourd’hui en France, il n’y a pas de « limites », entre guillemets, des gens avec qui on est capable de travailler.
Naissance de l’économie du Libre
Un petit focus sur la façon dont, aujourd’hui, nous gagnons notre vie en tant que prestataires dans le monde du service informatique.
On travaille avec des logiciels libres. N’importe qui peut prendre un logiciel libre, le télécharger, l’utiliser. Soit ! Du coup, on ne va jamais vendre de licences, on ne peut pas vendre de licences ni de droits d’utilisation, en général.
Quand on parle d’économie, ce qui donne de la valeur à quelque chose, c’est souvent sa rareté. L’air que je respire, à priori, n’est pas rare, donc on ne me le fait pas payer, pour l’instant, ça viendra peut-être, mais bon ! Voilà un exemple de chose « non rare » donc, entre guillemets, on a l’impression qu’elle n’a pas de coût.
En fait, le logiciel libre casse cette rareté artificielle qui est créée sur les logiciels, avec le droit de copie. Pour avoir le droit d’utiliser Word, il faut que je l’achète parce que je n’ai pas le droit de le copier, je dois payer un droit d’utilisation.
Le logiciel libre casse cette logique-là et va permettre, du coup, de forcer, quelque part, la mise en valeur d’autres raretés. Cette rareté sera notamment, souvent, la compétence que vont avoir des individus à installer, configurer, paramétrer, étendre les fonctionnalités d’un logiciel libre.
Donc, le modèle du logiciel libre est un modèle dit de services, c’est-à-dire que ce que je vais vendre, la plupart du temps, c’est du service, je vais vendre mes compétences. Quelque part, c’est un modèle qui a la vertu de remettre un peu l’individu au centre de l’échiquier économique.
Les acteurs économiques
Tous ceux qui veulent faire une activité économique autour du logiciel libre vont s’organiser avec des modalités de fonctionnement qui, finalement, sont assez peu différentes de ce qui existe, je dirais de façon traditionnelle, dans le logiciel propriétaire. Parmi ces acteurs-là, on va retrouver des sociétés de services, c’est le gros des troupes, ce sont des sociétés qui proposent des prestations pour la mise en place de logiciels libres, pour le développement autour de logiciels libres, pour le support, pour l’hébergement, etc. Là, on est vraiment dans de l’activité de services traditionnelle, somme toute, il n’y a pas une grosse une innovation là-dessus, proposer du support aussi.
On va avoir aussi dans le logiciel libre, même si ça pourrait paraître contre-intuitif, des éditeurs, c’est-à-dire des sociétés qui vont dire « je vais faire un logiciel et je vais le mettre sous licence libre ». On pourrait dire « tu es fou, tu ne vas jamais en vendre un ! – Oui, mais je vais vendre d’autres choses autour. Je vais vendre quoi ? Je vais vendre ma compétence technique, ma maîtrise de l’outil, ma capacité à le maintenir, à le faire évoluer, à définir une roadmap parce que je connais très bien le domaine fonctionnel de cet outil, je suis une pointure sur ces aspects-là. Et puis, autour de ça, je vais développer un modèle économique où je vais vendre effectivement du support, peut-être vais-je mettre en place un réseau d’intégrateurs et ces intégrateurs, quand ils vont, pareil, installer le logiciel chez leurs clients, vont me reverser une quote-part de ce support, ce qui va me permettre de financer ma R&D, etc. »
Donc le modèle d’éditeur, dans les sociétés qui font du logiciel libre, existe, il y en a beaucoup, avec une petite subtilité sur laquelle il faut être un peu vigilant en tant qu’utilisateur. Je ferai un petit zoom dessus.
Et puis, bien sûr, tous les utilisateurs, d’une manière générale, et les communautés d’utilisateurs, au sens large, sont des acteurs importants. Dans le domaine du secteur public, on a notamment des associations comme l’ADULLACT [5] qui regroupe les utilisateurs que sont les collectivités du secteur public, qui se regroupent pour mutualiser leurs demandes, faire développer des logiciels qui correspondent à des besoins qu’elles ont toutes : toutes les villes ont besoin de gérer un cimetière, besoin de gérer de l’eau, besoin de gérer des places de parking, des crèches, des écoles, des bibliothèques, etc. On a donc aussi, comme ça, des communautés d’utilisateurs qui peuvent avoir un poids très significatif pour faire évoluer, développer du logiciel libre, pour que, quelque part, si on parle du secteur public, on ne dépense l’argent public qu’une fois pour une chose.
Voilà un peu tous les acteurs qu’on va retrouver.
Je paie quoi ?
Finalement, quand je prends un logiciel libre, qu’est-ce que je paye ?
Comme je disais, on va payer des prestations d’installation, de formation, d’adaptation, ça peut être du développement.
Très souvent, et c’est vraiment le métier de base, c’est du support. C’est effectivement bien beau d’avoir un logiciel libre, maintenant si j’ai un bug, que ce logiciel est au cœur de mon activité, que je suis planté, si je ne suis pas développeur, si je ne sais pas comment marche ce logiciel, je vais être bien embêté. Donc, beaucoup de prestataires autour du logiciel libre proposent effectivement des contrats de support — c’est de l’assurance software, de l’assurance anti-bug, on peut lui donner plein de noms —, qui vont consister à dire « Monsieur le client, ne vous inquiétez pas, si vous avez un problème, vous m’appelez ou vous ouvrez une demande de support, etc., et je m’engage à corriger le problème, à le résoudre, à trouver un contournement, etc. » C’est vraiment l’activité historique autour des logiciels libres.
De l’hébergement parce que, effectivement, de plus en plus de logiciels, aujourd’hui, sont des logiciels qu’on va utiliser avec un navigateur, des logiciels qu’on va avoir en ligne, donc, bien entendu, la mise à disposition d’infrastructures résilientes, sauvegardées, sécurisées, etc., c’est un métier, donc beaucoup d’entreprises, aujourd’hui, font appel à des prestataires pour héberger leurs logiciels libres sur des plateformes.
Qu’est-ce qu’on va me demander de payer ? Parfois, on va me demander de payer des contributions : j’ai un logiciel libre, il me va bien, sauf qu’il y a là une petite fonctionnalité, j’aimerais qu’on la fasse un petit peu évoluer pour qu’elle cale mieux à mes besoins. Mon prestataire va me dire « il faut tant de jours pour faire cette évolution, ça coûte tant. »
Un point important : si c’est une modification du logiciel libre en tant que tel que vous utilisez, pensez à exiger du prestataire le reversement de ce code au projet. C’est dans votre intérêt, parce que, sinon, vous allez vous retrouver avec une version spécifique du logiciel libre et vous perdrez la fonctionnalité ou il faudra la refaire à la prochaine montée de version. C’est donc un point important pour vous, utilisateur : demandez toujours, quand il y a des modifications de logiciels libres que vous financez, que ça soit, bien entendu, reversé et intégré dans le projet.
D’une certaine façon, vous allez payer une contribution, vous allez financer l’évolution d’un logiciel. Ce n’est pas toujours simple à faire comprendre aux entreprises : « Vous allez payer pour tous les autres. La fonction que vous allez développer là sera dans le logiciel et tous les autres vont en bénéficier. – Ah bon ! – Eh bien oui, c’est le jeu, mais pensez à toutes les autres fonctionnalités dont vous bénéficiez aujourd’hui et que, quelque part, vous n’avez pas payées. » Ça s’explique bien, en général, on y arrive !
En fait, ce qu’on va payer dans tout cela, c’est effectivement du service. Encore une fois, c’est le modèle de base du logiciel libre et des acteurs de services autour du logiciel libre.
Communautaire/Entreprise
Il y a quand même parfois des droits d’usage. J’aime bien faire ce petit zoom pour que les utilisateurs soient bien informés de ce qu’on trouve, parce que, quand vous avez affaire à des prestataires informatiques, il y a du commercial, il y a du marketing.
Vous allez, parfois, entendre parler de versions : « le logiciel est disponible en version communautaire et en version entreprise. Ne vous inquiétez pas, prenez la version entreprise, c’est du logiciel open source. » Il y a là, je dirais, une vigilance à avoir, il va falloir creuser un petit peu pour savoir ce que vous achetez réellement. Quand on parle de « logiciel communautaire », un logiciel communautaire est quelque part en ligne, vous pouvez le télécharger, l’installer, l’utiliser, on ne va rien vous demander. Par contre, vous le faites, comme on dit, à vos risques et périls. S’il y a un bug, si ça ne marche pas comme vous voulez, soit vous avez les compétences, vous êtes en capacité de faire l’évolution qui va bien sur le logiciel, soit vous allez devoir faire appel à un prestataire, et, en général, ça va être payant. Dans un logiciel communautaire, en général l’intégralité du code source est placée sous une licence libre.
Quand on parle de « version entreprise, premium » — ça a plein de noms, quand on regarde un peu les offres diverses et variées —, cette définition va être un petit peu variable en fonction des gens qu’on a en face.
Pour certains, la version entreprise, c’est juste la version communautaire avec du support. En fait, c’est une façon de donner un nom à une offre commerciale qui inclut le logiciel et du support. En fait, ce que vous payez, ce n’est pas le logiciel, c’est le support, ça revient à prendre un contrat de maintenance. Certains appellent ça une version entreprise, mais on reste sur un code, un socle qui reste 100 % libre.
Dans d’autres cas, on va avoir un socle qui reste, en partie, sous licence libre – j’ai mis xx %, la proportion peut varier – et autour de ce socle-là, on a des extensions qui elles, potentiellement, ne le sont pas. Ce que vous allez payer dans cette version entreprise, c’est, en fait, l’accès à ces extensions qui ne sont pas open source, qui apportent des fonctionnalités qui peuvent vous être potentiellement utiles et puis, effectivement, toujours la dimension support. À support, je pourrais rajouter aussi hébergement, aujourd’hui, ça va souvent dans le package. Donc, là, on est sur un logiciel tout d’un coup un petit peu moins libre. Ça veut dire, en gros, que si vous arrêtez de payer l’abonnement ou le contrat de maintenance, vous perdez, potentiellement, l’accès aux extensions non open source. Ça veut dire, en termes de réversibilité – réversibilité, c’est un gros mot, mais qui est important, c’est : que se passe-t-il si je veux quitter mon prestataire ? Qu’est-ce que je récupère ? Si vous avez des logiciels type Salesforce ou autres, on sait que la réversibilité est proche de zéro. C’est-à-dire que si j’arrête de payer le service, je perds les fonctionnalités, mais quasiment aussi, à quelques exports près, non structurés et peu exploitables, toutes mes données.
Avec le logiciel libre, cette notion de réversibilité existe, puisque normalement, si je suis sur un logiciel 100 % libre, je peux, en quittant mon prestataire, lui demander de me restituer – il faut que cela soit prévu dès le début, dans le contrat que vous passez avec le prestataire – l’intégralité du code source et des données du logiciel, de façon à ce que je puisse prendre ce logiciel et le réinstaller ailleurs et je ne perds ni mes données ni mes fonctionnalités. Cela est possible pour autant que je sois sur une solution 100 % open source. Quand on commence à aller vers des modèles où, effectivement, on a des extensions qui ne le sont pas, ça veut dire que la réversibilité s’affaiblit, c’est-à-dire que, potentiellement, on va perdre des fonctionnalités et peut-être quelques données, si jamais on veut récupérer le logiciel chez soi.
Et puis on a aussi, et là, c’est le danger, des logiciels, quand on passe sur la version entreprise, où c’est la bulle : on passe sur une version propriétaire, je ne citerai pas de noms. Donc là, effectivement, réversibilité zéro des données, des fonctionnalités.
Donc soyez très méfiant. C’est quand même souvent l’apanage d’éditeurs de logiciels libres qui proposent une version communautaire et une version entreprise. Il faut tout de suite regarder ce qui se cache derrière ça, quelle est la proportion de Libre, pas Libre, et ce qui se passe si on veut récupérer le logiciel et ne plus dépendre de ce prestataire.
C’est un petit focus que j’aime bien faire parce que, comme on dit, un utilisateur averti en vaut deux. C’est éventuellement un point d’attention, si vous ne voulez pas vous faire piéger par certains éditeurs qui, aujourd’hui, font clairement de l’open source washing comme ça : « Oui, j’ai une version communautaire, c’est de l’open source, il manque tellement de choses dedans que vous ne pourrez pas l’utiliser. Il faut ma version entreprise, prenez ma version entreprise ! », sauf que vous basculez, tout d’un coup, sur un logiciel propriétaire et c’est dommage !
Voilà un peu les modèles économiques qui zooment sur les pièges.
Conseil National du Logiciel libre
Maintenant, quand on a dit tout ça, que représentent, finalement, ces prestataires informatiques autour du logiciel libre ? Est-ce qu’on a affaire à quelques gars dans des garages qui bricolent en auto-entrepreneurs et qui font deux/trois prestations de temps en temps ?
Notre association patronale est fédérée par une association au niveau national qui s’appelle le Conseil National du Logiciel Libre. Elle fédère, en fait, tous les clusters régionaux, un peu comme sur le modèle du Ploss Rhône-Alpes, il y en a un petit peu partout en France. On va avoir une fédération d’environ 300 à 400 entreprises. Encore une fois essentiellement des pure players, donc des gens dont 100 % de l’activité est effectivement basée sur le logiciel libre. Vous avez un annuaire sur lequel vous pouvez toutes les retrouver. Elle organise, entre autres, avec le pôle Systematic [6] à Paris, tous les ans, un peu la grande messe professionnelle à l’échelle nationale et européenne, bien sûr, de l’open source, l’Open Source Experience [7] qui a lieu en fin d’année, je ne me souviens plus des dates, vous pourrez aller voir sur le site, elles y sont, c’est à Paris.
Étude 2022 : le marché de l’open source en France et en Europe
Donc tous les ans, en général avant ce salon, le CNLL finance une étude de la filière. La dernière étude date de 2022, fin de l’année dernière. Elle est portée, financée par le CNLL, Numeum [8] et Systematic Paris-Région qui ont mandaté MARKESS, une société de consulting, qui a fait une étude sur le marché de l’open source en France et en Europe.
C’est une étude qui va questionner tous les acteurs de la filière de l’open source en France et un peu au-delà de nos frontières, regarder ce qui se passe, pour voir un petit peu où en est cette filière, ce qu’elle représente et où elle va.
Je vais vous présenter un certain nombre de tableaux de chiffres.
Segmentation utilisée dans l’étude
Dans ces chiffres, on va distinguer la partie logiciels et services numériques.
Logiciels, ce sont plutôt les éditeurs ; services numériques, ce sont les prestataires informatiques classiques avec un découpage :
les offres SaaS [Software as a Service] sont les offres pour lesquelles on va s’abonner, en ligne, à un logiciel, qui peut être un logiciel libre, bien entendu ;
les offres on-premise, c’est à installer sur vos serveurs chez vous
et puis conseil, intégration, infogérance.
On retrouve un petit peu toutes les activités que je vous décrivais tout à l’heure.
Une montée en puissance historique
Où en est-on aujourd’hui ?
En 2004, on était à 0,2 milliard, pas grand-chose et on en est rendu, en 2022, à 5,9 milliards d’euros. Ça a été multiplié par 40, facile quand on part de loin !, mais bon, ça fait bien sur les slides. En tout cas, on a quand même une courbe. On voit que, depuis le début des années 2000, que c’est un marché qui a clairement pris sa place.
L’open source en France en 2022
Qu’y a-t-il dedans ?
Pour l’ensemble du marché du service numérique, donc l’open source, aujourd’hui ce sont 6 milliards qui représentent environ 11 % du marché du service du numérique et 16 % si on fait le focus juste sur la part services. C’est pour cela que, tout à l’heure, je distinguais l’aspect éditeurs et l’aspect prestataires de services. Les éditeurs de logiciels libres ne représentent pas grand-chose encore, 2,5 %, par rapport aux éditeurs de logiciels propriétaires, par contre, dans le service, on voit que cette part monte à 16 %, une part quand même beaucoup plus significative. Et, au global, on est effectivement à 11 %, donc 6 milliards sur environ 53 milliards que représente, en France, l’activité de services numériques.
Le marché open source en Europe en 2022
Par rapport à l’Europe comment se situe-t-on ?
Pas trop mal, finalement, en France, puisqu’on est, quelque part, leader : 5,9 milliards, devant le Royaume-Uni, devant l’Allemagne. Il faudrait le ramener à la population, etc., mais, ramené à la population, je pense que la France est quand même encore mieux. L’Europe de l’Ouest, ce sont à peu près 26 milliards. Donc, la France est quand même un acteur important de l’open source, du logiciel libre aujourd’hui, au niveau économique. C’est intéressant d’avoir ça en tête.
Perspective du marché à horizon 2027
Et puis, nous sommes dans une dynamique. Ce graphique montre que les pourcentages de croissance prévus par les acteurs de la filière sont relativement stables depuis plusieurs années qu’on fait cette étude, 6 à 7 % de croissance par an. Les éditeurs pensent avoir une croissance plus significative que les prestataires de services. La part devrait continuer d’augmenter.
Il faut bien voir, quand même, que ça ne veut pas dire que, dans cette part-là, il n’y a pas d’open source. Encore une fois, c’est une étude portée sur les pure players, ceux qui font 100 % de leur activité autour du logiciel libre. En fait, là-dedans, il y a aussi du logiciel libre et de l’open source, il y en a même beaucoup, sauf que c’est quasiment impossible à chiffrer parce que Capgemini, tous les gros font du logiciel libre, ont des divisions open source, par contre, ils ne communiquent pas de chiffres. Donc c’est compliqué de savoir là-dedans, dans ce qui reste, quelle est la part d’open source. Je ne serais pas étonné, je suis peut-être optimiste, que ce soit la moitié, mais ça n’engage que moi.
On est vraiment, ici, sur la partie émergée de l’iceberg. Je pense, qu’en dessous, la place de l’open source est bien plus importante que ça, en fait, je pense que dans le numérique, aujourd’hui, elle est énorme. De toute façon, il suffit de regarder : Internet ne marcherait pas sans l’open source, etc. Je pense que, là-dessus, il n’y a pas trop de discussions.
Les logiciels open source
La répartition de cette activité :
30 % dans les offres SaaS, logiciels pour lesquels on souscrit des abonnements, qu’on utilise, qui sont en ligne ;
on-primise 28 % [2022] et 43 % [prévus en 2027] ;
et puis une évolution, dans les prévisions, une augmentation significative de l’activité des logiciels en ligne, SaaS, avec 46 % [prévus en 2027] ; c’est l’augmentation vers laquelle on va aller, donc ça devrait effectivement devenir majoritaire en termes d’offre de services.
Là, plus un découpage par typologie : conseil, intégration, infogérance. Pareil, c’est plus stable. Ce sont effectivement plus les services de cloud IaaS [Infrastructure as a Service] et PaaS [Platform as a service] qui augmentent, qui passent de 13 à 21 %. C’est cohérent avec l’augmentation de l’aspect offre SaaS en ligne, c’est ce qui supporte ces offres-là, tout simplement.
Les emplois générés open source
En termes d’emploi, ça représentait, en 2022, 63 800 ETP, équivalents temps plein, ce n’est pas rien et on table sur à peu près 90 000 ETP en 2027, donc 7 % de croissance par an.
Si on compare aux chiffres du numérique traditionnel, dans sa globalité, on est plutôt aux alentours de 2 %. Ça veut dire que la filière de l’open source, aujourd’hui, recrute beaucoup plus que la filière du numérique traditionnel.
Les besoins en compétences open source
Qu’est-ce qu’on recrute ? Qu’est-ce qu’on recherche ?
Dans les profils, beaucoup de développeurs, pas de surprise, développeurs devops [9], marketing, des architectes, consultants métiers. Ce sont, aujourd’hui, les principaux types de profils qui sont recherchés par les entreprises du logiciel libre. Si vous faites partie de ces profils-là, vous avez de grandes chances de trouver une offre qui vous colle dans le monde de l’open source.
Et, en termes de compétences, on va sortir tout ce qui touche à l’IoT [Internet of Things] ; API, c’est tout ce qui est interface de programmation, etc. ; les technologies dites de container. C’est le top trois. Après, machine learning, cybersécurité, développement web pas tant que ça, mais quand même, blockchain et autres et je pense qu’on va avoir une bulle IA, intelligence artificielle, l’année prochaine, IA, intelligence artificielle, qui va sûrement ploper sur la prochaine étude 2023, c’est mon avis.
Les moteurs de croissance de l’open source
On a donc on a vu que, aujourd’hui, l’open source, logiciel libre et ses acteurs sont vraiment en croissance plus forte que leurs concurrents du numérique traditionnel, c’est très rassurant et puis, effectivement, on voit que les sujets autour de l’IA, le big data, l’IoT, les infrastructures, sont vraiment les sujets très porteurs sur lesquels il y va y avoir, facilement, un gros développement en termes de croissance pour les trois/cinq années qui viennent.
Résumé
En résumé, si je devais donner un peu les points clés de l’open source aujourd’hui, pour nous ce qui est important, c’est effectivement un aspect relocalisation de l’économie.
Vous avez des prestataires locaux, c’est important d’avoir des gens à côté de chez soi : on peut les voir pour leur parler, on n’est pas obligé de ne faire que des visios. C’est un point qui est important.
Il y a un écosystème très dense sur toute la France, Rhône-Alpes et autre. Donc, vous pouvez trouver, je ne dis pas que c’est facile, des prestataires dans le domaine du logiciel libre assez proches de chez vous. C’est intéressant, ça évite d’aller chercher des gens en Inde ou ailleurs.
Modèle d’innovation ouverte, je ne reviens pas dessus, c’est le modèle du logiciel libre et de l’open source qui veut ça et qui est très fort, en tout cas entre les acteurs du logiciel libre.
Maîtriser son informatique, souveraineté, c’est effectivement avoir les clés de son informatique, savoir ce qu’il y a dedans, comment ça marche.
Ne pas être dépendant forcément d’un prestataire, même si je suis prestataire et je ne devrais pas le dire, mais ça reste important pour les utilisateurs. C’est la réversibilité, cette capacité dont je parlais tout à l’heure, à récupérer un logiciel et les données pour en confier la gestion, éventuellement, à un autre prestataire parce qu’on n’était pas content de celui qu’on avait. Ça force aussi un peu les prestataires du monde de l’open source à être meilleurs, à être les meilleurs possibles parce qu’ils savent que si vous n’êtes pas content d’un service, il y a de fortes chances que vous alliez voir son concurrent et, pour le concurrent, ça sera très simple de récupérer le logiciel et le client. Si on veut jouer le jeu, c’est un modèle qui, quelque part, nous force un peu à l’excellence.
Et puis des économies, je n’en ai pas trop parlé : est-ce que le logiciel libre, l’open source, ça coûte moins cher ? Ce sont des grands débats. Ma position personnelle, c’est de dire que ça ne coûte pas forcément moins cher, j’aurais même tendance à dire que ça coûte le même prix, sauf qu’on y gagne des avantages, pas mal d’externalités positives, la réversibilité, la maîtrise de l’outil, de son informatique. Sur le moyen et le long terme, on voit quand même que ça coûte moins cher. Ça ne coûte pas forcément moins cher à la mise en place, par contre, une fois que c’est en place, que c’est maintenu, que vous avez un contrat de support et autre, on est sur des coûts qui, en général, sont beaucoup plus faibles, quand on les regarde à cinq/dix ans. Ça peut même être très peu cher quand on regarde sur du très long terme, ce qui n’est pas toujours facile à considérer dans le monde économique actuel, mais sur du très long terme ça peut être beaucoup moins cher. Il y a plein de raisons, dont la résilience des acteurs : un logiciel libre, communautaire, soutenu par une grosse communauté d’entreprises, s’il y en a une qui flanche, ce n’est pas grave, vous en avez plein qui vont récupérer la suite. Un logiciel d’éditeur, qui est 100 % open source, si cet éditeur a des difficultés économiques, vous avez des chances que ce logiciel open source soit repris par une autre structure. Il y a donc des avantages en termes de résilience ce qui fait que, quelque part, vous n’allez pas être obligé, au bout de cinq ans, de dire « ce logiciel m’a coûté très cher à mettre en place, l’éditeur met clé sur la porte, ferme l’activité, je perds tout, je dois tout réinstaller, tout transférer », le coût est quand même très significatif. Ça ne veut pas dire que ça n’arrive pas, il y a aussi des projets open source qui sont parfois abandonnés en cours de route, mais, malgré tout, on a encore le code, donc, tant qu’on a le code, on a une chance de s’en sortir, peut-être même de s’en sortir bien. Ça reste quand même dans les avantages forts.
Fatalement, à long terme pour une entreprise, utiliser du logiciel libre, c’est forcément des économies, ça ne veut pas dire que c’est gratuit, bien au contraire, c’est encore une croyance qui est, malheureusement, assez forte.
On m’a déjà dit : « C’est cher pour de l’open source », je donne des exemples de phrases qu’on peut recevoir, parfois, en tant que prestataire, de la part de prospects, « c’est cher pour de l open source ! Oui, mais vous le valez bien ! »
Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre
Je finis par un point important, les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre [10] auront lieu le 24 mai à l’Hôtel de Région, vous pouvez écrire ça dans vos agendas tout de suite. C’est la troisième édition, mais on va dire la deuxième à Lyon. Une première édition avait eu lieu en 2017 en marge des dernières, malheureusement, RMLL, Rencontres Mondiales du Logiciel Libre, à Saint-Étienne. On l’a fait l’année dernière un peu en mode de last minute, on a eu quand même pas mal de monde, de l’avis général, c’était une bonne qualité. On va retrouver un espace exposants, des stands, des prestataires de la région, pas que, et puis des conférences sur des sujets divers et variés. C’est un événement à destination du secteur professionnel, on entend entreprises, les associations sont les bienvenues, le secteur public est bien entendu invité et très présent.
Ça a lieu à l’Hôtel de Région, à Confluence. On aura un espace exposants et des conférences.
Les inscriptions, pour le public, devraient s’ouvrir, je pense, dans la quinzaine qui vient, d’ici à une quinzaine, vous pourrez vous y inscrire, c’est gratuit, il n’y a pas de coût, tout le monde est bienvenu, professionnel ou pas professionnel ; si vous voulez assister à des conférences parce qu’elles vous intéressent, parce qu’il y a des sujets qui vous touchent, vous êtes, bien entendu, tous bienvenus, ce n’est pas du tout fermé.
C’est l’événement qu’on organise une fois par an, c’est le deuxième. On l’a fait l’année dernière à l’Hôtel de Région aussi, signe positif pour nous : la région nous accueille. Il y a encore trois/quatre ans, ce n’était pas si évident que ça. On a réussi à mettre en place cet événement et je dirais que cette année, ça a été encore plus facile que l’année dernière d’obtenir l’accord du vice-président au numérique de la région.
On a installé un évènement qui, je pense, aura lieu tous les ans, qu’on va porter. J’espère qu’il sera chaque année un peu plus beau, un peu plus touffu en termes de participants et de conférences. À noter dans vos tablettes.
Merci.
Si vous avez des questions.
Questions du public et réponses
Public : Est-ce que vous acceptez des adhésions de sociétés dont le siège social est hors de Rhône-Alpes ?
Philippe Scoffoni : Normalement non. Nous sommes Auvergne-Rhône-Alpes. Normalement, sur toute la France, vous avez, je ne sais pas où vous êtes, les équivalents du Ploss Rhône-Alpes : Solibre du côté Toulouse. Sur le site du CNLL, elles y sont toutes. Je vous invite plutôt à vous rapprocher de l’association ou du cluster, il y a différents statuts juridiques, ce sont souvent des associations, qui correspond à votre région, à adhérer, à vous en rapprocher. Nous allons quand même rester sur « notre territoire », entre guillemets.
Public : Est-ce que votre association travaille sur tout ce qui est matériel open hardware ?
Philippe Scoffoni : On avait un membre, malheureusement, il a dû arrêter son activité, qui, effectivement, travaillait sur ces sujets-là. Donc, au niveau de l’association, nous ne sommes pas fermés sur des gens qui ne font que du logiciel, bien entendu, s’il y a des structures qui font du open hardware ou des choses open, d’une manière générale ; parmi nos membres, on a des gens qui font de la formation sur les logiciels libres, c’est quand même très ouvert, on n’est pas obligé de ne faire que du logiciel. Ce sont des activités, autour, de manière générale, du logiciel libre, des sources ouvertes, donc l’open hardware rentre tout à fait. Malheureusement, aujourd’hui, on n’a plus de membres qui fassent ça, mais c’est ouvert, clairement.
Est-ce qu’il y a d’autres questions ?
Public : Est-ce que vous voyez un lien logiciels libres/coopératives. Est-ce que, parmi vos membres, il y a une surreprésentation des sociétés coopératives ?
Philippe Scoffoni : Oui, nous avons des Scops membres de notre association, il n’y a pas de soucis. Est-ce qu’il y a un lien entre les deux ? Je ne sais pas, je ne connais pas assez bien ce « milieu », entre guillemets, mais je pense que oui, quand même, quelque part, il me semble, même si, je pense, que ce n’est pas un critère pour faire une Scop, on doit pouvoir créer une Scop en utilisant du logiciel propriétaire. Je ne sais pas s’il faut mélanger des questions de statut juridique et de façon de voir la manière dont on organise une entreprise, une activité, avec la répartition de pouvoirs, un homme/une voix, etc. Je pense que ce sont des modèles économiques différents qui ont chacun des valeurs différentes. Si on crée une SAS, une société anonyme, c’est parce que, quelque part, on veut être maître de ce qu’on est en train de créer, alors que quand on va se mettre en Scop, on est plus sur une approche collaborative. Je n’ai pas de jugement de valeur là-dessus. Comme il n’y a pas plus de raisons qu’une société SAS utilise du logiciel libre, je ne sais pas s’il y a plus de raisons qu’une Scop utilise du logiciel libre. Le réseau des Scops est en haut, allez les voir pour leur poser la question : est-ce que pour eux, c’est quelque chose qui est effectivement vraiment dans leur ADN ou pas ? Je ne suis pas sûr qu’il y ait un lien, en tout cas, c’est mon avis personnel.
Est-ce qu’il y a d’autres questions ?
Public : Vous dites, à la fin, que ça ne coûte pas forcément moins cher de faire du logiciel libre par rapport à du logiciel propriétaire. Quelles seraient les raisons, à votre avis, d’utiliser du logiciel libre ? Vous avez parlé des prestations de services, ce sont des prestations qu’on est aussi censé avoir dans le logiciel propriétaire.
Philippe Scoffoni : Pourquoi je dis que le logiciel libre ne coûte pas forcément moins cher qu’un logiciel propriétaire ?
On pourrait se dire « je n’ai pas de licence, je ne paye pas de licence comme pour un logiciel propriétaire, donc je n’ai qu’à payer les prestations ». Ce qui va parfois faire la différence va dépendre du logiciel, c’est vrai et pas vrai, parce que ça dépend du logiciel dont on parle.
Admettons que je veuille un logiciel de messagerie collaborative, je vais faire de la pub, je choisis d’utiliser BlueMind [11]. J’aurai besoin que quelqu’un me l’héberge, me l’installe, me forme dessus. Effectivement, si je compare à du Microsoft 365 en ligne ou autre, ce sera plus cher, un petit peu plus cher, parce qu’on n’a pas les échelles, la notion d’échelle, etc. Dans ce sens-là, il peut y avoir des notions d’échelle, d’implémentation, qui font que le logiciel libre peut potentiellement coûter plus cher : je ne sais pas faire une solution type Dropbox avec du Nextcloud pour le prix de Dropbox, il y en a qui y arrivent quand même, donc c’est possible, mais ça demande des montées à l’échelle très significatives.
Ensuite, on a des logiciels libres qui sont parfois un peu génériques, dans le sens où ils ne sont pas forcément très verticalisés, parce que, plus on verticalise un logiciel, plus ça plus sous-entend un suivi de réglementations, etc., ou des évolutions d’un métier, donc une veille, un travail constant. Quand on est sur des logiciels libres qui sont développés de façon communautaire, qui sont portés un peu par les besoins de l’utilisateur, on peut avoir besoin d’une implémentation et on va peut-être avoir moins de richesse fonctionnelle qu’avec un logiciel propriétaire, parce que le logiciel propriétaire, comme il a de la licence, quelque part la licence finance de la R&D, c’est un flux financier que n’a pas un éditeur de logiciel libre, ou beaucoup moins, et, sur un communautaire, pas du tout. Ça veut dire que, pour pas mal de logiciels libres, si je veux vraiment les mettre en place, les adapter à mes besoins, je vais pouvoir le faire, sauf que le prestataire va me dire « OK, mais pour cette fonctionnalité-là, il faut qu’on fasse un petit développement, qu’on ajoute un truc, un module complémentaire, un machin, un bidule ». Quelque part, ces choses qu’on va devoir rajouter pour mettre le logiciel à niveau, versus un logiciel propriétaire qui aurait déjà ces fonctionnalités by design dans l’outil, vont générer un coût qui va peut-être me ramener au niveau du coût du logiciel propriétaire, sur l’implémentation. Par contre, derrière, je vais potentiellement faire des économies parce que les coûts de licence récurrents, d’abonnement et autres, vont être bien moindres, donc, quelque part, je vais me refaire par la suite.
C’est en ce sens que je dis que ça ne coûte pas forcément moins cher, ça dépend vraiment. Le bémol, c’est quand même la nature du logiciel : est-ce que je le prends en mode plug and play ou est-ce que je suis sur des typologies de logiciels qui demandent une adaptation et des fonctionnalités potentiellement plus importantes que ce que peuvent fournir des logiciels propriétaires. Quand on a des revenus en termes de licence, qu’on peut payer 30/40/50 développeurs juste à faire de la R&D sur le logiciel, je ne dis pas que ça n’existe pas dans le monde du logiciel libre, mais c’est beaucoup plus rare. Si je prends le cas des ERP, un gros ERP comme Odoo [12] a des centaines de développeurs derrière, sauf qu’on a une version entreprise qui est propriétaire aujourd’hui ; il faut bien payer. Ils se sont effectivement remis au niveau de leurs concurrents, alors qu’avant, je prenais un Odoo, il fallait peut-être un peu le pimper, le customer, le compléter, ça avait un coût, ce qui me remettait peut-être au coût d’un PGI ou d’un Sage, logiciels équivalents.
Ce n’est pas non plus une vérité absolue, mais je préfère toujours dire que ça n’est pas gratuit.
Est-ce qu’il y a encore une question. On peut en prendre éventuellement encore.
Public : Est-ce que votre association agit, peut agir en tant que prestataire ?
Philippe Scoffoni : Non, ce n’est pas du tout son objet. Son objet, c’est de regrouper les prestataires et après, éventuellement, de vous router vers le prestataire au travers notre site ou avec des échanges de mails pour vous orienter vers les bonnes personnes, mais on ne fera pas de prestations, ce n’est pas l’objet.
S’il n’y a pas d’autre question, on va lever le camp.
Merci à vous et rendez-vous le 24 mai, je veux tous vous revoir le 24 mai. Et il y a un stand Ploss dans le gymnase, en haut, si vous voulez venir nous nous voir. Merci.
[Applaudissements]