Émission Libre à vous ! diffusée mardi 25 juin 2024 sur radio Cause Commune Sujet pricipal : Interviews d’entreprises du Libre reéalisées lors des RPLL


Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Julie Chaumard : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
Les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre de Lyon, ce sera le sujet principal du jour. Également au programme, « Cyberstructure et le piège de la peau de phoque dans le boyau », une chronique de Laurent et Lorette Costy.

Soyez les bienvenu·es pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Je suis Julie Chaumard, bénévole à l’émission de radio Libre à vous !.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous y trouverez une page consacrée à l’émission du jour avec les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter.
N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 25 juin, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.

À la réalisation de l’émission aujourd’hui, Frédéric Couchet. Bonjour Fred.

Frédéric Couchet : Salut Julie. Belle émission à vous.

Julie Chaumard : Nous vous souhaitons une excellente écoute.

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Chronique « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy, sur le thème de « Cyberstructure et le piège de la peau de phoque dans le boyau »

Julie Chaumard : « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy. Comprendre Internet et ses techniques pour mieux l’utiliser, avec des logiciels libres et services respectueux des utilisatrices et des utilisateurs pour son propre bien être en particulier et celui de la société en général. Laurent Costy est administrateur de l’April et fait cette chronique avec sa fille Lorette.
Au programme aujourd’hui : « Cyberstructure et le piège de la peau de phoque dans le boyau ».

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Lorette Costy : Nous voici donc, mardi 25 juin 2024, pour la dernière chronique de la saison. On vous en promet des bien belles, vous allez rire aux larmes et apprendre des tas de trucs super sympas à placer dans les conversations familiales pour paraître plus intelligent ou intelligente que vous n’êtes.

Laurent Costy : En parlant d’intelligence, je peine encore à clarifier certains point autour de l’empreinte et de la signature des fichiers. Je me suis dit qu’au lieu d’essayer d’expliquer à d’autres des choses que je n’ai pas comprises, il est sans doute plus simple d’aller directement interroger la source.

Lorette Costy : Mais que voilà une bonne idée ! Je vais enfin comprendre des trucs ! Laisse-moi deviner qui tu vas inviter ! J’ai ma petite idée : peut-être Émilie la pote libriste de Swuiden’ Scremeuldich, n’avait-elle pas un ami qui s’y connaissait plutôt bien en cyberstructure et qui considère l’Internet comme un espace politique ?

Laurent Costy : C’est lui. Stéphane Bortzmeyer, dont le livre Cyberstructure. L’internet, un espace politique est juste à 22 euros aux Éditions C&F. Je le recommande et tu vas voir, il explique bien. Allô, Stéphane ? Tu es en attente sur la ligne invitée depuis 8 heures ce matin, je sais que tout va bien pour toi. Peux-tu expliciter ces notions d’empreinte de fichier et de signature ?

Stéphane Bortzmeyer, voix off : Alors, attention, la cryptographie, c’est compliqué, et la sécurité informatique, c’est compliqué. Là, on va mêler les deux.
L’empreinte est aussi appelée condensat ou hash, parce qu’en anglais, c’est plus chic ! Elle est le résultat d’un calcul fait sur le fichier qui le réduit, le condense en une série de chiffres plus courte que le fichier. Le point important, ici, c’est que le calcul de l’empreinte ne nécessite pas de connaître un secret quelconque. Tout le monde peut la calculer.

Lorette Costy : Les hash kick et le con dansa ! Il y moyen de faire des jeux de mots avec ça, mais restons concentré·es. Et la signature alors ?

Stéphane Bortzmeyer, voix off : On y vient. L’empreinte n’apporte guère de sécurité. Si un site Web affiche « Téléchargez notre super logiciel libre qui va tout faire et le café » et « pour vérifier qu’il est authentique, calculez son empreinte, vous devez trouver 6b4e70ab etc. », cela ne sécurise rien. Un méchant, qui aurait piraté le site Web, peut tout aussi bien modifier le logiciel, calculer l’empreinte et la publier.
Au contraire, les signatures, elles, nécessitent de connaître une information, qu’on nomme la clé secrète. Techniquement, les opérations de signature incluent, entre autres, le calcul d’une empreinte. Mais, surtout, la signature va dépendre non seulement du fichier signé, mais aussi de la clé secrète. Le méchant cité plus haut serait donc bien embêté : ne disposant pas de la clé secrète, il ne pourrait pas générer une signature convaincante.
Donc, les signatures, c’est plus compliqué à faire que les empreintes, mais c’est plus mieux.

Lorette Costy : Super ! Merci pour ces claires explications ! C’est limpide. Je vais intercéder auprès de mon père pour qu’il te fasse revenir plus souvent pour expliquer plein de trucs. En attendant, la bise à Émilie et à son pote Swuiden’ Scremeuldich et à Phophone.

Stéphane Bortzmeyer, voix off : Je réécoute la chronique 18 d’« À cœur vaillant la voie et libre » pour bien comprendre ce que tu me racontes, et je n’y manquerai pas ! Je vous laisse, car je dois aller m’expliquer auprès d’experts en cryptographie et en sécurité qui se roulent par terre de désespoir, car j’ai dû condenser des notions compliquées en une émission certes très sympa, mais trop courte ! Plein de 0 et de 1 positifs dans vos boyaux !

Laurent Costy : C’est bon ? Elle est contente d’avoir enfin des vraies explications qu’elle comprend ? Je n’ai pas écouté, mais je trouve qu’il n’explique pas si bien que ça finalement. D’ailleurs, comment vas-tu pour appliquer ça dans l’association dans laquelle tu es en alternance ?

Lorette Costy : Mais il est jaloux le Papinou, c’est trop mignon, il est tout chafouin maintenant ! Mais oui, ça t’arrive aussi, parfois, de bien expliquer des trucs ! Tiens, par exemple, pas plus tard qu’il n’y a pas longtemps, quand tu m’as expliqué pourquoi le néolibéralisme emmenait l’humanité à sa perte, j’ai tout compris !

Laurent Costy : Voilà une bonne nouvelle ! Sinon, ça se passe comment dans l’association ? Ça avance, cette transition numérique, vers un système d’information plus respectueux des utilisateurs et utilisatrices ?

Lorette Costy : Comme tu l’avais suggéré, on a demandé l’ouverture d’un Framaspace auprès de Framasoft, car notre objet et notre taille correspondaient aux critères que l’on trouve sur la page du projet. Je cite : « Espaces réservés exclusivement aux associations et collectifs militants ». Cool, déjà, c’est tout nous ! Ensuite, je cite à nouveau : « Les espaces Framaspace sont limités à 50 comptes et un espace de 40 Go maximum ». Encore une fois, c’est parfaitement nous. C’est cohérent avec notre besoin.

Laurent Costy : Ils sont vraiment forts chez Framasoft. Tu sais que je connais des gens bien là-bas ?

Lorette Costy : Waouh ! Du coup, tu es super important ! Bravo !

Laurent Costy : Je sais. Merci. Sinon, les membres s’approprient ce merveilleux outil ? Comment fais-tu pour les convaincre de se passer des outils auxquels ils sont habitués et qui leur paraissent plus simples à cause des habitudes acquises ?

Lorette Costy : D’abord, c’est primordial, la gouvernance. Mon directeur, pour ne pas le citer, était convaincu et demandeur, sans ça, je ne pense pas qu’on aurait avancé. Ensuite, j’ai fait intervenir un tiers qui connaît des gens bien chez Framasoft. Exprimer des choses, avec un pas de côté, permet un partage synchrone, donc un ancrage profond de la démarche pour une réussite à long terme.

Laurent Costy : Alors là, je dis carrément ! Je vais même appuyer le propos. Figure-toi qu’en début d’année, j’ai suivi une formation en cybersécurité proposée par France Travail. En passant, merci France Travail. Trois cent quatre-vingt-dix neuf heures de cybersécurité – pas dans la même journée ! –, eh bien, pour tout te dire, un truc que j’avais déduit, comme toi, de mes interventions et de mes vécus, est confirmé par les méthodes et les normes qui régissent la cybersécurité : l’implication de la gouvernance dans le processus est un incontournable !

Lorette Costy : C’est à la fois évident et à la fois trop souvent négligé ! Du coup, à l’association, on condense plutôt pas mal dans le nuage désormais : on utilise Framaspace et nos données ne sont plus sur des clouds dont le seul but est de récupérer un maximum de ces dites données pour mieux enfermer !

Laurent Costy : Ça me fait une excellente transition pour te narrer une situation que j’ai accompagnée et pour illustrer cette avidité des plateformes de cloud. D’un autre côté, comme j’écris le texte, c’est hyper facile de faire croire que la transition tombe bien alors que, finalement, elle était habilement pensée et préparée.

Lorette Costy : Et tarte à la choucroute et au munster, tu avais anticipé, que j’allais dire tarte à la choucroute et au munster ? Toc l’abricot.

Laurent Costy : Ne change pas de sujet, s’il te plaît. Ce que je vais dire est grave. J’accompagne une association qui a pris une excellente décision : changer ses outils pour du mieux. Jusqu’à ce jour, elle utilisait Dropbox sans se rendre compte à quel point ce truc les manipulait. Je n’avais jamais touché à ce machin et j’avais raison. Devoir mettre les mains dedans pour aider la structure à démêler leurs besoins réels de la réalité que Dropbox avait réussi à construire, n’a pas été chose facile. J’ai vraiment morflé.

Lorette Costy : Vas-y, raconte-moi comment Jean-Cloud, membre de l’association, se faisait empapaouter par ce service qui, avant de penser le bien être de la structure, privilégie d’abord la stratégie d’enfermement et son chiffre d’affaires.

Laurent Costy : Pour le chiffre d’affaires, on comprend vite : le premier texte qui apparaît en haut à gauche de l’écran, avant même le mot accueil c’est : « Mettez à jour votre carte bancaire ».

Lorette Costy : Ça peut paraître symbolique, mais c’est absolument révélateur : d’abord, le pognon, ensuite, le reste. Je n’ai rien contre l’argent, c’est nécessaire dans notre société, mais ça doit rester un moyen et non une fin. Je crois qu’on l’a déjà dit dans cette émission, mais on le répétera tant qu’il restera, sur cette planète, une personne qui n’aura pas compris.

Laurent Costy : Bien dit ! On est déjà au moins deux à être d’accord. Je continue, car j’ai potentiellement de la matière pour une journée tellement j’étais énervé. L’interface est ni faite ni à faire ! Je pourrais demander l’avis de Maiwann, qui milite à Framasoft et qui travaille pour rendre les interfaces facilement utilisables et cohérentes, mais j’ai trop peur d’être responsable d’une crise cardiaque que ce foutoir à boutons de Dropbox pourrait déclencher !

Lorette Costy : Tu m’as dit que des boutons marketing étaient mélangés à des fonctionnalités de gestion de tes fichiers. Genre, tu cherches à compresser un truc pour le télécharger et bim !, on te suggère vivement de signer pour l’offre supérieure ! Mais non d’une pipe en bois, dans cette boîte personne n’a une conscience et un respect des utilisateurs et utilisatrices ?

Laurent Costy : Attends, ce n’est pas fini, s’il n’y avait que ça ! J’ai voulu télécharger des dossiers et là, re-bim ! : « vous avez essayé de compresser un nombre trop grand de fichiers » ! Pas d’indications claires de limite, donc, il faut tâtonner pour trouver soi-même cette limite. C’est du génie. J’ai failli bouillir !

Lorette Costy : Si on était suspicieux, on pourrait penser qu’ils font tout pour empêcher de partir de leur écosystème.

Laurent Costy : Mais non, que vas-tu penser là, voyons ! Après, je te passe les fenêtres qui peuvent s’ouvrir intempestivement pour te suggérer d’envoyer tes photos dans le cloud. Eh bien oui, plus tu enverras de données et plus ce sera compliqué d’en sortir. Surtout si tu ne peux compresser que trois fichiers à la fois. On va me dire que je fais du mauvais esprit !

Lorette Costy : Tant qu’à faire, on pourrait tenter l’analogie avec un boyau dont les parois sont tapissées de peau de phoque. C’est extrêmement difficile de faire marche arrière !

Laurent Costy : C’est ça. Dropbox, c’est un intestin grêle tapissé de peau de phoque. Ce serait presque drôle si la réalité ne démontrait pas l’efficacité d’un tel système pervers : l’association avait opté pour le service ouvrant deux téraoctets de capacités et avait un besoin réel évalué au plus large à [roulement de tambour, NdT] 200 gigaoctets ! Il y a un facteur 10 entre le besoin et le service utilisé ! Et l’association va même, sans doute, descendre ce besoin à 50 gigaoctets en pensant les usages de ses données. Par exemple, pour les vidéos, pourquoi pas un serveur PeerTube mutualisé avec son réseau ?

Lorette Costy : Bref, faites comme cette association, engagez une réflexion sur votre transition numérique et vous verrez, à moyen terme, tous les bienfaits de cette démarche. Il y a désormais des ressources multiples pour vous aider et vous accompagner : Emancip’Asso, les Chatons, Framasoft, les structures du Libre que l’on peut retrouver sur l’Agenda du Libre, et j’en passe et des meilleurs !

Laurent Costy : Et investissez dans la formation plutôt que dans des licences de logiciels privateurs de libertés. Les membres de l’association vont monter en compétences et ça, ce n’est que du bon pour la structure ! Sur ce, je vais aller farter du boyau, et installer des pitons pour faciliter la remonter des structures de l’ESS. Par exemple, Nextcloud est un super piton pour sortir des clouds avaleurs de données tel le Grand Sarlacc avaleur de Jedi. À tantôt, heureuse Framarpenteuse de Framaspace !

Lorette Costy : Nextcloud, si je ne me trompe pas, c’est codé en PHP et en JavaScript, pas en Python. Mais bon, je chipote. La bise mon farteur de boyau préféré !

[Virgule sonore]

Julie Chaumard : Nous somme de retour en direct dans Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques. Nous venons d’entendre « À cœur vaillant, la voie est libre » de Laurent et Lorette Costy.
Nous allons à présent faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Julie Chaumard : Après la pause musicale, place au sujet principal, les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre.
Nous allons écouter Django par Mr Smith. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Django par Mr Smith.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Julie Chaumard : Nous venons d’écouter Django par Mr Smith. Ce titre est disponible sous licence Libre Creative Commons Attribution, CC By 3.0.

[Jingle]

Julie Chaumard : Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Interviews d’entreprises du logiciel libre réalisées dans le cadre des Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre

Julie Chaumard : Nous allons poursuivre par notre sujet principal, une visite aux Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre. J’y étais il y a deux semaines, le 10 juin, j’ai interviewé plusieurs participants et participantes que vous allez pouvoir écouter comme si vous y étiez. Cela se passait à Lyon, au sein des locaux de la Métropole Grand Lyon. J’ai pris le train tôt le matin, depuis Paris, et j’ai retrouvé ma coéquipière Françoise Conil, élue en 2024 au conseil d’administration de l’April. Nous avons été accueillies par un petit-déjeuner et, ensuite, nous avons pu déambuler entre les stands des entreprises et des associations qui nous ont montré plein de choses très intéressantes sur comment installer et utiliser des logiciels libres et, surtout, ce qu’on peut faire avec quand on est une entreprise, une association, une collectivité ou un organisme. Nous avons également assisté à des mini-conférences qui montraient des cas d’usage et des retours d’expérience. Ces rencontres sont organisées par Ploss-RA [Professionnels du Libre et de l’open source Software en Rhône-Alpes Auvergne], qui est une communauté des entrepreneurs du logiciel libre et, cette année, c’était la quatrième édition. Il y avait 21 exposants et une vingtaine de mini-conférences.
Sans plus attendre, rendons-nous sur place et écoutons.

[Virgule sonore]

Interview de Philippe Scoffoni, président de Ploss-RA

Julie Chaumard : Je suis Julie, de l’émission Libre à vous !. Je suis venue aux Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre. Je suis avec Philippe Scoffoni qui est membre de l’organisme qui a préparé cet événement.

Philippe Scoffoni : Je suis effectivement le président de l’association Ploss-Rhône-Alpes, depuis trois ans maintenant.

Julie Chaumard : Pour les auditeurs de Libre à vous !, pouvez-vous nous dire pourquoi il est important d’organiser les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre ?

Philippe Scoffoni : Les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre, je dirais que c’est un peu l’action phare de l’année pour notre association, c’est ce qui nous demande le plus gros investissement en temps humain et en moyens. Pour nous, c’est un moment important puisqu’il manquait effectivement, sur la région, un événement dédié aux professionnels. On avait déjà les Journées du Logiciel Libre, qui est plutôt sur le volet citoyen, le Campus du Libre, plutôt orienté étudiants, enseignement supérieur. Il manquait, effectivement, un événement professionnel sur lequel nous puissions venir, nous, acteurs de la filière, puisque Ploss-Rhône-Alpes a pour membres des entreprises dont le métier est de mettre en place et de proposer des logiciels libres à leurs clients. Ça nous paraissait quelque part naturel de se dire « il faut faire cet événement-là en région ». Des événements de ce type-là ont lieu à Paris, il y en à Bordeaux, dans le Sud de la France aussi, mais on n’avait pas d’événement comme ça, un peu visible et, surtout, récurrent, puisque là nous en sommes à la quatrième édition et, chaque année, on essaie de faire rentrer un peu plus cet événement dans les habitudes de toutes les entreprises, des collectivités locales, qui peuvent effectivement avoir besoin d’un interlocuteur professionnel dans le cadre de leurs usages du logiciel libre.

Julie Chaumard : OK. Je trouve que c’est une très bonne démarche de faire un événement dédié aux professionnels. D’ailleurs, j’ai rencontré, tout à l’heure dans le salon, un monsieur qui est venu expressément du Cameroun pour faire la démarche d’implémenter des logiciels libres dans son entreprise qui est un média. Je crois que vous l’avez vu.

Philippe Scoffoni : On l’a vu.

Julie Chaumard : Merci pour cette présentation. Vous m’avez dit quatrième édition. Du coup, cette année, après ces quatre années, quelles sont les nouveautés, les modifications que vous avez apportées ?

Philippe Scoffoni : Chaque année, on peaufine un peu plus l’événement. L’an passé, on avait mis en place un flux de conférences, on avait plusieurs conférences en même temps, du coup les gens s’éparpillaient, ils hésitaient, ils allaient à l’une et pas à l’autre et, parfois, ils étaient déçus de ne pas avoir vu certaines conférences puisqu’elles avaient lieu en même temps. Donc là, cette année, on a pris le parti de faire des conférences très courtes, on a même réduit à 15 minutes le temps de ces présentations. L’idée, c’est effectivement 15 minutes de présentation, pas de questions/réponses. Les personnes qui sont intéressées, qui veulent plus de détails, peuvent aller, après, sur la partie exposant, rencontrer le conférencier, échanger avec lui et, là, prendre le temps de poser toutes leurs questions et avoir les réponses qui vont avec.
On a donc densifié encore un peu plus cette année le nombre de conférences, on verra, l’an prochain, si on garde ce format-là.

Julie Chaumard : Pour parler un peu plus du Libre, de votre point de vue ou de celui de Ploss-RA, comment percevez-vous le contexte économique et politique autour du logiciel libre ?

Philippe Scoffoni : Sur le plan économique, nous sommes une filière. On n’a pas encore pu faire de « grande enquête », entre guillemets, mais on aimerait bien en faire une sur la région, prochainement. On sait qu’au niveau national, c’est une filière qui se développe fortement, plus vite, on va dire, que la filière traditionnelle du numérique, la société de services. Beaucoup de structures sont en croissance continue, régulière et, quand on regarde chez nos membres, on voit bien que ces structures-là se portent bien, se développent bien. Ce ne sont pas forcément des structures qui vont générer des millions et des millions de résultat, parce qu’on est sur un modèle économique où, effectivement, on vend avant tout de la prestation, on ne vend pas de la propriété intellectuelle ou de la rente, donc, ça ne permet pas de dégager autant de marge que ce que peuvent faire nos confrères des logiciels propriétaires. Toujours est-il qu’on arrive, effectivement, à travers nos modèles, à avoir une rentabilité et à être viables en tant qu’entreprises, à pouvoir recruter, payer nos salariés, etc. Donc, de ce point de vue-là, j’ai envie de dire que la filière se porte bien.
Sur les aspects politiques, « l’évolution » que j’ai vue, entre guillemets, ces dix dernières années, c’est plus par rapport au secteur public et à son appétence pour le logiciel libre. Il y a dix ans, le discours qu’on pouvait recevoir, c’était : « Nous, vous savez, on est ni pour ni contre ! – OK. Vous restez sous Microsoft ? – Oui – OK ». Alors qu’aujourd’hui, les discours qu’on peut avoir et qu’on a pu entendre, notamment ce matin à l’ouverture de la plénière, que ce soit de la ville de Lyon ou de la Métropole, sont des discours où le logiciel libre devient quelque part, à des niveaux plus ou moins importants, une exigence, pour des questions de souveraineté, de maîtrise de l’informatique afin de ne plus être, entre guillemets, un peu « prisonnier » de changements commerciaux ou de décisions arbitraires de certains éditeurs. Selon moi, il y a, aujourd’hui, une vraie évolution favorable au logiciel libre, même si tout n’est pas gagné, même s’il reste encore des combats à mener sur l’ergonomie des logiciels, sur leur facilité d’utilisation, on le disait ce matin aussi, sur l’accompagnement au changement. On change effectivement les habitudes des gens, ce n’est plus Outlook, c’est un autre logiciel. C’est donc un travail, ça reste un travail important à mener.

Julie Chaumard : Merci beaucoup, Monsieur Scoffoni, pour ce message que j’ai perçu positif et motivant pour les acteurs du logiciel libre et les personnes qui veulent entrer dans le logiciel libre.

Philippe Scoffoni : Nous sommes très motivés !

Julie Chaumard : Je vais interviewer le maximum d’intervenants dans ce salon. Merci beaucoup de l’avoir organisé.

Philippe Scoffoni : C’est moi qui remercie.

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Interview de Jean-Michel Armand, de l’entreprise Hybird

Julie Chaumard : Je suis maintenant avec Jean-Michel Armand, de l’entreprise Hybird. Cette entreprise est créatrice du logiciel Crème, j’adore ce nom !

Jean-Michel Armand : Merci.

Julie Chaumard : Crème est un CRM libre ; un CRM [Customer Relationship Management] est un logiciel de gestion de la relation client.

Jean-Michel Armand : Exactement.

Julie Chaumard : Jean-Michel, vous êtes, à titre personnel, adhérent à April depuis 21 ans.

Jean-Michel Armand : Ça commence à faire !

Julie Chaumard : Oui. Et, au titre de Hybird, depuis quand même au moins 15 ans, donc merci beaucoup. Pourquoi est-ce important pour vous d’adhérer à April ?

Jean-Michel Armand : Je suis libriste depuis très longtemps, depuis mes années lycée, on va dire. À l’époque, quand je suis arrivé en études supérieures, on va dire que les années 2000 n’étaient pas aussi propices au logiciel libre que maintenant et ça me semblait important de faire des choses de mon côté, donc, d’avoir une démarche militante active, mais aussi, autant que possible, de soutenir les associations qui militaient. Du coup, clairement, logiciel libre en France, April, donc 2003, première adhésion à l’April.

Julie Chaumard : Pourrions-nous parler du modèle économique du Libre, du modèle économique des entreprises, comme la vôtre, qui vivent du logiciel libre : ce modèle est-il en train de changer ? Comment voyez-vous le futur ? Par ailleurs, tout à l’heure, j’ai interviewé monsieur Scoffoni de l’organisme Ploss-RA qui a eu un discours assez positif, même motivant, je dirais, en parlant de développement et de croissance du contexte économique du logiciel libre. Comment voyez-vous le futur de cette économie ?

Jean-Michel Armand : C’est vrai que je serais assez d’accord avec Philippe. On va dire que même si on a encore, un peu, des freins, il y a quelques années, il y avait souvent, on va dire, un peu une frayeur des entreprises à utiliser des logiciels libres, etc., ça s’est pas mal réduit. Il y a toujours, de temps en temps, des petites frictions, « vous faites du logiciel libre », mais on a enfin passé l’étape. On a de plus en plus de gens, de plus en plus de projets qui sont en demande, spécifiquement, en logiciel libre. D’ailleurs, dans les appels d’offres publics, un critère obligatoire c’est, souvent, « avec des logiciels libres ». On a une vraie appétence, qui s’est créée chez nos clients et chez nos futurs clients, pour avoir des projets en logiciel libre. Ils ont pu voir que ça marche, ils ont pu voir que les projets fonctionnent, ils ont pu voir que des partenaires utilisent des logiciels libres et que ça fonctionne bien. Non seulement, ils ont eu de mauvaises expériences avec du logiciel propriétaire, du coup, ils n’ont pas forcément envie de reproduire ça. Dans notre branche, on a souvent des entreprises qui en rachètent d’autres, donc des gammes de logiciels qui s’éteignent et ils n’ont pas la main, ils ont donc envie de se dire « on veut avoir plus de sécurité » ; l’accès au code source est quand même important. Du coup, je pense qu’il y a, on ne va pas dire une explosion, mais une vraie demande, il y a vraiment des gens qui se disent « on veut du Libre » et ça devient un vrai critère.
Et puis, un peu plus à la marge, on va dire qu’il y a de plus en plus de vrais critères de démarches RSE [Responsabilité Sociale des Entreprises] des entreprises, etc. J’ai envie de dire que, grâce à leur appétence pour le logiciel libre, des choses comme ça, les entreprises qui font du logiciel libre sont souvent plus réceptives et plus en avance sur tous ces points de démarche RSE. C’est indirect, mais ça aide aussi. J’ai l’impression qu’on est un peu dans la même mouvance là-dessus.

Julie Chaumard : Pouvez-vous juste nous préciser ce qu’est RSE ?

Jean-Michel Armand : C’est la démarche sociale et le « R », je ne sais plus, mais c’est social et écologique, je crois. Ça va être très large, ce sont toutes les choses qu’on va mettre en place sur l’égalité des salaires homme-femme, sur la parité et puis le fait d’avoir une infrastructure verte, de faire des démarches pour réduire ses émissions de carbone ou autre.

Julie Chaumard : Je pense que, d’ici à quelques années, il y aura, pour les entreprises, des objectifs RSE obligatoires à atteindre, du coup le logiciel libre et l’économie du Libre pourront aider à atteindre ces critères.

Jean-Michel Armand : J’ai l’impression que, sur ce sujet-là, on est parfois un peu en avance.

Julie Chaumard : De ce que j’entends ici, au salon, j’ai l’impression qu’il y a un petit switch : vous parlez de frayeur du logiciel, mais les mentalités commencent à changer, une société se crée autour.

Jean-Michel Armand : Heureusement ! Ça fait quand même plus de 20 ans. Ça a pris du temps, mais oui. Il n’y a qu’à voir sur le salon qui se monte, un peu plus grand tous les ans, les gens qui viennent. Il y a des événements logiciel libre.

Julie Chaumard : Les politiques qui s’en emparent.

Jean-Michel Armand : Oui, je pense qu’on est sur un cercle vertueux, pour continuer à utiliser les expressions qui vont bien.

Julie Chaumard : Merci beaucoup Jean-Michel Armand. On va continuer à interviewer les entreprises dans les Rencontres Professionnelles.

Jean-Michel Armand : Merci à vous.

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Interview de Marie-Jo Kopp Castinel dirigeante d’OpenGo

Julie Chaumard : Je suis maintenant avec Marie-Jo Kopp Castinel, de l’entreprise OpenGo, spécialisée dans la bureautique libre, dont Marie-Jo va nous parler. Vous êtes membre de l’April.
Je suis également avec Damien Renou, de l’entreprise Bâtisseurs numériques, qui va interagir avec Marie-Jo Kopp Castinel parce qu’ils ont des sujets en commun.
Marie-Jo, dans un premier temps, pourquoi avoir adhéré à April ?

Marie-Jo Kopp Castinel : Parce que je défends le logiciel libre depuis à peu près 2003, quand je me suis engagée dans le projet Open Office. L’April est arrivée à peu près à ce moment-là, on se voyait sur tous les salons, avec Fred [Frédéric Couchet, du coup, c’était évident d’adhérer à l’April qui, pour moi, est essentielle pour défendre le Libre.

Julie Chaumard : Dans vos activités, quelle est la part des collectivités, des entreprises qui utilisent des solutions bureautiques libres ? Quels sont les avantages à utiliser ces solutions ?

Marie-Jo Kopp Castinel : OpenGo est, en effet, spécialiste du poste de travail libre, notamment de l’accompagnement en migration vers des suites bureautiques libres, notamment LibreOffice, beaucoup dans les collectivités, dans quelques entreprises également, mais principalement dans le monde collectivités.
Les avantages sont multiples, on ne va pas résumer en cinq minutes les avantages du Libre. Il y a toujours la notion de souveraineté, il peut y avoir une question de développement durable, tout un tas de choses comme ça.
Les difficultés, c’est qu’on touche aux postes de travail, donc, il faut un accompagnement des utilisateurs puisque c’est sensible : on touche au poste de travail, donc, on change les habitudes de quelqu’un.
OpenGo a également une plateforme e-learning, complète, sur LibreOffice notamment, mais pas que. Sur la plateforme Chamilo et je laisse la parole à Damien qui est monsieur Chamilo.

Damien Renou : Merci Marie-Jo. Je suis Damien Renou, société Bâtisseurs numériques. Je suis membre de l’association Chamilo qui est une association européenne ; Marie-Jo aussi est membre de l’association.
Chamilo est une plateforme pour favoriser et diffuser l’apprentissage en ligne, la retransmission des compétences depuis 2010, donc depuis 14 ans. Nous avons, aujourd’hui, 37 millions d’utilisateurs et, en France, la plateforme commence à s’installer doucement dans les régions et dans les écoles, ce qui nous fait un grand plaisir, puisque c’est le challenger, un petit peu, de la plateforme Moodle qui est bien connue, qui est une fondation australienne. Le fait qu’une solution européenne revienne en avant nous fait extrêmement plaisir.

Julie Chaumard : Du coup, à quoi sert Chamilo aux Bâtisseurs numériques et à OpenGo ? Qu’est-ce que vous en faites ? Comment fait-elle partie de votre activité ?

Damien Renou : La plateforme Chamilo permet de diffuser de la documentation pédagogique et des modules de formation auprès d’un public d’élèves, de stagiaires ou de professionnels en entreprise. Ça permet de faire le lien avec la formation en présentiel à travers des modules d’autoformation, pour compléter un petit peu la formation qui existe déjà sur le terrain.

Julie Chaumard : OK. Merci. Et quelle est votre activité principale à Bâtisseurs numériques ?

Damien Renou : Mon activité principale, c’est d’installer des plateformes Chamilo, de rajouter des fonctionnalités à Chamilo pour que les professeurs, les formateurs et nous-mêmes puissions fabriquer très facilement des modules proches des utilisateurs, donc du terrain, principalement.

Julie Chaumard : Merci Damien Renou.
Madame Marie-Jo Kopp Castinel, Marie-Jo, Libre à vous ! est sensible à la place des femmes dans le monde du logiciel libre. Comment ressentez-vous la place de la femme dans le logiciel libre ?

Marie-Jo Kopp Castinel : La place de la femme est essentielle dans la société en général, plus que jamais aujourd’hui. En effet, dans le logiciel libre, nous sommes très peu de femmes. Il y en a beaucoup à l’April, même de plus en plus, avec une présidente femme, mais, malheureusement, et on se pose la question : pourquoi le logiciel libre particulièrement ? Déjà, dans l’informatique, il y a moins de femmes, mais pourquoi n’arrive-t-on pas à avoir plus de femmes qui s’impliquent dans le logiciel libre ?, c’est une vraie question qu’on se pose. Je suis souvent la seule femme dans toutes ces réunions, notamment à Ploss-RA et à d’autres endroits aussi. Il y a des associations comme l’April ou l’ALDIL [Association Lyonnaise pour le Développement de l’Informatique Libre] à Lyon où il y a quand même de plus en plus de femmes, mais pourquoi n’arrive-t-on pas à avoir plus de femmes qui s’investissent, en termes de bénévoles, dans ces trucs-là ? On est sensible aussi.

Julie Chaumard : Merci bien d’avoir consacré cinq minutes juste avant vos conférences, la journée sur les chapeaux de roue. Merci Marie-Jo et Damien.

Marie-Jo Kopp Castinel : Merci Julie.

[Virgule musicale]

Interview de Salomé Yahia-Cherif, coopératrice des Tilleuls

Julie Chaumard : Je suis maintenant avec Salomé Yahia-Cherif, de la coopérative Les Tilleuls. Salomé, pourquoi une organisation en mode de coopérative ? D’ailleurs qu’est-ce qu’une coopérative ?

Salomé Yahia-Cherif : La société coopérative a un mode de fonctionnement un peu particulier, parce que chaque salarié est actionnaire de la boîte, donc, l’entreprise appartient à tout le monde. Ce qui nous distingue, c’est qu’on va prendre les décisions tous ensemble. On fait des assemblées générales régulièrement et tout le monde peut participer aux décisions de l’entreprise, donc, une personne égale une voix. Ça permet d’avoir une hiérarchie qui est assez plate. On a choisi ce modèle surtout parce que ça nous permet d’impliquer vraiment les coopérateurs dans la vie de l’entreprise. nous sommes aussi très impliqués au niveau social et on a beaucoup d’avantages en interne. Par exemple, on a développé le congé menstruel, mis en place des congés exceptionnels et plus de flexibilité. Nous sommes aussi acteurs de l’ESS, l’Économie sociale et solidaire, nous avons donc, aussi, un projet social qui est assez fort.

Julie Chaumard : OK. C’est bien. Vous accordez une place très importante à la femme.
Que faites-vous concrètement ? Les Tilleuls, de quoi s’agit-il ? Quels sont vos membres ? Quelles sont les activités ?

Salomé Yahia-Cherif : On accueille tout type de clients, tout type d’entreprises, peu importe la taille ou la forme, dans le développement d’applications web et mobiles. On peut soit faire du développement pur, soit des audits, du conseil. On est aussi un organisme de formation, on est certifié Qualiopi ; on est aussi sur tout ce qui est partie SRE [Site Reliability Engineering], développement, infrastructures, etc., donc on les accompagne à développer leur projet, que ce soit de A à Z ou en intégrant les équipes.

Julie Chaumard : D’accord. Si je comprends bien, vous avez des associés qui sont membres de la coopérative et, ensemble, vous avez des projets d’accompagnement, de création de projets web.

Salomé Yahia-Cherif : Actuellement, nous sommes 70 et tous nos devs sont répartis en mission. Ça peut être des missions de longue durée ou des projets très courts ; chacun participe à différents projets.

Julie Chaumard : D’accord. Et la place du Libre dans vos activités ?

Salomé Yahia-Cherif : Il a une place assez importante. Déjà, la structure Les Tilleuls en elle-même est membre de la core team Symfony, on participe donc beaucoup au développement du langage, on le maintient et on contribue. On fait partie de la PHP Foundation et, en interne, on a développé deux logiciels libres, API Platform et FrankenPHP, qu’on utilise également auprès de nos clients. On participe : non seulement on contribue à des logiciels libres de base, mais on en crée nous-mêmes et on les utilise dans les projets clients.

Julie Chaumard : Vous m’avez dit que vous incitez les développeurs à contribuer à l’open source.

Salomé Yahia-Cherif : Exactement. Beaucoup de nos coopérateurs sont très actifs dans le monde de l’open source, que ce soit PHP, Symfony, mais aussi sur du JavaScript, pour aider à améliorer les logiciels libres et permettre à chacun d’avoir accès à des améliorations qui peuvent bénéficier à tous.

Julie Chaumard : Merci beaucoup Salomé, c’est une belle aventure, une grande coopérative.

Salomé Yahia-Cherif : Merci à vous.

[Virgule musicale]

Interview de Claudine Chassagne, adjointe au Maire, commune de Saint-Martin-d’Uriage, en charge, entre autres, du numérique

Julie Chaumard : Je suis maintenant avec Claudine Chassagne, de la ville de Saint-Martin-d’Uriage, une ville qui se trouve dans le département de l’Isère.
Madame Chassagne vient de faire une conférence aux Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre, la conférence vient de se terminer. Je suis venue voir Claudine directement pour lui poser quelques rapides questions. Merci d’avoir accepté.
Dans votre collectivité, de quelle manière êtes-vous impliquée dans le logiciel libre et quels usages faites-vous du logiciel libre actuellement ?

Claudine Chassagne : Je suis élue depuis 2014, en charge, entre autres, du numérique. En 2014, lorsque je suis arrivée, j’ai tenu à mettre en place une politique de migration vers le logiciel libre, avec priorité aux logiciels libres, formats ouverts, etc., et adhésion à l’association ADULLACT [Association des Développeurs et Utilisateurs de Logiciels Libres pour les Administrations et les Collectivités Territoriales] qui accompagne les collectivités.
J’ai eu un DSI [Directeur des Systèmes d’Information] qui a décliné cette politique en projets, on a donc mené un certain nombre de projets jusqu’à la migration vers la bureautique libre, en fin de mandat, en 2020.
En 2020, j’ai été réélue, je suis toujours en charge du numérique, avec d’autres casquettes. Là, je suis partie sur une politique plutôt du numérique responsable et inclusif, justement, puisqu’on a besoin d’accompagner les personnes en difficulté avec l’informatique et le logiciel libre continue à nous aider beaucoup là-dessus, par exemple pour la sobriété numérique en allongeant la durée de vie des terminaux et en mettant en place des logiciels simples pour accompagner les utilisateurs. Voilà.

Julie Chaumard : Merci. Depuis 2014, depuis dix ans, c’est admirable !

Claudine Chassagne : Merci. Ce n’est pas toujours facile, parce que les équipes changent, les agents changent, il faut donc tout le temps former, accompagner, expliquer et bien montrer les enjeux, les enjeux politiques, les enjeux techniques.

Julie Chaumard : Les équipes changent, mais vous avez peut-être évangélisé ceux qui partent !

Claudine Chassagne : J’espère que ça perdurera.

Julie Chaumard : Je ne vous ai pas demandé qui vous êtes dans la ville en tant qu’élue. Quel est votre poste, votre rôle ?

Claudine Chassagne : Je suis adjointe en charge de l’agriculture, l’économie locale, le tourisme et le numérique. Je suis une ancienne DSI, j’ai été DSI à l’université, dans une grande collectivité.

Julie Chaumard : OK : Vous savez de quoi vous parlez !

Claudine Chassagne : Oui. On va peut-être venir sur le sujet des femmes. J’ai fait des études d’ingénieur informatique, ce qui remonte à 1975/76. J’ai toujours travaillé en informatique, je suis un peu un dinosaure de l’informatique, comme je disais à mes étudiants. Ça fait presque 45 ans et je trouve que les femmes sont toujours aussi peu représentées dans le milieu informatique en général. Je pensais que j’allais en trouver un peu plus dans le logiciel libre, parce qu’il y a vraiment des enjeux éthiques, mais non, ça reste quand même un milieu un peu de geeks, de développeurs, qui parlent beaucoup développement entre eux, donc, à chaque fois, il faut les remettre un peu sur le bon chemin. Ce qui m’a frappée en arrivant ici ce matin : on compte les femmes sur les doigts de la main !

Julie Chaumard : Il y a encore des efforts à faire !

Claudine Chassagne : Oui, mais, je pense, dans les deux sens : à la fois convaincre les filles que c’est intéressant, que ce n’est pas forcément que de la technique, que du développement et qu’on peut faire des choses très intéressantes avec, justement, les logiciels libres et avec l’informatique. Après, peut-être que les hommes cèdent un peu la place aussi. Donc, en termes de gouvernance, c’est vraiment un équilibre à trouver.

Julie Chaumard : En tout cas, votre parcours est très inspirant. Merci bien pour cette interview.

Claudine Chassagne : Merci.

[Virgule musicale]

Interview de Clément Oudot, Identity Solutions Manager chez Worteks

Julie Chaumard : Je suis maintenant avec Clément Oudot, de l’entreprise Worteks, spécialisée dans l’infrastructure. Bonjour Clément.

Clément Oudot : Bonjour. Merci de m’accueillir. Effectivement Worteks, société d’expertise en open source, principalement infrastructures, tout se fait côté serveur, virtualisation, messagerie, bases de données, identité.

Julie Chaumard : Clément, pourquoi est-il important que Worteks adhère à April ?

Clément Oudot : Nous sommes adhérent depuis le début de Worteks. Tous les responsables de Worteks étaient à l’April et je suis également membre de l’April à titre personnel. Pour nous, c’est très important que l’April continue à faire le travail de surveillance politique et aide à infuser le logiciel libre dans la société, que ce soit pour les particuliers, les associations et les entreprises.

Julie Chaumard : Quel est le rôle de Worteks dans l’écosystème du Libre ?

Clément Oudot : Nous sommes une société de services : on va proposer des services, du support, de la formation ou même de l’hébergement à nos clients. On a vraiment à cœur d’être au sein de l’écosystème du logiciel libre, puisque nous sommes, nous-mêmes, contributeurs d’un certain nombre de composants. Les gens qui sont chez nous ne vont pas seulement répondre aux besoins de nos clients, mais vont aussi essayer de faire que, par ces besoins-là, les financements que nos clients apportent à Worteks viennent bénéficier directement aux logiciels. Nous sommes notamment les principaux contributeurs de LemonLDAP, LSC, LDAP Tool Box, un certain nombre de composants complètement open source.

Julie Chaumard : Merci Clément. Parlons du Cyber Resilience Act. Vous m’avez décrit ce que c’est, l’impact. Pouvez-vous en parler aux auditeurs ?

Clément Oudot : C’est effectivement quelque chose qui est arrivé il y a quelques mois sur nos écrans. Il y a eu beaucoup de discussions et via le CNLL [Union des entreprises du logiciel libre et du numérique ouvert], nous sommes aussi membre du CNLL, nous avons essayé d’influer un peu la politique européenne pour que le CRA, le Cyber Resilience Act, n’ait pas trop d’impact sur l’écosystème de l’open source. La difficulté de cette mesure, du CRA, est qu’il peut effectivement y avoir un impact pour les petites sociétés, comme nous, qui allons proposer du logiciel libre à nos clients, d’avoir trop de lourdeur administrative et trop d’engagements à tenir pour continuer à faire notre métier, sachant que le logiciel libre est, de nature, sans garantie. C’est là où nous sommes très vigilants, tout n’est pas encore réglé et écrit. Nous sommes en train de mettre en place ce qu’il va falloir faire pour continuer à être dans la légalité et pour continuer à pouvoir travailler dans le logiciel libre en respectant ces normes.

Julie Chaumard : Merci pour ces éclairages.
Clément Oudot, par ailleurs, je sais que vous êtes chanteur dans le groupe KPTN.

Clément Oudot : KPTN, tout à fait, c’est mon nom de scène.

Julie Chaumard : Nous diffusons, dans Libre à vous !, vos musiques.

Clément Oudot : Plusieurs musiques, tout à fait, et je vous en remercie.

Julie Chaumard : Pour continuer et parler de la musique et du Libre, pourquoi avez-vous choisi de diffuser vos musiques sous une licence libre de droits ?

Clément Oudot : C’est un engagement personnel. Depuis 20 ans je travaille dans le logiciel libre et pas uniquement pour des aspects techniques, vraiment aussi pour des aspects humanistes et de partage. Comme loisir, je fais de la musique, naturellement je me suis dit qu’il était bien aussi de partager avec le plus grand nombre : toutes les musiques sont sous licence Art Libre et Creative Commons. J’ai le plaisir de faire, de temps en temps, des concerts dans un certain nombre de manifestations du Libre, j’étais aux JdLL [Journées du Logiciel Libre] il y a quelques jours pour faire un concert et j’espère pouvoir intervenir dans d’autres conférences très bientôt.

Julie Chaumard : Merci beaucoup Clément et bon salon à vous, bonnes Rencontres à vous. Nous allons écouter votre musique.

Clément Oudot : Merci.

[Virgule sonore]

Julie Chaumard : Nous allons donc faire une pause musicale. Nous allons écouter Le musée d’air contemporain par KPTN, que vous avez entendu dans les interviews. On se retrouve dans trois minutes. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Le musée d’air contemporain par KPTN.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Julie Chaumard : Nous venons d’écouter Le musée d’air contemporain par KPTN. Ce titre est disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, CC By SA 3.0.

[Jingle]

Julie Chaumard : Nous sommes toujours au RPLL, petit nom pour les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre, juste après la pause déjeuner.
Claudine Chassagne, élue à la ville de Saint-Martin-d’Uriage, en Isère, qui a participé à la table ronde « Logiciels libres et collectivités locales », nous a offert et dédicacé la nouvelle édition de son livre Migrer son système d’information vers les logiciels libres – Un défi politique et technique pour les collectivités locales.
Écoutons maintenant les interviews de l’après-midi.

[Virgule sonore]

Interview de Franck Brunet, gérant chez DBM Technologies

Julie Chaumard : Je suis toujours aux Rencontres Professionnelles du logiciel libre. Nous avons passé une pause déjeuner très sympathique, nous avons beaucoup discuté avec les uns les autres, très intéressant. Maintenant, je suis avec Franck Brunet, de l’entreprise DBM Technologies qui est spécialisée dans l’infogérance.
Bonjour Frank. Vous êtes adhérent à April depuis plus de 15 ans. Pourquoi est-ce important pour vous d’adhérer à l’April ?

Franck Brunet : Sur la durée, ça fait très longtemps, puisque je n’ai plus le souvenir et j’ai fait partie, en tant qu’exposant, des premières Linux Expo, à l’époque au CNIT [Centre des nouvelles industries et technologies] ; c’est à ce moment-là que j’avais adhéré à l’April. Pourquoi l’April ? Parce que, dans notre vie de tous les jours de production, nous sommes très contents d’avoir obtenu, avec l’April et d’autres, certaines libertés et certaines ouvertures du logiciel. En fait, c’est une liberté qui se défend tout le temps. De la même façon que les gens du propriétaire dépensent des millions à faire du lobbying pour fermer les codes, fermer les accès et mettre ce qu’on appelle des tickets d’entrée, par exemple sur la comptabilité avec des millions d’euros, pour empêcher des acteurs novateurs de se lancer dedans et fermer des marchés, il est hyper important qu’on ait des gens qui défendent ces libertés à la fois pour, je dirais, la société civile d’une part, et aussi, indirectement, pour les professionnels que nous sommes. C’est ma façon : je ne peux pas, moi-même, m’investir plus de temps, je n’ai 24 heures par jour, donc je ne peux pas militer, faire du lobbying, aller voir les politiques et leur expliquer l’intérêt, pour l’humanité et les Français, de toute manière, d’avoir le plus possible du Libre autour de nous, que ce soit en informatique, en médicaments ou autre, expliquer pourquoi il n’y a pas de cohérence à essayer de faire voter des brevets logiciels qui sont une hérésie absolue.
Je prends toujours l’exemple du tire-bouchon : breveter un logiciel revient à breveter l’idée du tire-bouchon et ce n’est pas entendable pour l’humanité. Tout le monde a le droit de déboucher une bouteille et vous pouvez imaginer tout un tas de processus différents, inventer des tire-bouchons révolutionnaires et, à la limite, vous avez le droit de breveter ces tire-bouchons pendant un temps, parce que ça vous a coûté beaucoup d’énergie en ingénierie, donc la société vous protège le temps de rentabiliser investissement. Par contre, l’idée même de déboucher une bouteille appartient à l’humanité.
L’informatique, c’est exactement pareil. L’informatique ce sont juste des codes, des boucles, for i = 1 to n ; while, des choses comme ça, et on peut considérer ces petites briques élémentaires comme un langage, comme le français. Donc, breveter du logiciel revient à breveter l’idée du tire-bouchon ou la langue française. Il faut combattre ça de façon absolue. On peut faire des compromis sur plein de choses et vous verrez, plus tard, quand vous allez me poser d’autres questions, que je suis obligé, dans la vie, de faire des compromis, comme tout le monde, rien n’est tout blanc ni tout noir. Mais il y a des principes mêmes comme la liberté, l’égalité des hommes et des femmes, etc., qui sont des choses qui ne sont pas acquises, il faut les défendre.
Comme je n’ai pas le temps de le faire, je contribue à travers mon adhésion à l’April, en donnant un peu d’argent, ce qui lui permet d’aller défendre tout ça pour nous.

Julie Chaumard : Merci beaucoup, Franck, pour votre vision extraordinaire de la contribution apportée par l’April. Ça nous fait chaud au cœur. Comment voyez-vous l’évolution du logiciel libre dans les cinq à dix prochaines années ?

Franck Brunet : C’est très compliqué, on peut difficilement prédire l’avenir. Ce qui est certain, c’est qu’il faut se souvenir du passé pour aller vers l’avenir et, dans le passé, c’est malheureux à dire, mais ce n’est pas souvent et pas tout le temps les meilleures technologies qui survivent. On l’a vu avec le magnétoscope, les fameux formats Betacam, etc., eh bien là, c’est pareil : on a les meilleurs codes parce qu’ils sont ouverts, qui sont travaillés, qui sont sécurisés par des millions de personnes, de façon indépendante, pour éviter des backdoors, des intrusions de gouvernements extérieurs, mais, à côté de ça, on a aussi des gens qui gagnent énormément d’argent à fermer le code. Ces gens-là peuvent faire du lobbying pour, justement, essayer de discréditer le logiciel libre, donc, c’est extrêmement compliqué.
J’aimerais et je vais contribuer plus, dès que je le pourrai, sur du code, quand j’aurai un peu plus de temps, pour l’instant ce n’est pas le cas. J’admire tous les gens qui ont réussi, ça peut même être des gros, Google, par exemple, est un très gros contributeur au noyau Linux, je ne le cache pas. J’aimerais, je rêverais d’avoir effectivement dégagé assez de bénéfices, dans notre entreprise, pour pouvoir encore plus contribuer à du code. Aujourd’hui, en effet, notre contribution est beaucoup plus sur de la pédagogie, sur la transformation de gens, l’accompagnement et la défense, dès que je le peux, des idées libres et de l’explication : pourquoi, intrinsèquement, c’est mieux un code d’ouvert qu’un code fermé, etc.
Pour revenir à la question de l’avenir du logiciel libre, c’est comme la démocratie, on doit le défendre. C’est un combat de tous les jours, à la fois politique et économique parce qu’il faut que nos entreprises, malgré tout, pour pouvoir payer des salaires à la fin du mois, fassent effectivement rentrer et honorer des commandes. Les entreprises qui sont dans le monde propriétaire ont tellement d’argent qu’elles ont des capitaux pour faire du lobbying, de la publicité. Par exemple, moi qui ai des expériences antérieures, en administration système, en Windows et en Linux, et qui continue un peu à voir les deux mondes, il y a pratiquement un rapport de un à dix d’efficacité entre un admin-sys Linux et un admin-sys Windows, mais Microsoft va essayer de faire une sorte de mayonnaise en faisant croire aux gens que le TCO, le Total Costs of Ownership, d’une solution Microsoft est meilleur marché, ce qui est totalement faux.
Néanmoins, comme je l’ai dit, même si, technologiquement parlant, en tout cas pour moi, c’est une évidence que c’est une solution d’avenir pour la planète et aussi pour les Français, elle doit se défendre tous les jours, donc je ne peux pas prédire, aujourd’hui, qu’on va réussir. J’y travaille, comme tous les gens qui sont ici ; ça fait du chemin, mais il y a encore beaucoup de route.

Julie Chaumard : Je vous remercie beaucoup, Monsieur Franck Brunet. Je rappelle le nom de votre entreprise : DBM Technologies. J’ai trouvé votre vision vraiment inspirante, intéressante, une belle vision stratégique. Je vous remercie beaucoup.

Franck Brunet : Merci beaucoup. Bonne journée.

[Virgule musicale]

Interview de Tom Grandgeorge, responsable développement commercial chez XiVO

Julie Chaumard : Je suis allée maintenant à la rencontre de Tom Grandgeorge, de XiVO. Bonjour Tom.

Tom Grandgeorge : Bonjour.

Julie Chaumard : Pouvez-vous nous expliquer ce qu’est XiVO ?

Tom Grandgeorge : Oui. Déjà, je vous remercie de m’interviewer.
XiVO est un logiciel de centre d’appels, de téléphonie ToIP, et l’entreprise qui l’édite est Avencall. Nous sommes la première solution de ToIP open source française, souveraine. Notre particularité, c’est qu’on développe notre solution et on l’intègre directement chez nos clients.

Julie Chaumard : Je crois que ToIP, c’est faire de la téléphonie sur des réseaux informatiques et pas de la téléphonie avec des commutateurs télécoms type France Télécom comme autrefois, c’est vraiment de la téléphonie sur IP, sur les tuyaux modernes, sur Internet.

Tom Grandgeorge : Exactement. Maintenant, nous avons développé XiVO pour avoir aussi une solution de softphonie, le téléphone sur ordinateur au lieu du téléphone physique. On appelle ça un téléphone plastique, relié au casque, et on peut répondre directement sur l’ordinateur.

Julie Chaumard : D’accord. Donc, c’est l’entreprise Avencall qui a créé ce logiciel, ce softphone. C’est un softphone libre ?

Tom Grandgeorge : Open source, évidemment, sinon nous ne serions pas là !

Julie Chaumard : OK. Quels types de clients ? Des petits, des grands ? Quels sont les types de clients, les domaines qui utilisent vos solutions en logiciel libre de téléphonie sur Internet, sur l’informatique, sur IP ?

Tom Grandgeorge : Globalement, nous allons chercher tous les clients, que ce soit des PME, des ETI, des grands comptes, etc., mais on se spécialise. XiVO Avencall, c’est-à-dire moi, nous allons chercher des postes allant au minimum à 150 utilisateurs, c’est-à-dire qu’on se spécialise vers des ETI et des grands comptes. Pourquoi ? Parce que c’est là où nous sommes le plus pertinent, c’est là où nous sommes plus fort. Comme on fait du développement spécifique, c’est trop compliqué d’aller chercher des petits comptes, on préfère donc aller chercher des grands comptes, mais, évidemment, on ne laisse pas de côté les petits comptes, les PME, etc. On a des partenaires, avec qui on travaille depuis longtemps, qui vont intégrer XiVO vers des PME. On s’occupe donc des grands comptes et, surtout, on est très pertinent sur le secteur du public, donc les universités, les mairies, les communautés, les conseils départementaux, etc. ; le public, c’est vraiment, à peu près, 80 % de nos clients.

Julie Chaumard : D’accord. Du coup ça fait longtemps que le public se tourne vers des solutions de téléphonie libre de type XiVO ?

Tom Grandgeorge : On ne le voit pas, mais je suis un peu jeune. Je pense qu’au début, les collectivités, comme tout le monde, sont allées voir des solutions en SaaS [Software as a service], qui étaient fermées, comme Microsoft, etc., parce que ça fonctionne. Mais maintenant on se rend compte, pour des questions de coût et de souveraineté surtout, que c’est plus compliqué de faire confiance à des entreprises comme Microsoft, pour ne pas la citer, et, maintenant, il y a un petit retour en arrière où les collectivités et même un petit peu, tout doucement, mais ça commence, le secteur privé, commencent à se tourner vers des solutions open source pour équiper leurs collaborateurs de téléphonie, mais pas que, parce que dans le salon il y a plein de solutions et c’est hyper intéressant.

Julie Chaumard : Oui. Justement dans le salon, je me rends compte que c’est grandissant dans le secteur public, les collectivités locales, parce qu’elles se rendent compte de toutes ces problématiques de souveraineté des données, de coût, en fait tout ce qu’apportent le logiciel et le monde du Libre.

Tom Grandgeorge : Exactement et notre force, chez XiVO, comme on est open source, on a les API-first, on s’intègre directement à des architectures beaucoup plus complexes, on fait du On-Premise et les collectivités aiment beaucoup. C’est-à-dire que leur solution est dans leur infra, dédiée, dans les mairies ou dans les universités, et ça plaît beaucoup, au lieu que leurs données partent dans le Michigan avec des solutions SaaS, ça reste et, surtout, elles peuvent mettre la main dedans.

Julie Chaumard : Ce que vous voulez dire par On-Premise, c’est que les serveurs sont chez eux, ce n’est pas dans le cloud et on ne sait pas où sont les données. Vous installez le serveur chez le client, c’est ce que ça veut dire quand vous dites on On-Premise.

Tom Grandgeorge : Exactement, c’est ça et nos clients sont vraiment des personnes qui aiment mettre les mains dedans.

Julie Chaumard : OK. Merci beaucoup Tom Grandgeorge, de la société XiVO, pour cette petite interview.

Tom Grandgeorge : Merci à vous. J’espère que ça vous a plu.

Julie Chaumard : Oui.

[Virgule musicale]

Interview de Émeline Baume, vice-présidente de la Métropole de Lyon

Julie Chaumard : Il est 16 heures, je suis toujours aux Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre, j’ai appris beaucoup de choses très intéressantes. Maintenant, c’est l’heure où j’ai eu l’immense chance d’interviewer, pour l’émission Libre à vous !, Émeline Baume, vice-présidente de la Métropole de Lyon qui accueille cet événement des Rencontres.
Bonjour Madame Baume et merci beaucoup.

Émeline Baume : Bonjour.

Julie Chaumard : Première question : pouvez-vous nous dire pourquoi vous avez choisi d’adhérer à l’April ?, parce que la Métropole Grand Lyon adhère à l’April.

Émeline Baume : Pourquoi ? Parce que ça faisait sens. Quand nous sommes arrivés en situation de responsabilité, en juillet 2020, nous avions, dans notre sac à dos, ce parti pris autour des logiciels libres, pour mieux et plus travailler les enjeux de souveraineté, mais aussi mieux et plus travailler la mise en commun d’outils, en particulier parce qu’on est une métropole, donc on est la « strate », entre guillemets, ce n’est pas un très joli mot, au-dessus des communes. Et, contrairement à ce que les lois et la réglementation, entre autres la loi Maptam [Loi de modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles] et la loi NOTRe [Loi portant sur la Nouvelle Organisation Territoriale de la République] définissent, on souhaite vraiment que la métropole agisse à l’échelle territoriale, avec les communes, pour répondre aux besoins des habitantes et habitants, avec, entre autres, l’outil numérique. Il se trouve qu’on a une capacité d’agir avec des investissements, mais aussi avec de l’ingénierie de projets, avec des hommes et des femmes qui travaillent dans nos services, en particulier aux services numériques, et qui sont en capacité d’accompagner les communes pour qu’elles puissent déployer des solutions qui auraient été coconstruites. Et quoi de mieux que de le faire avec les acteurs du Libre ? Ça faisait donc complètement sens d’adhérer à l’April et, après, il y a un sujet de porter du plaidoyer aussi, il me semble.

Julie Chaumard : Oui, c’est bien ce que l’April souhaite. Pourquoi est-il important que la métropole soutienne ces Rencontres Professionnelles aujourd’hui ?

Émeline Baume : C’est justement pour travailler un autre angle. La première question, c’était plutôt en quoi la solution du Libre permet à des acteurs publics d’être plus efficaces ensemble, tout simplement. Là, le sujet, c’est prendre conscience de la valeur économique des acteurs du Libre, donc, les hommes et les femmes qui ont créé, qui portent des organisations et des entreprises et qui agissent au sein de ces entreprises et leur permettre de partager des retours d’expérience, de se rencontrer, éventuellement, d’envisager d’agir économiquement ensemble, donc des rencontres business, pourquoi pas de répondre à des appels d’offre publics ou privés, des acheteurs qui sont tenus par le Code de la commande publique, etc. C’est important d’avoir les deux piliers, voire d’autres piliers, puisqu’il y a le sujet de l’accompagnement des usages, dont on parlera sans doute, mais vraiment de dire que la métropole c’est un donneur d’ordre, la métropole a un parti pris pour travailler le Libre, mais elle ne fera qu’avec des entreprises qui sont partie prenante, en fait, de ces enjeux-là, d’où les rencontres entre professionnels.
Après, il y a une raison très concrète. On est juste à côté d’un hub de transport et je pense que c’est un gage de réussite que de mettre à disposition ce lieu public, à côté de la gare, tout simplement. On est sûr que beaucoup d’entreprises seront là et c’est ce que je souhaitais.

Julie Chaumard : Oui, effectivement.
Une question, justement, sur les usages. En 2021, vous aviez voté une délibération pour la transformation de l’environnement numérique de travail des agents. Je cite la description de ce travail : « Cette délibération propose d’engager la collectivité dans une transformation de l’environnement numérique de travail des agents et de développer, dans la durée, la part de logiciels libres, afin de mieux répondre aux attentes extrêmement fortes sur ces outils du quotidien, de maîtriser la dépense publique sur la durée et de préserver la souveraineté numérique de la collectivité ». J’entends beaucoup ces mots « concertation et souveraineté numérique » et « dépenses publiques », ce sont vraiment les deux choses que j’ai entendues en conférence tout à l’heure.

Émeline Baume : Oui. Comme beaucoup de collectivités, on est forcément captif d’une solution, la solution Microsoft, et avoir en tête, pour celles et ceux qui nous écoutent, que la Métropole de Lyon, c’est une organisation de, entre 9600 et 10 000 agents. Cela veut dire que ce sont énormément de besoins extrêmement différents. Ce n’est pas du tout la même chose d’être sur le terrain, de devoir se géolocaliser, de rendre efficace la tournée de collecte des ordures ménagères, que porter un SI achats pour avoir les bonnes données, pour évaluer sa politique publique d’achats responsables ou de porter un SI ressources humaines et d’éditer à temps les faits de paye, mais aussi d’être en capacité d’accompagner, avec finesse et justesse, les agents du service public dans leurs parcours de formation, pour donner trois exemples extrêmement différents.
Quand nous sommes arrivés en situation de responsabilité, l’équipe numérique nous a montré, au président, à moi et à la DGS [Direction générale des services], l’augmentation exponentielle des besoins aussi bien en matériels qu’en solutions logicielles et pro logicielles légitimes des agents du service public, pour garantir l’efficacité de nos politiques publiques. Cette dépense-là ne fait que croître, s’y ajoute le sujet d’être dépendants d’une solution.
Donc, avec plein de bon sens, assez logiquement, nous avons dit « on souhaite en sortir ». On doit garantir un certain niveau de service public. Ce niveau de service public est garanti par le fait que des hommes et des femmes travaillent au quotidien, entre autres avec un outil numérique. Or, nous avions en tête qu’une partie de ces hommes et de ces femmes-là, après avoir fait, pas des focus groupes, mais des petites études avec des agents volontaires, que certains agents avaient un certain frein à utiliser des solutions libres, en fait par habitude d’autres solutions, tout simplement. Ce qu’on a découvert, qu’on savait déjà, mais c’était important de mener l’exercice, c’est que si on veut faire bouger l’environnement numérique de travail des agents, alors il faut le faire progressivement, c’est ce qu’on a mis dans la délibération, en les accompagnant, en commençant autant que possible par des volontaires et sur des objets pas trop compliqués. On a donc fait le choix d’y aller sur les outils collaboratifs et la messagerie et on le fait vraiment pas à pas.
On a aussi fait le choix de le faire ensemble, de travailler ce sujet en commun, par principe justement, avec deux autres organisations, avec la ville de Lyon et avec le SITIV [Syndicat Intercommunal des Technologies de l’Information pour les Villes], un syndicat qui porte des actions autour de l’informatique, en autres, et qui regroupe une diversité de communes sur le territoire de la métropole, mais aussi dans la Loire.
Je pense important que les personnes qui nous écoutent aient cette information : dans notre parti pris politique de soutenir le développement de solutions en Libre dans notre environnement numérique de travail, on a mis en méthode le fait d’agir à plusieurs, donc de créer, en commun, des solutions ou d’aller chercher, en commun, des solutions, plutôt que d’acheter ou de trouver chacun dans son coin, ville de Lyon/Métropole de Lyon/SITIV, des solutions, les tester et se rendre contre de ci, de ça.
Pour être très transparente, on a fait le choix d’allonger encore le calendrier pour ce passage au Libre pas à pas.
Ce n’est pas forcément évident politiquement à vivre, mais j’ai bien compris qu’il y a un enjeu d’accompagnement aux usages des agents et agentes du service public et c’est pour elles et eux qu’on le fait puisque ce sont elles et eux qui garantissent l’efficacité de nos politiques publiques.

Julie Chaumard : Merci beaucoup Émeline Baume.

Émeline Baume : De rien.

[Virgule musicale]

Interview de Simon Clavier, président de TOSIT

Julie Chaumard : Je suis maintenant avec Simon Clavier, président de l’association TOSIT, qui va bientôt faire une conférence aux Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre et qui a bien voulu me parler cinq minutes avant d’enchaîner sur sa conférence.

Simon Clavier : Bonjour.

Julie Chaumard : Bonjour. Merci Simon. Pouvez-vous présenter TOSIT aux auditeurs de Libre à vous ! ?

Simon Clavier : Oui. L’association TOSIT est une association qui regroupe des grandes organisations. À l’origine, nous étions six : Carrefour, EDF, Enedis, Orange, Pôle emploi et SNCF ; moi, je suis employé à la SNCF, je m’occupe de l’open source à la SNCF.
Cette organisation a vu le jour en 2017, parce qu’on avait besoin de mieux coordonner nos actions, de mieux réfléchir ensemble à mieux utiliser l’open source et, aussi, comment mieux contribuer à l’open source en tant que grands groupes. Il y avait déjà des cercles qui existaient, il y a des choses comme le Cigref [Club informatique des grandes entreprises françaises] où, déjà, des gens discutent sur les sujets d’informatique, mais ce n’était pas suffisamment détaillé ou ça n’entrait pas suffisamment dans le creux du sujet sur comment mettre en place une stratégie open source, comment aller chercher plus d’open source, comment rendre aussi des choses qu’on aurait pu faire en open source, la contribution. Depuis 2017, nous avons beaucoup grossi, puisque, maintenant, nous sommes 19 ; vous nous trouverez sur le site tosit.fr. Ce sera justement l’objet de ma conférence : expliquer ce qu’est cette association, comment elle est née et ce qu’elle essaye de faire.
On essaye tous de progresser. Dedans, il y a des entreprises, par exemple la Maif qui fait beaucoup d’open source, qui crée des open source. Il y a, par exemple, RTE qui a monté une fondation, qui s’appelle LF Energy, pour faire de l’open source dans sa verticale industrielle de l’électricité, ce qui nous a d’ailleurs montré l’exemple pour faire la même chose : la SNCF s’est engagée, maintenant, dans une fondation qui s’appelle OpenRail Association, où il y a la Deutsche Bahn, les Chemins de fer suisses et l’Union internationale des chemins de fer et, là aussi, on essaye de faire de l’open source également sur le domaine métier.
Je m’écarte un peu de TOSIT, mais c’est un peu l’idée. C’est vraiment un endroit où on discute, on échange nos stratégies, ce qui marche, ce qui ne marche pas et on essaye d’avancer ensemble. On essaie vraiment de faire de la coconstruction. Je vais donner deux exemples que je vais donner dans la conférence tout à l’heure.
Un outil de chatbot qui s’appelle Tock, qui veut dire The Open Conversation Kit, a été créé par la SNCF, il y a un petit moment, plusieurs années maintenant, parce qu’elle ne voulait pas se faire désintermédier, etc. Grâce à TOSIT, on a pu le faire connaître, le faire utiliser et expliquer à ces entreprises comment ça marche et ça devient, maintenant, un vrai commun réutilisé par nos entreprises ; un truc intéressant : c’est un des membres de TOSIT, Crédit Mutuel Arkéa, qui a été le plus gros contributeur sur TOock en 2023. C’est un premier exemple.
Le deuxième exemple, c’est une distribution big data qui s’appelait Hortonworks, qui était open source, mais l’entreprise s’est fait racheter par son concurrent qui a refermé le code source. Ce code a été repris par des membres de TOSIT, en l’occurrence EDF et le ministère des Finances, la DGFiP. On a donc forké le produit, qui s’appelle maintenant Trunk Data Platform, pour le perpétuer dans sa version LTS, Long-term support, pour que ce soit une version qui dure longtemps et c’est déjà repris par d’autres membres TOSIT qui l’ont mis en production.
Avec cette idée-là, on voit bien qu’on fait notre part aussi en créant. Comme nous sommes les utilisateurs finaux de l’open source, en fait, nous avons notre part à jouer. Souvent je fais le parallèle avec les AMAP : l’idée c’est d’aller chercher nos poireaux chez le producteur de poireaux. Eh bien là, allons chercher le logiciel chez ceux qui font le logiciel et faisons notre part.
On a l’habitude de faire ce qu’on appelle le make or by : soit on fait le logiciel, soit on achète le logiciel ; là, c’est une troisième voie où on fait le logiciel ensemble et, justement, ça apporte des bénéfices par rapport aux deux solutions qui ont, elles-mêmes, leurs défauts. Si j’achète un logiciel, j’ai un verrouillage fournisseur, j’ai des prix que je ne maîtrise pas, une roadmap que je ne maîtrise pas ; si je le fais moi-même, il faut que je supporte ça sur le long terme, que j’aie des personnes qui continuent à le développer ; donc, les deux posent problème. Faire ensemble des briques communes qu’on maintient à plusieurs, dans le temps, c’est un pari gagnant.

Julie Chaumard : Merci, Monsieur Clavier, pour cette description inspirante. Je n’ai pas beaucoup entendu l’histoire des grands groupes qui contribuent au logiciel libre, à l’open source et au partage.

Simon Clavier : On essaye !

Julie Chaumard : Le fait que vous soyez regroupés, du coup, vous allez parler de ça dans votre conférence et je trouve que c’est super. Merci.

Simon Clavier : Merci beaucoup. Bonne journée.

[Virgule musicale]

Interview de Charline Lombardo, commerciale chez Probesys

Julie Chaumard : Je suis avec Charline Lombardo de Probesys. Merci Charline d’accepter cette interview.

Charline Lombardo : Merci.

Julie Chaumard : Pouvez-vous nous expliquer ce que fait Probesys ?

Charline Lombardo : Probesys est une société de services spécialisée en logiciel libre. On a deux grands domaines d’activité aujourd’hui : l’administration système et réseaux : on peut intervenir sur tout type de projets, de l’audit, du conseil, de la sécurité, de la formation, de l’hébergement, de l’infogérance, du transfert de compétences ; on vient au renfort d’équipes existantes ou vraiment en totalité sur le projet pour aider des équipes.

Julie Chaumard : Du coup, c’est quels types d’entreprises ?

Charline Lombardo : On travaille avec tout type d’entreprises aujourd’hui, des administrations de l’État, des TPE, des PME, mais aussi des associations.

Julie Chaumard : Vous avez aussi des applications métier.

Charline Lombardo : Exactement. On a une activité de développement sur de l’application métier spécialisée, on vient répondre à un cahier des charges et on propose une application sur mesure pour nos clients.

Julie Chaumard : Comment arrivez-vous à faire intégrer les logiciels libres, les environnements libres, auprès de vos clients ? Qu’est-ce qui les pousse à travailler avec vous ? Quels sont vos arguments ?

Charline Lombardo : Nos clients viennent nous chercher justement parce qu’on leur propose des solutions libres. Ils veulent pouvoir ne pas forcément être liés à un prestataire, avoir, bien évidemment, leur code et tout ce qui s’ensuit. Ça leur permet déjà d’avoir une réduction des coûts, même s’il y a une enveloppe budgétaire à mettre en place sur la mise en place d’un projet, derrière, il n’y a pas de frais de licence et ils peuvent être complètement autonomes. Donc, internaliser les compétences s’il y a le besoin ou faire appel à d’autres prestataires de services pour être le plus libres possible.
En complément de ces applications métiers, on est venu mixer un petit peu nos compétences pour être éditeur de nos propres solutions. On a donc développé une solution libre qui s’appelle AgentJ, un anti-spam, et on est en cours de développement d’une solution qui s’appelle Bileto, un outil de ticketing.

Julie Chaumard : Ces outils sont libres, peuvent être utilisés par tout le monde.

Charline Lombardo : Exactement. Et on a la volonté à ce que tout le monde puisse les utiliser, parce que les utilisateurs sont riches d’expériences et peuvent nous faire des retours pour qu’on puisse aussi améliorer nos outils au quotidien.

Julie Chaumard : Merci beaucoup, Charline, et bonne fin de salon.

Charline Lombardo : Merci.

[Virgule musicale]

Interview de Damien Accorsi, dirigeant d’Algoo

Julie Chaumard : Je suis avec Damien Accorsi, de l’entreprise Algoo. Bonjour Damien.

Damien Accorsi : Bonjour.

Julie Chaumard : Pouvez-vous nous dire ce que fait Algoo ?

Damien Accorsi : Algoo un éditeur de logiciels libres et de services basés principalement sur des logiciels libres. On a un service de collaboration, un logiciel de collaboration qui s’appelle Tracim, un logiciel destiné à la collaboration d’équipe ; sur ce logiciel, on est éditeur. Et on a un service d’e-mails, qu’on a lancé en 2023, là, on est plutôt éditeur de services et on contribue à une brique open source sur laquelle on s’appuie pour le service.

Julie Chaumard : OK. Quels types d’entreprises, organismes, utilisent vos solutions logicielles ?

Damien Accorsi : On a trois typologies principales de clients : on a des associations, des collectivités et des TPE, PME.

Julie Chaumard : J’ai cru comprendre qu’entre les associations et les collectivités d’un côté, les entreprises de l’autre, il y avait des enjeux différents entre la souveraineté et d’autres choses pour les entreprises.

Damien Accorsi : Tout à fait. En fait, les associations et les collectivités sont très demandeuses de souveraineté des données et de réversibilité des services qu’on propose. C’est-à-dire que si, à un moment donné, elles sont insatisfaites ou que nos tarifs sont trop élevés, les logiciels libres vont leur permettre de passer soit chez un autre prestataire, soit d’héberger elles-mêmes leur solution. C’est donc une garantie financière pour elles ; elles ne seront pas verrouillées, comme client, chez Algoo.
Au niveau des entreprises du milieu privé, c’est un peu différent. On va dire que les choix sont plutôt calculés et pragmatiques : on va chercher un périmètre fonctionnel, avec un coût associé, les clients vont chercher la solution avec le meilleur rapport qualité/prix.

Julie Chaumard : Vous nous avez parlé de votre nouvelle offre e-mail qui est sortie en novembre, je pense. Est-elle en croissance ?

Damien Accorsi : La solution e-mail Galae est effectivement sortie en novembre. On avait fait une campagne de précommande avant de la lancer, à l’été 2023, ce qui nous a permis de valider qu’il y avait une demande pour ce service. Le service a été lancé en novembre, suite à quoi, pendant quelques mois, on a essuyé des difficultés techniques, on va dire ; ça s’est résorbé courant mars. Depuis le mois d’avril, la plateforme fonctionne très bien et, maintenant, on est dans une phase où on cherche de nouveaux clients, sachant qu’on a un certain nombre de clients qui ont commandé avec des offres plutôt petites et qui passent, progressivement, sur des offres plus importantes, signe que le service est satisfaisant.

Julie Chaumard : Bravo et merci beaucoup pour cette interview.

Damien Accorsi : Merci beaucoup.

[Virgule musicale]

Interview de Benjamin Sonntag, fondateur d’Octopuce

Julie Chaumard : Les Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre se terminent. J’ai la chance d’être assise à côté de Benjamin Sonntag pour une petite interview.
Bonjour Benjamin.

Benjamin Sonntag : Bonjour.

Julie Chaumard : Merci beaucoup d’avoir accepté. Pourquoi est-ce important, pour vous, de venir aux Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre ? Pourquoi est-ce important, pour vous, de faire du Libre ?

Benjamin Sonntag : Ce sont deux questions différentes.
Pourquoi c’est important de faire du Libre ? Parce que, pour moi, c’est la seule façon de faire de l’informatique qui puisse vraiment rendre service à toutes et à tous. Le faire en propriétaire, c’est forcément faire une closure, refermer les capacités d’innovation. Internet n’aurait pas pu avoir lieu sans le logiciel libre, clairement ! Tout Internet ! Le réseau lui-même. C’est mieux si toutes les innovations, toutes les améliorations qu’on peut apporter à notre quotidien, sont accessibles à toutes et à tous.
Pourquoi est-ce important d’aller aux RPLL en particulier ? Parce qu’on parle souvent du Libre dans les milieux associatifs, dans les ONG, à différents endroits, mais c’est important aussi pour les entreprises. Qu’on soit simple entreprise ayant besoin d’usages ce qu’on appelle l’IT — c’est-à-dire bureautique, e-mail, communication de base —, plein de logiciels libres peuvent vraiment répondre à nos besoins de manière, je dirais, très pertinente et sont, franchement, plus stables, plus fiables, plus robustes que ce qu’on peut souvent trouver en propriétaire, mais, surtout, plus respectueux des données personnelles, plus respectueux des business et des entreprises qu’on monte et qu’on gère.
Je suis moi-même gérant d’une entreprise de dix personnes, nous sommes vraiment très concernés par ces sujets et, clairement, nous n’avons aucun problème informatique. On a fait le choix des logiciels libres dès le début. C’est une culture que nous avons et, franchement, nous sommes très contents de nos usages au quotidien. Ce qui m’étonne, c’est à quel point les gens galèrent avec leur Windows, avec leur Office, avec leurs machins, et nous, nous ne galérons pas. Peut-être que ça peut aider les professionnels de savoir que ça existe. Donc, en faisant des Rencontres Professionnelles, on montre aussi à des PME, à des TPE, à des entreprises locales qu’il y a des usages, qu’il y a des solutions, que des entreprises peuvent les aider à avoir des solutions maintenues, stables, fiables, donc, je suis très content de participer à ça et d’aller rencontrer un peu les camarades des différentes PME du Libre de la région Rhône.

Julie Chaumard : Merci beaucoup, Benjamin Sonntag, de nous avoir partagé votre vision inspirante du domaine du Libre.

Benjamin Sonntag : C’est gentil. Merci.

[Virgule sonore]

Julie Chaumard : Benjamin Sonntag, fondateur de la société Octopuce spécialisée dans l’hébergement et l’infogérance de serveurs, clôture cette série d’interviews.
Il était 18 heures, la clôture de cette folle journée, qui nous a montré toutes les possibilités offertes par le logiciel libre et les sujets que l’on doit encore creuser.
Avant de partir, nous avons eu droit à un apéro bien mérité, avec encore des partages d’expériences et des échanges bien sympathiques.
Je remercie toutes les personnes de ces Rencontres pour l’accueil qu’elles ont réservé à l’équipe de l’émission et d’avoir participé aux interviews.
Vous avez rendez-vous à Lyon, à l’hôtel de la Métropole, pour la cinquième édition des Rencontres Professionnelles du Logiciel Libre, le jeudi 15 mai 2025. En attendant, vous pourrez bientôt écouter les conférences de cette année sur le site internet rpll.fr, qui est hébergé gracieusement par la société Webelys qui était également présente aux RPLL et qui avait proposé la conférence intitulée « Ne pas payer son site e-commerce ? »

Notre émission se termine. Nous allons finir par quelques annonces.

[Virgule musicale]

Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre

Julie Chaumard : Vous pouvez retrouver tous les détails de cette 213e émission sur le site libravous.org/213.

Du 18 au 30 juin aura lieu, à Lyon, State of the Map France, les Rencontres nationales d’OpenStreetMap.

Le 29 juin, Bookynette, la présidente de l’April sera à Valence, à la Librithèque, dans le cadre de son tour des Gull ; les Gull sont les groupes d’utilisatrices et d’utilisateurs du logiciel libre. Donc, rendez-vous samedi au Fabrico, à Valence, 7 rue Belle Image de 10 heures à 11 heures 30.

Comme vous le savez sans doute, toutes les pauses musicales diffusées dans l’émission sont sous licence libre. Depuis son lancement, nous avons diffusé près de 400 titres. Pour les découvrir, nous vous proposons une playlist et un tableau mis en forme pour retrouver toutes ces musiques.

Le vendredi 5 juillet, notez bien, soirée radio ouverte à 19 heures 30, ici à la radio, pour tous, au 22 rue Bernard Dimey dans le 18e arrondissement de Paris. Nous vous attendons pour la soirée radio ouverte.

Notre émission se termine.

Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission du jour, les participantes et les participants des RPLL, et Laurent Costy et Lorette Costy.
Aux manettes de la régie aujourd’hui, Frédéric Couchet.
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts, tous bénévoles de l’April : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, Julien Osman, et Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.

Nous nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 2 juillet avec la ville de Malakoff et d’ici là, portez-vous bien.

Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.

Julie Chaumard : La notion de logiciel libre est apparue quand ? Il y a 40 ans. Où ? Aux États-Unis ? Par qui ? Richard Stallman, qui a été initiateur du mouvement du logiciel libre.