- Titre :
- Émission Libre à vous ! diffusée mardi 10 novembre 2020 sur radio Cause Commune
- Intervenant·e·s :
- Véronique Bonnet - Chloé Hermary - Laïla Atrmouh - Sonia Edouardoury - Isabelle Carrère - Freco - Frédéric Couchet - Olivier Grieco à la régie
- Lieu :
- Radio Cause Commune
- Date :
- 10 novembre 2020
- Durée :
- 1 h 30 min
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Page des références utiles concernant cette émission
- Licence de la transcription :
- Verbatim
- Illustration :
- Bannière de l’émission Libre à vous ! de Antoine Bardelli, disponible selon les termes de, au moins, une des licences suivantes : licence CC BY-SA 2.0 FR ou supérieure ; licence Art Libre 1.3 ou supérieure et General Free Documentation License V1.3 ou supérieure. Logo de la radio Cause Commune utilisé avec l’accord de Olivier Grieco.
- NB :
- transcription réalisée par nos soins, fidèle aux propos des intervenant·e·s mais rendant le discours fluide.
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l’April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Frédéric Couchet : Bonjour à toutes. Bonjour à tous.
L’apprentissage de la programmation pour les femmes, c’est le sujet principal de l’émission du jour, avec également au programme la chronique de Véronique Bonnet sur la documentation libre et une deuxième chronique d’Antanak sur téléphones mobiles et vie privée. Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.
Vous êtes sur la radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 en Île-de-France et en DAB+ et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.
Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre. Je suis Frédéric Couchet, le délégué général de l’April.
Le site web de l’association c’est april.org.
Nous sommes mardi 10 novembre 2020, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
Je précise qu’aujourd’hui nous diffusons chez nos voisins et voisines d’Antnak.
Si vous voulez réagir, poser une question pendant ce direct, n’hésitez pas à vous connecter sur le salon web de la radio. Pour cela rendez-vous sur le site de la radio, causecommune.fm, cliquez sur « chat » et retrouvez-nous sur le salon dédié à l’émission #libreavous.
Nous vous souhaitons une excellente écoute.
Avant de commencer, je vais vous poser une petite question, vous avez l’habitude du quiz, mais aujourd’hui ça va être simplement une petite question. Promouvoir le Libre sur les ondes et en podcast c’est beaucoup de plaisir, mais ça nous ferait chaud au cœur de savoir comment vous nous écoutez : au petit déjeuner, dans le train ou pour accompagner vos siestes. Dites-nous tout. Vous pouvez même, peut-être, envoyer une petite photo comme les photos qu’on met en ligne sur le site de la radio causecommune.fm ou sur april.org. Vous pouvez proposer des réponses sur le salon web de la radio ou par tout autre moyen de nous contacter sur nos différents sites web. J’en profite pour faire un coucou notamment à Pierre, Jean et Patrick qui nous écoutent habituellement lors de trajets en voiture, à Thierry qui nous écoute le dimanche pour accompagner le repassage de la semaine, à Xavier quand il désassemble des trucs en bio-ingénierie, à Nicolas qui nous écoutait dans le car lors des trajets à vide puis le matin au réveil et maintenant quand il a l’esprit libre un moment et, bien entendu, on aimerait des réponses aussi d’auditrices, bien sûr, car on sait qu’il y a des auditrices qui nous écoutent.
Tout de suite, le premier sujet.
[Virgule musicale]
Chronique « Partager est bon » de Véronique Bonnet sur le thème de la documentation libre
Frédéric Couchet : Nous allons commencer par la chronique de Véronique Bonnet, professeure de philosophie et présidente de l’April. La chronique a été enregistrée il y a quelques semaines. On se retrouve juste après.
[Virgule sonore]
Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre par la chronique de Véronique Bonnet, professeure de philosophie et présidente de l’April. La chronique s’intitule « Partager est bon » et aujourd’hui Véronique va nous commenter un texte de Richard Stallman intitulé « Pourquoi le logiciel libre a besoin d’une documentation libre ». Véronique, je te passe la parole.
Véronique Bonnet : En effet, Fred, il s’agit d’un article de Richard Stallman, un article de 1996.
Il se trouve que la philosophie GNU se réjouit que l’utilisateur s’interroge. D’ailleurs, tu l’as dit, tu as dit ce titre, cet article a pour titre une question.
Quand un enfant demande pourquoi pour la première fois, il est important de trouver les mots pour expliquer, pour transmettre ce qu’on croit avoir compris, pour qu’il gagne en autonomie, devienne plus confiant dans ce qu’il fait en comprenant pourquoi il le fait. Alors, il y aura beaucoup de pourquoi qui suivront le premier pourquoi, inlassablement, auxquels il sera important que nous essayions de répondre également inlassablement.
Platon, un philosophe, disait que savoir s’étonner de quelque chose était le début de la philosophie. Dans mes cours, je montre à mes étudiants qu’ils ne doivent jamais se résigner à ne pas comprendre quelque chose. S’interroger est un droit et sans doute aussi un devoir.
Laisser les programmes informatiques non libres exécuter ce qu’on ne comprend pas, à notre insu, c’est abdiquer.
Le logiciel libre a besoin d’une documentation libre.
Richard Stallman se réfère à une expérience qui fut la sienne. Il a, à un moment, voulu apprendre un langage, il a voulu apprendre à coder en Perl. Il y avait bien de la documentation libre, sous forme de manuels, mais très difficile.
Une documentation, comme son nom l’indique — ça vient du latin doceo — j’enseigne quelque chose à quelqu’un, est ce qui permet d’acquérir un savoir et un savoir-faire. Comme il voulait apprendre le Perl, Richard Stallman avait demandé à des programmeurs en Perl s’il n’y avait pas de manuels libres plus faciles d’accès. Les seules documentations sur Perl, plus abordables, étaient non libres, éditées sous copyright, seulement, et en version papier, alors que les documentations libres de GNU, qui permettent l’accès au code source, qui peuvent être exécutées, étudiées, modifiées, améliorées et distribuées sous forme de copies modifiées ou non modifiées sont, bien sûr, beaucoup souhaitables.
Richard Stallman fait la différence entre la documentation libre qui doit permettre sans restriction les quatre libertés et des articles ou des livres, par exemple celui qu’il écrit à propos de la documentation libre, dans lesquels des militants du logiciel libre expriment, par des choix d’écriture très intimes et originaux, des perspectives non techniques.
Pourquoi cette comparaison ? Parce que si on est dans un propos qui est personnel, qui est original, qui fait intervenir un certain rythme d’écriture, les auteurs n’ont pas à se sentir obligés de donner, d’octroyer le droit de modifier. Par contre, et c’est le cas de toute documentation, les documentations techniques ou les parties techniques de documentation libre doivent pouvoir impérativement accueillir des améliorations et laisser possible la diffusion de versions améliorées et encore améliorables. Il faut donc qu’un programmeur consciencieux ait les mains libres pour pouvoir faire bénéficier la communauté de ce qu’il a trouvé.
Richard Stallman conclut son article en passant en revue les obstacles à la réalisation d’une documentation libre pour les logiciels libres.
Premier obstacle : l’existence d’un manuel privateur peut dissuader les rédacteurs de réaliser une documentation libre, ce qui a pour effet négatif que cette documentation non libre a un caractère statique, peu adaptatif, alors que la documentation libre, elle, est plastique, elle est reconfigurable. Je cite Richard Stallman : « Un système d’exploitation libre peut avoir une fissure qui nécessite un colmatage. » Il faut donc que la documentation libre ait l’agilité, dans les techniques qu’elle propose, de modifier, d’améliorer les préconisations.
Deuxième obstacle : certains, qui se contentent de logiciels non libres, se satisfont complètement de documentation non libre. La liberté n’est pas pour eux une exigence incontournable. Il serait bien sûr préférable qu’ils conjuguent technicité et liberté. Je dirais que cette émission de radio de l’April, que vous écoutez, joue ce travail, ce rôle de sensibilisation pour que la technique soit toujours assortie d’une autonomie d’usage de la technique.
Autre obstacle : les manuels non libres, les éditions privatrices, malgré leur insuffisance, font de l’ombre à la documentation libre, en perte de vitesse. En 1996, lorsque Richard Stallman écrit cet article, il constate : « Nous continuons à perdre des manuels », à perdre des manuels libres. D’où un double appel. D’abord aux rédacteurs pour qu’ils rendent leur documentation libre. Ensuite aux éditeurs, pour qu’ils vendent des manuels sous copyleft. Enfin aux utilisateurs pour qu’ils vérifient les termes de la licence des manuels. À cette fin la FSF [Free Software Foundation] maintient sur une page une liste de manuels libres en plus de la documentation GNU.
Je dirais, pour conclure cette chronique, que le professeur de philosophie que je suis peut se référer ici à un texte de Kant qui me paraît avoir un projet assez proche de celui de l’article que j’ai commenté. Ce livre s’appelle De l’illégitimité de la contrefaçon des livres. Dans ce texte, Kant fait l’hypothèse que lorsque le savoir n’est plus disponible, lorsqu’un livre n’est plus édité ou lorsqu’il est édité en nombre insuffisant d’exemplaires, alors il faut que le public s’en empare, il faut que le public exige que l’édition soit reprise, qu’elle soit rendue disponible suffisamment.
Soyez exigeants en matière de logiciels et en matière de documentation.
Frédéric Couchet : Merci Véronique. C’était la chronique de Véronique Bonnet, professeure de philosophie et présidente de l’April.
La chronique du jour portait sur le texte de Richard Stallman intitulé sous forme de question « Pourquoi le logiciel libre a besoin d’une documentation libre » que vous pouvez retrouver en français sur le site gnu.org, g, n, u point org. Je rappelle que toutes les traductions du site gnu.org sont réalisées bénévolement par notre groupe de travail Trad-gnu qui a pour but de vous présenter en français l’informatique libre et la philosophie de GNU. Vous pouvez rejoindre ce groupe pour traduire ou relire des traductions.
Merci Véronique. Je te souhaite une belle fin de journée.
Véronique Bonnet : Belle fin de journée à toi, Fred.
[Virgule sonore]
Frédéric Couchet : C’était la chronique de Véronique Bonnet enregistrée il y a quelques semaines.
Nous allons faire une pause musicale.
[Virgule musicale]
Frédéric Couchet : Aujourd’hui notre programmateur musical Éric Fraudain, du site auboutdufil.com, va nous faire découvrir Glaciære qui est un artiste suédois. On va avoir les thèmes de l’eau, de la glace, de l’été et ainsi une ambiance relaxante et reposante pendant les pauses musicales de l’émission.
On va écouter Relaxing in the hammock. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
Pause musicale : Relaxing in the hammock par Glaciære.
Voix off : Cause Commune 93.1.
Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Relaxing in the hammock par Glaciære, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution, qui permet la réutilisation, la modification, la diffusion, le partage de cette musique, y compris pour toute utilisation commerciale. Vous retrouverez les références sur april.org et sur causecommune.fm et une présentation de l’artiste sur le site auboutdufil.com.
Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 et en DAB+ en Île-de-France et partout dans le monde sur causecommune.fm.
Nous allons passer au sujet suivant.
[Virgule musicale]
Apprentissage de la programmation pour les femmes avec Chloé Hermary de Ada Tech School, Laïla Atrmouh de Ladies of Code Paris et Sonia Edouardoury de Django Girls Paris
Frédéric Couchet : Nous allons poursuivre avec notre sujet principal qui va porter sur l’apprentissage de la programmation pour les femmes avec nos invitées, Chloé Hermary de Ada Tech School. On va vérifier que Chloé est avec nous au téléphone. Bonjour Chloé.
Chloé Hermary : Bonjour Fred.
Frédéric Couchet : Laïla Atrmouh de Ladies of Code Paris. Laïla est-ce que tu es avec nous ?
Laïla Atrmouh : Bonjour. Oui, je suis avec vous.
Frédéric Couchet : Et Sonia Edouardoury de Django Girls Paris. Sonia est-ce que tu es avec nous ?
Sonia Edouardoury : Oui. Je suis avec vous.
Frédéric Couchet : Parfait. Évidemment, pour les personnes qui ont l’habitude d’écouter l’émission, ce n’est pas la première fois qu’on aborde ce sujet-là. Je vous renvoie à différents podcasts sur causecommune.fm sur les femmes et l’informatique, sur l’apprentissage de la programmation pour les enfants, sur le développement du logiciel libre avec une développeuse et sur l’émission consacrée à Ada ou la beauté des nombres dont on va peut-être parler tout à l’heure. C’est un sujet fondamental, donc on y revient évidemment avec trois personnes.
On va commencer, avant d’aborder le fond de la question, par une petite présentation personnelle de chacune de nos personnes ce qui permettra aussi de reconnaître un petit peu les voix. Je propose qu’on commence par Chloé Hermary de Ada Tech School.
Chloé Hermary : Oui. Bonjour. Moi c’est Chloé Hermary. J’ai 26 ans. Je suis la CIO [Chief Information Office] et fondatrice d’Ada Tech School. Ce que ça veut dire c’est que je ne suis pas développeuse, je suis entrepreneure, et j’ai créé une école d’informatique féministe en deux ans qui vise, du coup, à former, à ouvrir à toutes les diversités, notamment aux femmes, les métiers de l’informatique.
Frédéric Couchet : Très bien. Évidemment, on va rentrer dans le détail tout à l’heure de ce qu’est cette école.
Laïla Atrmouh, je te laisse te présenter.
Laïla Atrmouh : Je suis Laïla Atrmouh. J’ai 29 ans. Je suis développeuse web depuis maintenant quelques années et je fais partie des organisatrices de la communauté Ladies of Code Paris qui est une communauté qui encourage les femmes à s’intéresser à une carrière technique dans l’informatique, que ce soit des métiers de développeuses, data scientist, etc., et surtout à ce qu’il n’y ait pas de fuite une fois qu’elles y sont.
Frédéric Couchet : D’accord. Dernière invitée, Sonia Edouardoury de Django Girls Paris. Sonia.
Sonia Edouardoury : Bonjour. Je suis, comme vous dites, Sonia Edouardoury, je représente l’organisation qui s’appelle Django Girls Paris qui est une organisation partout dans le monde, basée à Londres. Mon domaine est plutôt pour le digit analysis, ma carrière c’est plutôt en tant que business analyst dans les télécoms à Londres. J’ai créé une start-up, je me suis retrouvée à faire ça et je serai ravie de vous en parler.
Frédéric Couchet : Très bien. En tout cas nous sommes ravis de vous avoir toutes les trois. Je précise les conditions techniques. Comme je l’ai dit tout à l’heure, nous ne sommes pas dans notre studio principal, nous sommes chez nos voisines d’Antanak et nos invitées sont par téléphone. Donc nous présentons nos excuses pour la qualité qui n’est pas habituelle par rapport à la diffusion. Olivier Grieco, le directeur d’antenne me dit que ça va, il a l’air content, il n’a pas l’air chafouin, donc ça va. Il est à côté de moi.
On va commencer par une première question, qu’on va aborder pendant quand même quelques minutes, qui est un petit peu le constat. En fait, pourquoi on fait ce genre d’émission et ce n’est pas la première qu’on consacre, hélas, précisément à l‘apprentissage de la programmation pour les femmes. J’aurais envie de vous poser la question : quels sont les problèmes ? Depuis quand ça existe ? Quel est le problème aujourd’hui concrètement ? Depuis quand ? Comment ça se manifeste, etc. ? Qui veut commencer ?
Chloé Hermary : Si vous voulez je peux commencer.
Frédéric Couchet : C’est Chloé, c’est ça ?
Chloé Hermary : Oui, exactement, c’est Chloé et après je laisserai évidemment la parole à Sonia et Laïla qui pourront en dire plus.
Je pense qu’avant de commencer, avant de parler des problèmes. il faut peut-être parler des conséquences et, du coup, du contexte actuel. Aujourd’hui il y a peu de femmes qui codent, il y a peu de femmes qui se forment à la programmation, il y a peu de femmes qui programment en entreprise et, en fait, il y a aussi peu de femmes qui restent, d’où l’importance de communautés comme celles de Laïla et de Sonia. On estime à peu près à entre 10 et 15 % le nombre de femmes en formation d’informatique et c’est à peu près un chiffre qu’on retrouve ensuite dans les entreprises. On peut se dire que c’est un problème pour plusieurs raisons. D’abord parce qu’on peut être un fervent défenseur, une fervente défenseure de la justice sociale et se dire que ça n’a aucun sens que des métiers qui influencent notre société, qui sont des métiers de pouvoir soit financier, économique, etc., ne soient pas occupés par des femmes. Mais c’est aussi un problème qui est hyper pragmatiquement économique, tout simplement en fait puisque les entreprises cherchent des développeurs. Aujourd’hui on ne forme pas suffisamment de développeurs, donc on a une pénurie de talents et, dans ce contexte de pénurie, c’est quand même un petit peu dommage de se passer de 52 % de la population mondiale.
Voilà en tout cas pour le contexte. Après, je peux laisser un petit peu la parole à Sonia et Laïla.
Frédéric Couchet : Oui, on va faire des échanges. Laïla, sur cette partie-là, est-ce que tu veux réagir ou apporter des compléments, sur cette partie introductive ?
Laïla Atrmouh : Oui. Je pense qu’en termes de chiffres on n’est effectivement pas une population qui est très représentée dans les métiers techniques et encore plus dans les positions managériales. C’est un problème que je constate. Déjà moi, à l’époque où j’étais en école d’ingénieur, en fait il y avait déjà très peu de filles qui étaient présentes. En plus de ça, elles avaient tendance à abandonner plus vite que les garçons. Je me souviens de ma toute première année où on devait être une quarantaine, ce qui n’était quand même pas si mal sur une promo de 200 personnes, et, au final, l’année suivante, on s’est retrouvées à une dizaine de filles, on était un peu les survivantes. Il y a un peu ce côté où il y a vraiment un drop que ce soit à l’université où, en fait, des échos que j’avais de ces personnes-là qui changeaient de cursus, c’était vraiment « j’ai l’impression de ne pas être à ma place, d’arriver dans un monde où justement il y a tous les clichés qui persistent un peu ». Le cliché de quand tu es développeur, développeuse, tu passes ta journée entière devant des écrans, tu ne fais qu’écrire du code. Le cliché qui persiste où on est derrière nos ordinateurs et, un peu, des geeks dans leur cave. Donc je pense qu’il y a ce problème où, en fait, c’est un métier qui est empreint de clichés. En plus de ça il y a un drop, en tout cas de ce que j’ai pu voir. Il y avait des personnes qui ne se sentaient pas à leur place quand elles arrivaient à l’université.
Frédéric Couchet : Dans une filière technique, c’est ça ?
Laïla Atrmouh : Absolument. En école d’ingénieur en informatique. Après. ça c’était un problème qu’il y avait en quelle année ? En 2010, ouais ! Ça fait dix ans. Pour avoir gardé contact avec mes directeurs et directrices d’école, etc., c’est quelque chose qui est en train de changer progressivement. Je pense notamment à la directrice du département informatique de l’unité Paris Descartes, madame Dirani, qui fait vraiment beaucoup d’efforts dans ce sens pour justement inciter les filles des promotions des unités en informatique à rester. Je suis quand même optimiste pour la suite, je me suis dit qu’il y a de plus en plus d’initiatives. J’ai confiance, tout simplement, dans le fait qu’on va réussir à faire basculer ce ratio.
Frédéric Couchet : D’accord. Sonia sur cette introduction et après j’aurai une question par rapport à votre première partie, notamment sur le fait d’abandonner. Sonia sur cette introduction, sur le problème ou le constat en tout cas.
Sonia Edouardoury : Je rejoins tout à fait l’avis de Chloé et de Laïla. C’est indiscutable, il n’y a pas assez de femmes représentées dans ce domaine. Au-delà de ça — je ne suis pas développeuse de métier, j’ai rencontré ça de l’autre côté en ayant travaillé dans des métiers adjacents, dans tout ce qui est analytique et aussi en tant qu’entrepreneuse après — j’ai constaté ça, mais en soi, ce qui m’a beaucoup surprise on va dire, ce sont toutes ces initiatives de femmes autour pour créer en fait ces organisations comme Django Girls Paris, Ladies of Code, en France mais aussi dans d’autres pays parce que ce phénomène, c’est sûr, il n’est pas que français, il est partout. Et surtout ces dernières années où j’ai vécu 15 ans en Angleterre, c’est aussi le même problème peut-être un peu moins dans ces pays que la France parce qu’ils ont commencé ça au niveau éducation, ils ont vraiment changé leur curriculum d’éducation beaucoup plus tôt qu’en France, en tout cas c’est ce que je constate. Ce qui est beau c’est qu’en fait aujourd’hui il y a des initiatives, vraiment, pour que les femmes qui veulent puissent le faire par des organisations telles que celles qui sont là aujourd’hui. Ça c’est ce côté très positif du changement qui se passe par rapport à ça.
Frédéric Couchet : On va venir sur les initiatives dans une deuxième partie, évidemment. Je voulais rester pour l’instant sur la partie constat. J’avais déjà une première question. Tout à l’heure, je ne sais plus si c’est Chloé ou Laïla qui parlait des filles qui ne se sentaient pas forcément à leur place et, sur le salon web, Marie-Odile pose la question : n’étaient-elles pas à leur place ou leur faisait-on sentir qu’elles n’étaient pas à leur place ?, ce qui, évidemment, n’est pas la même chose. Je rappelle qui vous pouvez participer à la discussion sur causecommune.fm, bouton « chat ». Est-ce qu’on vous faisait sentir que vous n’étiez pas à votre place et de quelle façon ?
Laïla Atrmouh : C’est moi qui avais parlé de ça.
Frédéric Couchet : Donc Laïla.
Laïla Atrmouh : Laïla, c’est ça. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’on nous a fait sentir qu’on n’était pas à notre place, après je ne pourrais pas m’exprimer pour ces personnes-là puisque, au final, j’ai persisté et je suis restée. En tout cas, je trouvais à l’époque qu’il y avait un petit côté où soit tu adores ce que tu fais, ce qui était mon cas, moi j’ai découvert la programmation quand j’étais gamine, je ne me voyais pas faire autre chose de ma vie, clairement. Ou alors tu débarquais un peu dans le domaine et, du coup, tu étais face soit à des gens qui étaient passionnés, pour qui c’était un feu en fait, qui adoraient ça et qui se prenaient des murs en tapant leurs premières lignes de code, en voyant que ça ne marchait pas, mais qui réessayaient. Ou alors il y avait des personnes qui s’étaient orientées dans l’informatique parce que ça les intéressait mais sans plus. Je pense qu’il y avait plus un côté, en tout de ce que je comprenais de ces personnes-là, où elles ne se sentaient pas à leur place parce que ça leur paraissait trop compliqué. En fait, elles se faisaient avoir peut-être par les clichés de « il faut être bon en maths, il faut être fort en logique, etc. ». Il y avait tout de suite un côté où, effectivement, les premières années en programmation, quand on débute la programmation, c’est toujours un peu compliqué, ce sont de nouveaux concepts, il faut quand même s’accrocher pour comprendre.
J’ai l’impression que c’était plus un sentiment où elles ne se sentaient pas à leur place. Je n’avais pas l’impression qu’il y avait du harcèlement, même s’il y avait aussi des histoires de harcèlement. J’ai eu vent de certaines écoles où il y avait du harcèlement sexuel, il me semble que c’est chez 42, mais je ne veux pas dire de bêtises.
Chloé Hermary : Si je peux ajouter, du coup. Dans la création de Ada, on a rencontré pas mal de développeuses et, ce qu’on observe, ce sont des histoires un peu similaires à celle de Laïla qui sont aussi le fait que, quand on est une grande minorité dans une formation, c’est vrai qu’on a tendance à se questionner. On est un peu la minorité visible, donc on se pose à la question : est-ce que je suis vraiment à ma place ? Quand on est la grande minorité on a aussi un peu le syndrome de représentation des autres, donc on se dit « si je suis nulle, je suis nulle pour toutes les filles ». On va dire que c’est un fardeau qui peut être un peu lourd à porter, mais c’est un fardeau qui est personnel. Je pense, effectivement, que de l’autre côté il y a eu pas mal d’histoires dans 42, dans plein d’autres formations. Je sais que Social Builder, qui est une association qui œuvre pour l’inclusion des femmes dans le numérique, avait sorti une statistique que 70 % des femmes en école d’informatique avait été victime ou témoin d’actes sexistes ou de blagues sexistes, etc., donc c’est énorme, 7 femmes sur 10. Et ça, c’est également le fait d’être dans une position de grande minorité, parce qu’on est plus promptes à être victimes de ce genre de choses, la culture peut dériver plus facilement, etc.
Je pense qu’il y a un peu des deux : le fait d’être une minorité on se sent comme un être à part et, de l’autre côté, les autres vous voient comme une minorité visible. C’est vrai que c’est quelque chose qui parfois, malheureusement, avec l’effet moutonnier peut être hyper-difficile.
Laïla Atrmouh : Je pourrais ajouter. On a aussi une compétition, parfois, qui existe, notamment en école d’ingénieur. Je me souviens que sur les dernières années, et c’est un constat qui était partagé aussi par pas mal de personnes dans mon entourage, il y a souvent des stages qu’on peut être amené à faire et beaucoup d’étudiants visent parfois des boîtes prestigieuses ou des expériences à l’étranger, etc. Je me souviens de commentaires que j’ai eus parce que j’avais eu l’occasion de faire mon stage de fin d’études à New-York et ça n’a pas loupé. Effectivement, j’ai eu beaucoup de remarques où c’était « tu as été prise parce que tu es une fille », sachant que c’était des postes où, évidemment, il y avait une trentaine d’étudiants qui postulaient parce que tout le monde avait envie de partir à l’étranger à cette époque-là. Donc il y avait aussi ce côté-là, compétition, et les autres pensent que le fait d’être une minorité c’est un atout alors que ça peut, parfois, être un fardeau, comme disait Chloé.
Frédéric Couchet : Je crois qu’il y a Sonia qui voulait réagir. Vas-y Sonia.
Sonia Edouardoury : Je voulais juste rebondir à ça de manière générale. Personnellement je n’ai pas vécu ces choses parce que je n’étais pas dans la programmation. Ayant vécu plus de 15 ans en Angleterre, ce que j’ai remarqué, en tout cas par rapport au monde éducationnel et comment les femmes étaient vues dans la technologie, ce que je constate ici en France, parce que je suis rentrée depuis peu, c’est que c’est vrai qu’on sent que c’est un domaine qui est très orienté vers les hommes du fait aussi que dans l’éducation les filières sont aussi très étroites. On parle essentiellement d’écoles d’ingénieur et je vois ça un peu comme un modèle j’ai envie de dire assez français. J’ai envie de dire que si la façon dont on enseignait la programmation ou le code de manière générale était un peu plus large il y aurait encore moins ces problèmes.
Par exemple, en Angleterre, on peut apprendre la programmation, on peut apprendre à coder, d’une autre manière qu’en passant par une école d’ingénieur. Tout de suite, par exemple après leur niveau troisième, les élèves peuvent déjà s’orienter dans ce qu’on appelle dans des collèges. Par exemple on peut faire histoire et programmation, on peut faire sociologie et d’autres choses. Évidemment, on ne va pas être aussi spécialisé que comme on peut l’être, parfois, dans les écoles d’ingénieur. Je pense qu’il y a aussi un profond débat sur comment est-ce qu’on peut déjà élargir ça. Je pense que ça vient aussi de ce côté-là : les filières sont assez serrées, assez étroites, ce qui fait que c’est un peu élitiste et il y a moins de place pour d’autres personnes. Il faut aussi voir du côté de notre monde de l’éducation, comment il offre cette opportunité aux autres, y venir d’autres façons.
Frédéric Couchet : Justement sur l’éducation, vous parlez, on va dire, des études supérieures, écoles d’ingénieur, mais j’ai envie de vous demander quelle est la situation avant ? Est-ce que le problème ne prend pas sa racine avant et, finalement, est assez parallèle avec celui des sciences ? Tout à l’heure, je ne sais plus qui parlait du bac scientifique qui est réservé pour les garçons et les filles font littéraire, etc., est-ce que le problème n’est pas plus ancien que ça ? Est-ce que les évolutions récentes, notamment autour de l’apprentissage du code à l’école, les enseignements d’informatique, de spécialité informatique, qui sont arrivés vont pouvoir corriger cette problématique-là ? Qui veut réagir là-dessus ? Laïla, vas-y. Chloé, excusez-moi.
Chloé Hermary : Bien sûr que si, on parle des problèmes, mais le problème est un peu plus insidieux et un peu plus systémique que ça. En fait, c’est la société de genre, c’est comment et ce vers quoi on éduque nos petites filles et nos petits garçons. Dès les premiers âges on met des Lego, des jeux de construction dans les mains des garçons et on va mettre des cuisinières et des caisses enregistreuses dans celles des filles, qui sont des jouets beaucoup plus fonctionnels, au-delà de juste faire la cuisine ce sont des objets qui sont vraiment vers le soin à l’autre et des objets qui sont fonctionnels. On va avoir une façon d’éduquer nos enfants qui est différente en fonction de leur genre, qui va les amener, du coup, à développer une appétence sur une certaine façon de fonctionner, qui vont se convaincre qu’ils sont bons surtout dans les relations humaines et dans la littérature, etc. Du coup, au moment de l’orientation, à la fois il va y avoir cette construction sociale qui joue et il va y avoir aussi le regard de l’extérieur parce que ça serait sacrément bizarre, pour un garçon de bonne famille, de dire qu’il veut être esthéticienne et, de l’autre côté, d’une femme d’un milieu populaire de dire que, finalement, elle veut être ingénieure. Ce sont des choses qui vont être extrêmement conditionnées par d’où on vient et notre entourage. Quand je dis ça, je parle de leur entourage, comment ils vont vivre, etc.
Ça c’est pour moi une chose qui doit être effectivement résolue de manière systémique, donc qui doit être résolue avec l’éducation et éducation on parle ici de l’Éducation nationale. Effectivement, aujourd’hui le code est descendu au niveau du collège et du lycée ce qui, je pense, est une très bonne chose parce que ça montre à la fois que coder, finalement, c’est un peu comme apprendre à lire, à écrire et à compter pour le XXIe siècle. Après, il va falloir se poser la question de qui enseigne à coder, avec quels biais. Si ce sont les mêmes que d’habitude qui disent, en fait, que cette discipline a été faite pour les petits garçons de leur classe ils vont peut-être l’enseigner différemment, ils vont dire aux filles « c’est un peu plus difficile pour vous ». Il va y avoir aussi, et je pense que c’est hyper-important, une formation des profs qui forment à la programmation au collège et au lycée pour pouvoir, justement, dé-biaiser ça. Le problème de l’orientation est un problème de biais de genre qu’on a tous et qui, du coup, amène moins les jeunes femmes à se tourner vers ça. Je pense effectivement, et ce que disait Sonia, que c’est important que la programmation au lycée ne soit pas encore enseignée que par les profs de mathématiques. Qu’on n’entretienne pas ce traumatisme qu’on fait avec les mathématiques chez tout le monde et qu’on montre que la programmation c’est quelque chose de beaucoup plus ouvert, beaucoup plus créatif, beaucoup plus littéraire que cette vision peut-être un petit peu intimidante qu’on peut avoir en la liant systématiquement aux sciences, à la technique et aux mathématiques.
Frédéric Couchet : Laïla et Sonia, est-ce que vous voulez réagir sur cette partie et après on passera peut-être justement aux solutions ou, en tout cas, à vos initiatives ? Sur cette problématique de l’école ou peut-être des parents ou autres. Sonia.
Sonia Edouardoury : Je rejoins complètement Chloé sur ce qu’elle disait. Vraiment, moi pour avoir étudié ici en France quand j’étais jeune et avoir continué mes études en Angleterre, j’ai vraiment vu, par exemple, le grand changement et c’est vrai que c’est une très bonne chose déjà avec ce que j’ai cru comprendre, avec le changement au niveau du bac cette année. Je pense que l’idée d’arrêter un petit peu de limiter les gens à trois filières, qui sont toutes différentes les unes des autres, il faut plutôt recréer un mode où les gens peuvent se retrouver dans des filières qu’ils veulent et s’ils veulent un peu de maths qu’ils utilisent un de maths, s’ils veulent un petit peu d’histoire qu’ils puissent les combiner, au lieu d’avoir à choisir des manières, on va dire, très différentes l’une de l’autre. Ça c’est déjà un débat à gagner et un pas vers l’ouverture de l’Éducation à autre chose. Je pense que la programmation va aller dans ce sens : plus on ouvre l’éducation aux jeunes et plus on va, je pense, avoir plus de profils divers.
Frédéric Couchet : D’accord. Laïla sur cette partie-là, dernière intervention et après on va faire une pause musicale.
Laïla Atrmouh : Je rejoins totalement ce qui a été dit. Après, j’ai peut-être une crainte quant au temps que ça va prendre côté Éducation nationale. Je crois qu’il y avait eu une discussion selon quoi il y allait avoir une agrégation d’informatique. Aujourd’hui, je crois que c’est enseigné dans le cadre de la technologie mais que, plus tard, ça allait être vraiment une matière à part. J’ai un peu des craintes sur le temps que ça mettra à se faire, etc. Peut-être y aller plus par petites étapes, en ayant des petits modules, des modules d’initiation à la programmation dans un premier temps et laisser plus les enfants apprendre par eux-mêmes. Je pense que l’informatique et même le développement, c’est vraiment un milieu où, justement, on peut être autodidacte, c’est une réalité. Au contraire, c’est limite encourager à jouer avec les outils qu’on a à disposition. Je sais, côté parental, qu’il y a de nombreux parents qui sont un peu effrayés par rapport au temps d’écran que consomment leurs enfants. Je dirais qu’il faut faire attention à ce qu’ils ne soient pas simples consommateurs de réseaux sociaux ou de vidéos — je le vois sur des enfants de mon entourage, c’est effarant le temps qu’ils peuvent passer sur YouTube ou d’autres réseaux sociaux de ce type —, mais avoir un temps d’écran où, vraiment, il y a quelque chose qui est construit, un temps d’écran un peu plus stimulant. Là, je pense qu’il y a des choses à laisser faire, en fait, aux enfants, les laisser et un peu guider cet apprentissage-là.
Frédéric Couchet : On va en reparler après la pause musicale. Effectivement, en plus en période actuelle de confinement, c’est encore pire. On va parler justement de la partie fun, de la partie créative de la programmation, de l’informatique en général.
On va se faire une petite pause musicale. On va rester avec l’artiste Glaciære. On va écouter Floating on the water. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause commune, la voix des possibles.
Pause musicale : Floating on the water par Glaciære.
Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Floating on the water par Glaciære, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution. Vous retrouverez les références sur le site de l’April, april.org, et sur le site causesommune.fm. La page de l’artiste sur BandCamp c’est Stevia Sphere, donc steviasphere.bandcamp.com.
Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM et en DAB+ en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.
Nous parlons actuellement de l’apprentissage de la programmation pour les femmes avec nos invitées Chloé Hermary de Ada Tech School, Laïla Atrmouh de Ladies of Code Paris et Sonia Edouardoury de Django Girls Paris.
Nous allons reprendre notre échange et on va parler un petit peu de vos initiatives, justement autour de l’apprentissage de la programmation pour les femmes. Nous avons une école et deux initiatives un petit peu différentes. On va commencer par Chloé Hermary de Ada Tech School. Tu avais commencé tout à l’heure à expliquer un petit peu que tu avais créé cette école. Pourquoi l’as-tu créée et que fait cette école exactement ?
Chloé Hermary : Du coup, on mentionnait juste avant le problème et justement ce problème un petit peu insidieux, en fait pourquoi est-ce qu’il n’y a pas de femmes aujourd’hui dans l’informatique, c’est peut-être de la façon dont on les éduque, la façon dont on les oriente, etc. Notre réponse a été un petit peu claire, peut-être un peu clash de dire on va faire une école féministe. Féministe, ça ne veut pas dire qu’on exclut les hommes, ça ne veut pas dire qu’on manifeste tous les quatre matins, ça veut dire qu’on va apporter une réponse à ce problème qu’on essaye la plus complète possible, la plus systémique justement. Donc nous, en fait, on s’est dit que la problématique pour qu’il y a ait des femmes dans l’informatique et qu’elles y viennent c’est qu’il faut réinventer le système de formation.
On a créé une école. On a repensé le mode de recrutement, le mode pédagogique, Sonia en parlait. L’idée c’était vraiment de présenter l’apprentissage de l’informatique d’une façon beaucoup plus proche des langues vivantes, parce qu’en fait quand on programme, on programme à plusieurs. On programme rarement pour soi dans son coin et on programme pour des utilisateurs. En fait la programmation est un métier hyper-humain, etc. Donc amener la programmation d’une autre manière, avec une pédagogie alternative. On s’inspire beaucoup des pédagogies Montessori, Freinet, etc. En fait, une pédagogie qui valorise la confiance, la collaboration, l’autonomie et la créativité, que ce soit un petit peu plus amusant d’apprendre. Ensuite, dernier point, c’était, avec notre école féministe, de travailler avec des entreprises qui s’engagent aussi en ce sens et aussi des associations. C’était notre réponse. On travaille aussi avec Ladies of Code qui nous aide à placer nos apprenantes.
Ada est une école en 21 mois, 9 mois de formation et 12 mois en alternance, qui vise à former des développeurs et des développeuses logiciel et qui a un positionnement féministe, des valeurs féministes, qui est ouverte aux hommes et aux femmes. Nous, aujourd’hui, on reçoit 70 % de candidatures féminines et on a 70 % de nos apprenants qui sont des apprenantes.
Frédéric Couchet : D’accord. Dans la promotion actuelle vous avez combien de personnes ?
Chloé Hermary : Aujourd’hui on a 30 apprenants en formation.
Frédéric Couchet : D’accord. C’est donc un an de formation et ensuite un an en alternance. C’est ça ?
Chloé Hermary : C’est plutôt 9 mois la première année, mis bout à bout, et 12 mois d’alternance.
Frédéric Couchet : D’accord. Et quand tu parlais de pédagogie Montessori, Freinet, est-ce que ça veut dire qu’il n’y a pas de cours formels comme on peut en connaître dans certaines écoles ? Est-ce que c’est plutôt basé sur des ateliers, des échanges ? Comment se passe, par exemple, la journée d’une apprenante à Ada Tech School ?
Chloé Hermary : Effectivement, l’idée c’était de casser ce côté hyper-passif des cours, très descendant où, en fait, on écoute un prof, figure d’autorité, qui dicte un cours au tableau. L’idée c’était d’avoir un engagement beaucoup plus actif de nos apprenants et de nos apprenantes. En fait nos journées : le matin on va aller sur des exercices ciblés sur une notion, parce que l’apprentissage de la programmation nécessite l’entraînement sur des notions particulières, c’est ce qu’on appelle les plénières. Ça va être un moment plutôt collectif, on va être en mode progamming, on va aller faire des recherches, etc. Et puis la journée on va être en autonomie sur le projet. Un projet dure deux semaines et là on est en petit groupe et on va avancer dans ce projet.
L’encadrant, ce ne sont pas des profs, on les appelle des encadrants, ce sont plus des coachs, des facilitateurs qui vont venir débloquer, qui vont passer de groupe en groupe sur les difficultés, les blocages ou venir challenger les groupes.
Ce qu’il faut également savoir c’est que l’idée, pour nous, c’était de casser aussi cette idée un petit peu dévalorisante et stressante de l’école, de courbe de progression industrialisée qui doit être la même pour tout le monde, qui provoque, en fait, que les gens en retard sont hyper-stressés et cassés et les gens en avance se tournent les pouces en attendant les autres. En fait, on a découpé tous ces projets en trois niveaux ce qui permet, du coup, d’avoir un accompagnement des apprenants qui est beaucoup plus individualisé sur leur propre niveau, leur propre rythme de progression.
J’ajouterai qu’il y a un deuxième point qui est notre système de validation de compétences. Il n’y a pas de notes. Il n’y a pas de profs ce sont des encadrants, il n’y a pas de cours, ce sont des projets et des exercices et il n’y a pas de notes, ce sont des badges de compétences qui sont, d’ailleurs, sur le standard BadgeOS, qui est un standard open source, et qui permet à nos apprenants de venir valider leurs compétences selon des badges, selon ce qu’ils savent faire et non pas avec des tests et des notes de 0 à 20.
Frédéric Couchet : D’accord. Sur le salon web de la radio – je rappelle aux auditeurs et auditrices qu’ils peuvent nous rejoindre sur causecommune.fm, bouton « chat » et salon #libreavous – Marie-Odile, toujours, pose une question sur la formation des encadrants. Quelle est la formation des encadrants et des encadrantes ? Et, deuxième question, est-ce qu’il y a un diplôme à la fin ? Chloé.
Chloé Hermary : Déjà on sélectionne nos encadrants et nos encadrantes avec au moins cinq ans d’expérience en dev, ce sont quand même des devs qui sont seniors. Ensuite, ce sont des personnes qui ont aussi un an d’expérience pédagogique que ce soit en coaching, en mentorat, etc., donc qui ont manifesté une appétence pour ça. C’est déjà une sélection qui va être faite à l’entrée et ensuite on va les former, on va les former avec des journées d’observation, des journées de co-encadrement, un certain nombre d’outils, de rituels qu’on a créés à l’intérieur, ce qui leur permet d’avoir la posture, la posture de la bienveillance, de l’écoute. On aime dire qu’un encadrant Ada n’est pas là pour donner la réponse, il est là pour apprendre à la trouver. Du coup, c’est un savant mélange de donner une réponse tout en posant des questions, donc c’est assez fin et particulier. C’est comme ça qu’on les forme. Ça c’est pour nos encadrants.
Sur le diplôme on a effectivement un agrément qui permet de passer un titre reconnu par l’État, qui est un titre équivalent à une licence, qui est le titre de concepteur-développeur d’applications. En fait, nos élèves, nos apprenants, quand ils sortent de Ada Tech School, ils ont bien un diplôme reconnu par l’État.
Frédéric Couchet : D’accord. Évidemment on va revenir sur Ada Tech School après, le site web c’est adatechschool.fr, tout attaché.
Maintenant on va parler un petit peu de Django Girls avec Sonia. Ce n’est pas une école, c’est quoi Django Girls ? C’est une initiative, c’est un collectif ?
Sonia Edouardoury : En fait, il y a les deux. Django Girls est une organisation internationale qui a été créée par deux femmes, Ola et Ola, qui sont polonaises et qui vivent à Londres. Elles étaient elles-mêmes des software ingénieures, c’était il y a 10 ans, elles avaient vu ce changement et ce manque de place pour les femmes pour entrer dans la technologie.
Elles ont créé cette organisation qui, au départ, était une idée. C’était créer un atelier à Londres et donner l’opportunité à des femmes qui voulaient apprendre à coder. Cet atelier de 50 personnes à l’époque est devenu aujourd’hui une organisation très structurée qui est dans plus de 90 pays, dans plus de 500 villes. En fait l’idée c’est que quand une personne a l’énergie et l’envie d’organiser un atelier, eh bien elle fait la demande à Django Girls qui est cette organisation, et elle devient ambassadeur. Pour ma part, je suis donc la personne qui s’occupe de Django Girls Paris. L’idée c’est de créer des ateliers avec l’idée que c’est gratuit pour toute femme ou toute personne qui se sent être une femme, qui se sent comme femme. L’idée c’est d’avoir des sponsors pour en faire un atelier assez grand, d’avoir tous les moyens, et généralement ça se passe sur deux jours complets.
Ce qui est bien dans cet atelier et cette organisation c’est que n’importe qui peut le faire, dans le sens où il suffit d’aller sur cette organisation pour demander l’application pour être l’organisateur dans la ville où on veut. Il y a un tutoriel qui est prêt, qui est fait dans différentes langues. L’atelier peut être organisé vraiment de manière très rapide.
De notre expérience, le dernier était à Paris, c’était le 8 et le 9 mai, durant le confinement. Nous avions 50 femmes et 12 coachs. C’était un atelier vraiment spécial parce que c’était pendant le confinement, on n’était pas sûr que ça allait être organisé, mais nous avons créé quelque chose de magique parce que ça a donné une perspective encore plus différente que ce que ça allait être. Nous avons donné la possibilité aux gens qui n’auraient pas pu être là d’être là, donc il y avait des gens qui venaient de partout, une personne du Sud de la France, une personne qui n’aurait pas pu joindre cet atelier.
Sur le profil des femmes, je peux vous donner un peu une idée de la catégorie sociale de ces personnes désireuses souvent de ce genre d’initiatives. Ce sont généralement des femmes entre 30 et 39 ans — nous avions des femmes plus jeunes et d’autres plus âgées — et par rapport à la catégorie sociale, souvent ce sont des femmes qui ont des métiers de tous les jours, par exemple sage-femme, journaliste ou d’autres professions. Souvent ce sont des gens qui veulent changer de travail ou qui sentent le besoin, dans leur situation professionnelle, de s’adapter à une nouvelle technologie et qui souvent, par manque de temps, n’ont pas le moyen de trouver une structure qui puisse les emmener vers ça. Souvent, la première chose, c’est un atelier de Django Girls, il y en d’autres comme Ladies Girls et d’autres comme celle de Chloé. Le nôtre est dans l’idée qu’en deux jours, que vous soyez très débutant ou assez avancé – on peut vous mettre dans différents groupes – et, sur deux jours, vous avez des coachs qui sont dans le métier tous les jours, des CTO [Chief Technical Officer, des gens vraiment très ingénieurs dans leur vie de tous les jours, qui ont envie de partager leurs connaissances et de donner le meilleur d’eux-mêmes sur deux jours, de manière bénévole, à cette communauté.
Donc c’est ce qu’on a fait pendant deux jours et pour moi c’était la première fois. Je dois dire que j’ai découvert une communauté vraiment fantastique parce que moi, comme je disais, je ne suis pas développeuse, mais j’avais envie d’apprendre un peu plus sur le Python, et c’est comme ça que je suis rentrée, en fait, parce qu’il y avait des personnes qui organisaient à ce moment-là le Django Girls de Paris, on m’a demandé, j’ai dit pourquoi pas, et voilà. C’est une organisation qui est vraiment superbe, qui organise encore aujourd’hui des ateliers partout dans le monde malgré la Covid-19 et la situation. Tout se fait aujourd’hui en distanciel.
Frédéric Couchet : Le site c’est djangogirls.org. On reviendra dessus. Je vais juste préciser, pour les gens, que tu as cité un mot, Python, un langage de programmation et Django on va dire que c’est un framework, c’est-à-dire un ensemble de composants qui aide à développer plus facilement des sites web notamment avec Python et Python est réputé pour être un langage facile à apprendre. Tu as cité le tutoriel qui est en ligne. Je précise aussi qu’il est disponible sous licence libre, je suis allé voir, effectivement dans plein de langues. Ça permet effectivement de s’approprier très rapidement ce langage. On va revenir évidemment sur cette initiative.
On va finir le tour de table des initiatives avec Laïla et la partie Ladies of Code Paris. Même question : qu’est-ce que Ladies of Code Paris ?
Laïla Atrmouh : Ladies of Code Paris est une initiative qui vise, comme je disais plus tôt, à encourager les femmes à s’orienter vers une carrière technique et à y rester. Donc on est une communauté qui est assez diverse dans la mesure où, initialement, il y avait beaucoup de développeuses seniors dans différentes technologies, soit des développeuses PHP, JavaScript, il y avait quand même une belle représentativité des technos. Mais là, avec les derniers meet-up qu’on a pu organiser, on a eu de plus en plus de personnes qui sont en reconversion, qui rejoignent la communauté justement pour avoir des conseils sur leur progression ou même des personnes qui sont intéressées par une reconversion et qui demandent des conseils justement sur quelle formation choisir aujourd’hui dans un écosystème où on retrouve énormément d’organismes qui forment au métier de développeuse.
Sa fonction c’est vraiment d’accompagner toutes les personnes qui nous rejoignent et les aider du mieux qu’on peut pour s’épanouir dans leur carrière de développeuse.
Frédéric Couchet : Concrètement vous organisez quoi ? Vous organisez de formations ? Des rencontres ?
Laïla Atrmouh : Il y a eu un avant et après confinement, je ne vais pas le cacher.
Frédéric Couchet : J’imagine.
Laïla Atrmouh : Avant le confinement c’était beaucoup de rencontres à Paris, forcément, on est basé à Paris. On a déjà organisé des apéros juste complètement informels où, en fait, l’idée c’était juste de nous rencontrer, d’échanger sur nos quotidiens et d’éventuelles questions que certaines personnes pouvaient avoir sur le métier de développeuse. On a aussi organisé des rencontres un peu plus techniques où c’était des personnes de la communauté qui parlaient d’un sujet qui les temait à cœur. Donc on a eu des conférences sur le design system, la mise en place de design system, la mise en place de tests automatisés pour mieux tester son code, comment mettre en place des tests qui jouent tout seuls, en gros.
On a aussi organisé des workshops sur des technos en particulier, notamment une introduction au langage Go. Donc ça va vraiment dépendre, en fait, des envies qu’il y a au sein de la communauté. parce que ce n’est pas nous, organisatrices, qui allons organiser tous les meet-up, qui allons être speakers sur tous les évènements qu’on organise. On va surtout solliciter la communauté, savoir s’il y a des personnes qui ont envie de parler d’un sujet et qui, du coup, vont le partager à d’autres gens. Ça c’était avant le confinement.
Là, depuis le confinement, on a arrêté les apéros, évidemment. Par contre, on a continué les meet-up techniques où là, on les diffuse, en fait on fait un live sur YouTube. D’ailleurs c’est même pratique pour certaines parce que, du coup, celles qui ne peuvent pas venir à l’évènement peuvent le regarder plus tard quand elles sont dispos vu que c’est enregistré sur YouTube.
Frédéric Couchet : D’accord. J’ai vu sur votre site que vous vous vous proposiez aussi d’aller voir les élèves en collège et lycée pour parler des métiers de la programmation.
Laïla Atrmouh : Absolument. C’est quelque chose, une activité pré-confinement qu’on aimerait beaucoup relancer. Pour l’instant on a un tout petit réseau de lycées, seulement, mais notre ambition serait d’aller voir aussi des collèges dans un futur plus ou moins proche.
L’idée c’est qu’on va intervenir dans des classes pour leur parler du métier de développeur, raconter nos parcours. La dernière fois qu’on l’a fait il y avait moi qui ai un parcours très classique, j’ai tout de suite su ce que je voulais faire, il y avait une autre personne qui a fait une reconversion. Pour le coup, c’est intéressant d’avoir une diversité d’histoires, justement ça montre aux élèves qu’on n’est pas obligé de se décider là, à 17 ans, tout de suite OK, que son futur sera ça, et les faire signer pour une formation à jamais. C’est vraiment montrer que c’est un métier qui peut être atteint via différents chemins, on n’est pas obligé d’aller par la voie classique de l’école d’ingénieur. On peut très bien faire une autre école, l’essentiel est d’aimer ça en fait, tout simplement. Ce sont souvent des échanges très intéressants avec les élèves.
Frédéric Couchet : Justement, on va parler de ça. Je vais juste citer le site web de Ladies of Code Paris, c’est ladiesofcodeparis.netlify.app. C’est bien ça ?
Laïla Atrmouh : Absolument, c’est ça.
Frédéric Couchet : Bien sûr on mettra toutes les références sur april.org et sur causecommune.fm. Là on a fait une présentation de vos structures. J’aimerais bien vous faire réagir sur quelques termes que vous avez employés tout à l’heure et qui me paraissent être importants dans la programmation : le terme de créativité, l’importance de l’erreur et de l’échec dans la progression, le fait qu’on peut travailler chez soi, je crois que c’est Laïla qui parlait tout à l’heure du temps passé sur écran pour faire des choses qui ne sont pas forcément utiles alors qu’on pourrait le faire. Est-ce que vous pourriez nous expliquer, en tout cas nous faire comprendre la spécificité de la programmation par rapport justement à l’échec, par rapport à la créativité, par rapport au fait de travailler tout seul ? Ça me paraît essentiel par rapport à ce que vous dites. Chloé.
Chloé Hermary : Effectivement, ce sont trois choses sur lesquelles il faut insister.
La première, qui me tient énormément à cœur, c’est le droit à l’échec, parce que je pense, pour le coup, que c’est vrai dans la programmation, c’est vrai dans l’apprentissage. C’est d’ailleurs très peu porté par le système traditionnel français, malheureusement. Ensuite l’orientation parce que toute sa vie, finalement, on fait du test and learn sur son orientation. Je souligne ça parce que c’est un point qui me tient énormément à cœur c’est le droit à l’erreur, pas l’échec, on va dire le droit à l’erreur parce qu’on apprend énormément de ça.
Effectivement la programmation, en fait il faut savoir qu’on a de très grandes chances que sa première ligne de code ne soit pas bonne, d’avoir des erreurs, etc. ; quand on code, on va en avoir beaucoup avant de sortir un programme correct qui sera un bon résultat, écrit correctement, etc. Il va y avoir beaucoup d’erreurs qui vont être faites jusque-là et ce n’est pas grave. Il faut qu’on continue à avancer. C’est vraiment une discipline qui valorise le test and learn, ce que je trouve très intéressant, je trouve que c’est une très bonne pratique qui apprend pour la vie, au sens large dont je parlais.
Ça nécessite de la créativité parce qu’en fait un programme, finalement, c’est la solution machine, la solution informatique à un problème de la vie réelle, qui est rencontré par des utilisateurs, des utilisatrices. En fait, quand on programme on résout un problème. Du coup, ça va nécessiter une créativité, ça veut dire qu’on va devoir se triturer le cerveau pour trouver une solution. Ça veut dire aussi que notre solution va être très personnelle, il n’y a pas vraiment de bonne réponse, en fait. Du coup, différentes personnes vont pouvoir trouver une solution différente et ça aussi c’est très créatif dans la programmation, c’est qu’on a le droit d’avoir un style, on a le droit d’avoir une interprétation du problème et on a le droit de le résoudre à sa manière.
Ensuite on parlait de la dimension sociale, de la programmation sociable. En fait, les métiers de développeur – je ne suis pas développeuse donc je laisserai peut-être Laïla reprendre après – sont des métiers qui sont collectifs. C’est très rare, dans la vie d’une entreprise, d’avoir un seul développeur ou une seule développeuse. On code à plusieurs. Son code c’est de la matière, j’aime dire que c’est une matière organique qui passe de main en main, donc on doit penser aux autres, à sa ré-utilisabilité on pourra dire, à la belle technique, à bien documenter, etc. Donc on va rarement coder seul dans son coin, pour soi, on va coder pour d’autres personnes. Pour nous c’est aussi un outil qui est vraiment social, la programmation.
Frédéric Couchet : D’accord. Je précise juste qu’il ne nous reste que quelques minutes, trois-quatre minutes. Laïla, est-ce que tu veux compléter sur cette partie-là ?
Laïla Atrmouh : Oui, absolument. Je suis complètement avec ce qu’a dit Chloé, le droit à l’erreur qui est à la base, je pense, dans la programmation. Justement je constate beaucoup, dans les workshops que j’ai pu faire, qu’il y a une vraie peur des apprenants, parfois, de taper une ligne de code, « mais qu’est-ce qui se passe si ça ne marche pas ? ». J’ai tendance à dire « ce n’est pas grave, ton ordinateur ne va pas s’enflammer. Tout va bien, ça va bien se passer. » Au contraire, c’est une manière de voir que ça ne marche pas, en fait. Tu n’échoues jamais, tu vois juste que ça ne marche pas, c’est un constat.
Je te rejoins aussi totalement sur la notion d’activité sociale. D’ailleurs, je pense que c’est un point qu’on n’a pas assez mentionné justement dans les formations plus classiques : le fait d’écrire du code pour les autres. Au final, faire du code qui est interprétable par la machine c’est facile, mais par d’autres êtres humains c’est un peu plus complexe. Donc clairement, je te rejoins partout là-dessus. Et sur la créativité, il y a vraiment un côté amusement où, en fait, la programmation c’est aussi, un peu, donner libre cours à son imagination avec la possibilité de vraiment faire des choses chouettes, que ce soit des enfants, des adultes, il y a moyen de s’amuser à tout âge.
Frédéric Couchet : Sonia, est-ce que tu veux réagir sur ce point avant que je passe à la dernière question collective ?
Sonia Edouardoury : Vraiment juste de manière rapide, je pense que tout normalement on apprend par les erreurs et que l’échec, que ça soit à travers un jour le code ou même dans sa carrière, changer c’est une manière de se redéfinir et d’être plus fort par rapport à ce qu’on fait, de manière générale.
Frédéric Couchet : D’accord. Super. Je suis désolé mais le temps file et nos deux invités suivants viennent de s’installer dans le studio tout à fait discrètement. Je pense que vous ne les avez pas entendus.
En tour de table final, j’aurais envie de vous demander si vous avez des conseils de lectures, des podcasts à conseiller, ou si vous avez une actualité particulière ou des besoins. Vous avez chacune une minute pour ce tour de table final. On va commence par Chloé Hermary.
Chloé Hermary : J’adore, j’ai deux lectures à conseiller : d’abord une lecture d’Isabelle Collet sur le domaine, qui s’appelle Les oubliées du numérique, qui est vraiment hyper-accessible, engagé, drôle, etc., et facile à lire. C’est féministe et à la fois la place des femmes dans l’informatique. Ensuite il y a un autre livre qui arrive, de bell hooks, qui s’appelle Tout le monde peut être féministe. Je trouve que ça casse un petit peu ce mot qui fait peur, qui effraie et elle l’explique très bien, de manière positive, ludique, etc., ce qu’est le féminisme. Ça c’est un petit peu pour les lectures confinement que je recommande aux gens.
Sinon, notre actualité, c’est qu’on fait trois rentrées par an, on vient de passer une rentrée en octobre, il y a également une rentrée en janvier et en mai. Si des auditeurs ou auditrices sont ou connaissent des personnes qui cherchent à se former en informatique dans un cadre accueillant, bienveillant et accessible, envoyez-les-nous à adatechschool.fr, les candidatures sont ouvertes. Il n’y a pas de prérequis techniques, on recrute des personnes pour leur projet, pour leur motivation, pour leur persévérance, pour tout plein d’autres compétences, mais pas le fait d’être déjà un geek ou une geekette de la première heure. C’est ouvert à tout le monde.
Frédéric Couchet : Merci Chloé.
Laïla Atrmouh, un mot de conclusion, une minute de conclusion.
Laïla Atrmouh : J’ai une recommandation à faire, c’est un podcast si jamais vous êtes intéressé par le domaine du développement, c’est un podcast anglophone qui s’appelle Ladybug Podcast où ce sont trois développeuses qui vont aborder différents sujets liés la programmation. En podcast francophone j’ai aussi Artisan Développeur que j’écoute beaucoup, qui va interviewer différentes personnes justement toujours autour du métier de développement et même discuter de pratiques qu’il peut mettre en place dans sa vie professionnelle à lui, notamment sur la déconnexion qu’il a tentée. Il a tenté une déconnexion pendant dix jours, en fait, de son téléphone, etc. C’est un podcast vraiment très intéressant si vous êtes intéressé, justement, par le domaine du développement, c’est chouette à écouter.
En termes de notre actualité, on continue, malgré le confinement, à organiser des évènements, donc vous pouvez nous suivre via notre site web sur nos prochains évènements et on lance notamment notre réseau de mentoring. L’objectif c’est de repérer des développeuses entre elles pour s’entraider sur des problématiques. Si jamais vous êtes intéressée par le contexte, n’hésitez pas à nous contacter par mail, notre adresse est sur notre site web.
Frédéric Couchet : Merci Laïla. Tu m’enverras les références pour les podcasts, on les rajoutera sur le site web de la radio.
Laïla Atrmouh : Avec plaisir.
Frédéric Couchet : Puisque je ne les connais, j’aurai de nouveaux podcasts à écouter.
Sonia Edouardoury de Django Girls Paris, c’est à toi.
Sonia Edouardoury : En soi rien de particulier, je pense qu’il y a beaucoup de choses. Plutôt par rapport à mon expérience j’ai découvert récemment un workshop qui s’appelle Haynes Workshop Data sur des gens qui sont intéressés par tout ce qui est data science. Il font beaucoup de workshops pour les gens qui sont intéressés et je pense que ça peut être quelque chose d’intéressant pour quelqu’un qui cherche dans ce domaine.
Et puis, bien évidemment, Django Girls Paris, mais aussi d’autres villes en France. Si vous voulez en savoir plus, sachant qu’aujourd’hui quelqu’un avait posé la question pendant le showroom, la manière dont on le fait c’est à distance, en utilisant diverses formes de moyens, ce qui est possible. La dernière fois c’était en utilisant Discord Zoom, ce qui est pratique pour tout le monde à utiliser et ça se fait aussi bien que si c’était, on va dire, en présentiel. Donc c’est ce qui se fait. On continue de le faire comme d’habitude. Voilà ce qui est fait en ce moment.
Frédéric Couchet : Merci. Vous avez les félicitations de Marie-Odile qui dit merci à ces trois femmes on peut dire brillantes. Effectivement je confirme. En tout cas c’était un plaisir de vous avoir. N’hésitez pas si vous avez des actualités ou si, à un moment, vous voulez parler d’autre chose à la radio, vous êtes les bienvenues. C’était Chloé Hermary de Ada Tech School, Laïla Atrmouh de Ladies of Code Paris et Sonia Edouardoury de Django Girls Paris. Je vous souhaite une belle fin de journée à toutes les trois et à bientôt.
Chloé Hermary : Belle journée à vous aussi.
Laïla Atrmouh : Merci beaucoup.
Sonia Edouardoury : Au revoir.
Frédéric Couchet : On va faire une pause musicale cher réalisateur.
[Virgule sonore]
Frédéric Couchet : On va continuer avec l’eau, la glace, on va écouter Glacier zone par Glaciære et on se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.
Voix off : Glacier zone par Glaciære.
Frédéric Couchet : Nous venons d’écouter Glacier zone par Glaciære, disponible sous licence libre Creative Commons Attribution. Vous retrouverez les références sur april.org et sur causecommune.fm.
Vous écoutez toujours l’émission Libre à vous ! sur radio Cause Commune, la voix des possibles, 93.1 FM et en DAB+ en Île-de-France et partout dans le monde sur le site causecommune.fm.
Nous allons passer au sujet suivant.
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Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » d’Antanak sur le thème « Comment libérer son téléphone »
Frédéric Couchet : « Que libérer d’autre que du logiciel », c’est la chronique d’Antanak. Isabelle Carrère et d’autres personnes actives de l’association Antanak se proposent de partager des situations très concrètes et/ou des pensées de mise en acte et en pratique au sein du collectif — reconditionnement, baisse des déchets, entraide sur les logiciels libres, appropriation du numérique par tous et toutes.
Aujourd’hui, Isabelle et Freco vont nous parler à nouveau de téléphonie mobile et de liberté, la suite de leur chronique du 13 octobre 2020. Et je remercie évidemment Antanak de nous accueillir aujourd’hui dans le studio décentralisé.
Bonjour Isabelle.
Isabelle Carrère : Bonjour.
Frédéric Couchet : Bonjour Freco.
Freco : Bonjour Fred.
Frédéric Couchet : Je vous laisse la parole.
Freco : Comment libérer son téléphone. Le mois dernier, lors de la chronique Antanak intitulée « téléphones et vie privée », on avait parlé de l’important niveau de données que les géants du Net peuvent recueillir sur nous et on avait conseillé, pour s’en protéger, d’utiliser les applications et les systèmes d’exploitation libres.
Aujourd’hui, on va s’intéresser plus concrètement aux différentes possibilités de libérer son téléphone.
Pour reprendre les systèmes d’exploitation basés sur Android libre, on a cité le plus connu, Lineage, ainsi que /e/ qui est basé sur Lineage, mais avec les services Google MicroG, permettant d’utiliser les services Google sans le flicage.
Isabelle Carrère : Quand tu parles de services Google, tu parles de quoi, en fait ? D’applications spécifiques ? Tu peux donner des exemples là-dessus ?
Freco : Les services Google sont des programmes de Google, utilisés par certaines applications. C’est le cas de Waze qui utilise Google Maps pour la navigation.
Isabelle Carrère : OK. Tu as dit « sans le flicage », c’est pour de bon ? En quelques mots peux-tu dire de quoi il s’agit d’un point de vue technique, cette capacité d’utiliser des services sans en avoir les problèmes de surveillance et de pistage
Freco : En gros, MicroG simule les services Google, mais plutôt que de donner des informations personnelles de l’utilisateur à Google, il donne, en fait, de fausses informations, comme un mot rempli d’espaces à la place du nom, du lieu où vous vous trouvez.
Isabelle Carrère : OK ! C’est ça l’origine des fausses informations dont on parle tant ?
Freco : Oui, c’est ça !
Isabelle Carrère : En fait, les développeurs et les développeuses de ces systèmes ont prévu comme des paravents, c’est ça ?, avec l’envoi d’informations diverses et ça c’est inclus dans les systèmes d’exploitation dont on parle là ?
Freco : Oui, c’est MicroG qui a cette fonction. MicroG qui est, par défaut, intégré et paramétré dans le système /e/.
Isabelle Carrère : OK. Et on peut les installer sur beaucoup d’appareils tous ces systèmes d’exploitation ?
Freco : Pour Lineage il y a plusieurs centaines d’appareils compatibles si on prend aussi en compte les anciennes versions qui ne sont plus mises à jour aujourd’hui. Pour /e/ une centaine d’appareils est actuellement supportée.
Isabelle Carrère : Et l’installation se fait facilement ?
Freco : Pour la partie installation, le site de Lineage et ses tutoriels ne sont pas forcément orientés grand public. Par rapport aux ordinateurs, il y a des spécificités propres aux téléphones. Pour résumer cette partie technique, je dirais juste qu’à l’allumage du téléphone, un programme de sécurité appelé bootloader, ou chargeur de démarrage, permet de lancer le système d’exploitation Android sans que l’on puisse le modifier. En cas de problème de démarrage, ce bootloader va automatiquement lancer le recovery, le programme de dépannage, qui permet d’en savoir plus sur la panne et de pouvoir éventuellement réinitialiser le téléphone.
Pour l’installation manuelle d’un nouveau système, la première étape est donc de déverrouiller le bootloader afin de pouvoir installer autre chose. Cette étape varie beaucoup suivant le fabriquant du téléphone. En effet, cela peut varier d’une simple ligne de commande à plusieurs jours d’attente d’un code de déverrouillage fournit par le fabriquant, après avoir rempli un questionnaire.
Isabelle Carrère : Il ne faut pas confondre ce déverrouillage avec celui qu’on fait pour utiliser n’importe quel opérateur sur le téléphone ! C’est le même mot mais ce n’est pas le même concept.
Freco : Oui, tu fais bien de le préciser, cela n’a rien à voir avec le verrouillage d’un téléphone par un opérateur. C’est bien le verrouillage du système Android par le fabriquant.
Une fois déverrouillé, la deuxième étape consiste à remplacer le programme de dépannage initial, le recovery, par un autre permettant l’installation d’un nouveau système d’exploitation, ce qui se fait généralement à partir de son ordinateur relié au téléphone avec un câble USB.
Isabelle Carrère : OK ! C’est quand même un peu technique. Il faut donc avoir avec soi le téléphone en question, la connectique qui va bien et un ordinateur. C’est sur l’ordinateur qu’on a téléchargé le système dont tu parles et, qu’ensuite, on va copier sur le téléphone. C’est ça ?
Freco : Oui. D’ailleurs il faut avoir un câble USB qui transmet bien les données, bien sûr, et qui est en bon état.
Voilà pour la troisième étape. À partir de ce nouveau recovery fraîchement installé, on peut supprimer l’ancien système du téléphone et en copier un nouveau.
Dans le cas de Lineage, ne pas oublier que c’est uniquement à ce moment-là qu’il est possible de rajouter des services Google, toujours de la même façon, en copiant un fichier depuis son PC.
Isabelle Carrère : Si tu ne le fais pas à ce moment-là, après c’est trop tard ?
Freco : Si, entre-temps, tu as lancé le système d’exploitation, oui, c’est trop tard, il faudra écraser puis ré-installer le système.
Après, il y a quelques spécificités suivant les marques, comme Samsung où il faudra utiliser un logiciel permettant le déblocage et la copie des fichiers, ce qui facilite, du coup, l’installation.
Par contre, la marque chinoise Huawei ne permet plus le déblocage du bootloader de ses téléphones depuis l’été 2018, il est donc malheureusement impossible de libérer votre téléphone Huawei s’il n’a pas déjà été débloqué.
Isabelle Carrère : C’est intéressant. C’est un choix précis de la part de cette marque… Tu dirais que c’est en plein cœur de la politique commerciale, mais aussi sécuritaire, dans le sens de surveillance, pour empêcher les personnes de se libérer de services qui sont jugés comme obligatoires ?
Freco : Officiellement, ils ont justifié ce choix pour des raisons de sécurité, mais on peut supposer que c’est plutôt pour s’assurer la maîtrise des informations privées. Et cela concerne aussi, bien sûr, la marque Honor, sous-marque de Huawei.
Vous trouverez plus de détails techniques sur la démarche d’installation toujours sur le pad Chapril que vous retrouverez en commentaire de la vidéo. Le but étant de pouvoir prendre du recul sur les tutoriels d’installation de Lineage, très précis, qui sont en anglais, donc de bien comprendre ce que l’on fait.
Après, pour quelqu’un qui n’a pas peur d’installer une distribution GNU/Linux sur PC, comme toujours, la première fois est spécialement engageante. Après, ça va !
Isabelle Carrère : C’est le sujet d’ateliers que l’on avait réalisés l’année dernière à Antanak, et que l’on pourra sans doute refaire prochainement.
Freco : Exactement. Ça avait intéressé pas mal de monde et on pourra le refaire après le confinement !
Isabelle Carrère : Je crois qu’il y a vraiment une demande parce que les gens se demandent s’il est prudent de se lancer là-dedans, tout seul, toute seule, dans cette procédure.
Freco : Bien sûr, il ne faut pas faire n’importe quoi. Oui, contrairement aux ordinateurs sur lesquels on peut toujours revenir en arrière. Si on installe le mauvais fichier, correspondant à un autre modèle, cela peut poser problème et bloquer définitivement le téléphone. On parle alors de « briquer » le téléphone, c’est-à-dire le transformer en un magnifique presse-papier !
Isabelle Carrère : C’est ça ! À Antanak on a l’habitude. Effectivement, on peut toujours de reformater un disque, sur un PC et puis c’est reparti. On peut recommencer une installation plusieurs fois. Je comprends mieux pourquoi tu insistais sur le code name, l’identifiant de chaque sous modèle.
Freco : Bien sûr, pour ces étapes, prenez bien votre temps et suivez bien les instructions ! Ni Antanak, ni l’April ne seraient tenues responsables de quelconques problèmes survenant sur votre matériel !
Pour vous aider, il y a toujours des groupes d’utilisateurs de logiciels libres qui peuvent vous accompagner lors de l’installation. N’hésitez pas à les contacter ! Même si aujourd’hui il est difficile d’organiser des évènements publics sur le sujet, il est toujours possible de s’entraider à distance, en visio ou par téléphone. C’est toujours plus rassurant de se lancer là-dedans avec l’appui d’une personne plus expérimentée.
Isabelle Carrère : Tu as parlé de Lineage, du coup pour /e/ c’est la même chose ? C’est la même procédure d’installation ?
Freco : Pour la plupart oui, mais ils commencent à proposer leur nouvel installateur automatique sur sept appareils déjà, ce qui permet une installation aussi simple que celle d’une distribution GNU/Linux sur PC. Il vous faut juste « cliquez sur suivant – patientez – appuyer sur tel bouton – cliquez sur suivant » et voilà !
Isabelle Carrère : OK ! On augmente encore les capacités de dégooglisation !
Freco : Le fait que les tutoriels soient en anglais, qu’il soit nécessaire de rentrer des lignes de commande peut effrayer certains.
Isabelle Carrère : Du coup, les personnes qui n’ont pas envie de modifier, de changer leur système d’exploitation sur leur téléphone ou qui ont besoin de changer de téléphone, est-ce qu’on peut maintenant acheter un téléphone — je crois que oui —, soit neuf soit reconditionné, avec déjà un système libre installé ?
Freco : Oui, cette année d’ailleurs plusieurs téléphones commencent à sortir avec des systèmes d’exploitation libres pré-installés, cela fait longtemps que l’on attendait ça. Ils sont listés à la fin du premier lien indiqué sur le pad.chapril. Pour le grand public, la solution la plus facile serait de passer par le site e.foundation pour acheter un téléphone reconditionné avec /e/ pré-installé, ou même acheter un téléphone neuf disponible avec /e/ préinstallé, le Fairphone 3.
Isabelle Carrère : OK. Après ces installations ou ces acquisitions-là, on a un beau téléphone complètement libéré, mais est-ce qu’on est sûr que l’on est à 100 % de logiciels libres dessus ?
Freco : Juste certains pilotes matériels peuvent être non-libres. Pour le 100 % libre, il faut s’orienter sur Replicant. C’est avec ce système que vous avez la plus grande garantie de liberté, et si un périphérique n’a pas de pilote libre, alors il n’est tout simplement pas utilisable. Suivant les modèles, il faudra parfois se passer de certaines fonctionnalités comme le Bluetooth, le GPS ou le wi-fi.
Voilà pour les systèmes libres basés sur Android.
Isabelle Carrère : Parce qu’on peut aussi installer des systèmes non basés sur Android.
Freco : Oui. Il existe des systèmes basés entièrement sur GNU/Linux. On aura plus de temps pour en reparler lors d’une prochaine chronique.
Isabelle Carrère : Ça marche. Donc rendez-vous en décembre pour la prochaine chronique.
Freco : C’est noté !
Frédéric Couchet : Merci.
C’était donc la chronique d’Antanak par Isabelle et Freco et on a déjà parlé plusieurs fois de Replicant, LineageOS, notamment avec Aurélien Couderc et Paul Kocialkowski, je ne me souviens à quelle date c’était, mais vous retrouverez ça sur causecommune.fm et sur april.org. Et je remercie Antanak de nous accueillir exceptionnellement aujourd’hui dans le studio décentralisé parce qu’il y a des travaux dans le studio principal.
Isabelle Carrère : Avec plaisir.
Frédéric Couchet : Nous allons passer à quelques annonces rapides.
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Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre
Frédéric Couchet : Très rapidement parce qu’on va arriver à la fin de l’émission.
Il y a quand même des réunions qui se passent actuellement, à distance, notamment la réunion du groupe de travail Sensibilisation de l’April, chaque jeudi à partir de 17 heures 30, ça se passe à distance. Vous pouvez y participer, vous vous rendez sur april.org.
La semaine dernière Vincent Calame nous avait parlé des Soirées de conversation autour du Libre organisées par le groupe d’utilisateurs et utilisatrices parisien Parinux, parinux.org. La première se passe toujours jeudi aussi de 20 heures 30 jusqu’à 23 heures et c’est Vincent Calame qui interviendra pour présenter un outil qu’il développe. Ça permet de participer à distance à ces Soirées de contribution au Libre.
Vous retrouvez tous les autres évènements du Libre sur agendadulibre.org.
Notre émission se termine.
Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission : Véronique Bonnet, Chloé Hermary, Laïla Atrmouh, Sonia Edouardoury, Isabelle Carrère, Freco.
Aux manettes de la régie aujourd’hui Olivier Grieco, le directeur d’antenne de la radio.
Merci également à l’équipe podcast : Sylvain Kuntzmann, Antoine, Samuel Aubert, Olivier Humbert, Élodie Déniel-Girodon, Quentin Gibeaux et Christian Momon qui se relayent pour traiter le podcast et le découper.
Vous retrouverez sur april.org et sur causecommune.fm toutes les références utiles et on va en ajouter parce que d’autres références ont été ajoutées, notamment le lien vers le pad Chapril, parce que, évidemment, ce n’est pas forcément tout à fait facile de le noter, comme ça, en direct.
N’hésitez pas également à nous contacter si vous avez des questions, des remarques ou autres.
Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission.
Si vous avez aimé cette émission n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous. Faites également connaître la radio Cause Commune, la voix des possibles. Il y a de super émissions sur la radio. Il y a notamment Isabelle qui parle d’habitat très régulièrement, donc allez sur causecommune.fm.
La prochaine émission aura lieu en direct mardi 17 novembre 2020 à 15 heures 30. Notre sujet principal aura pour thème « Au cœur de l’April confinée », une présentation d’actions, groupes de travail de l’April et des échanges. On vous parlera aussi des coulisses de l’émission Libre à vous !. Si d’ici là vous avez des questions ou remarques, n’hésitez pas, rendez sur april.org ou sur causecommune.fm pour trouver le moyen de nous contacter. Posez-nous toutes vos questions, on y répondra le 17 novembre et il y aura une deuxième émission le 1er décembre 2020.
Nous vous souhaitons de passer une belle fin de journée. On se retrouve en direct mardi 17 novembre et d’ici là, portez-vous bien.
Générique de fin d’émission : Wesh Tone par Realaze.