Émission Libre à vous ! diffusée mardi 11 janvier 2022 sur radio Cause Commune


Voix off : Libre à vous !, l’émission pour comprendre et agir avec l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.

Isabella Vanni : Bonjour à toutes. Bonjour à tous. J’espère que vous avez passé de belles fêtes de fin d’année malgré le contexte sanitaire. Libre à vous ! est de retour sur la radio Cause Commune.
Notre sujet principal porte aujourd’hui sur le thème « Contribuer au Libre », avec également au programme la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak, consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs », et la chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture » de Marie-Odile Morandi sur le thème « Le numérique que nous voulons ».
Nous allons parler de tout cela dans l’émission du jour.

Soyez les bienvenus pour cette nouvelle édition de Libre à vous !, l’émission qui vous raconte les libertés informatiques, proposée par l’April, l’association de promotion et de défense du logiciel libre.
Je suis Isabella Vanni, coordinatrice vie associative et responsable projets à l’April.

Le site web de l’émission est libreavous.org. Vous pouvez y trouver une page consacrée à l’émission du jour avec tous les liens et références utiles et également les moyens de nous contacter. N’hésitez pas à nous faire des retours ou à nous poser toute question.

Nous sommes mardi 11 janvier 2022, nous diffusons en direct, mais vous écoutez peut-être une rediffusion ou un podcast.
À la réalisation de l’émission aujourd’hui mon collègue Frédéric Couchet. Bonjour Fred.

Bonjour Frédéric : Bonjour Isa. C’est un plaisir de réaliser ma première émission pour toi et j’espère être à la hauteur. Bonne émission à toutes et tous.

Isabella Vanni : Je l’espère moi aussi, bien évidemment. Nous vous souhaitons une excellente écoute.

[Jingle]

Chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs » (rediffusion de la chronique du 12 octobre 2021)

Isabella Vanni : Nous allons commencer par la chronique « Que libérer d’autre que du logiciel » avec Antanak consacrée au thème « L’écrasement des données sur les disques durs ». Il s’agit d’une rediffusion d’une chronique qui a été diffusée en direct le 12 octobre 2021.
Je vous propose d’écouter ce sujet et on se retrouve juste après.

[Virgule sonore]

Frédéric Couchet : « Que libérer d’autre que du logiciel », la chronique d’Antanak. Isabelle Carrère et d’autres personnes actives de l’association Antanak se proposent de partager des situations très concrètes et/ou des pensées, mises en actes et en pratique au sein du collectif – le reconditionnement, la baisse des déchets, l’entraide sur les logiciels libres, l’appropriation du numérique par toutes et tous. Le sujet du jour : l’écrasement des données sur les disques durs.
Bonjour Isabelle.

Isabelle Carrère : Bonjour Fred. Bonjour à tous et toutes.

Frédéric Couchet : Vous écrasez les données, c’est ça ?

Isabelle Carrère : Justement, c’est un vrai problème. Je suis contente parce que je suis sur la droite ligne de ce qu’on vient d’entendre avec tes invités précédents, je ne suis pas trop décalée puisque vous parliez de droit à la réparation. Quand on dit droit à la réparation, à l’intérieur de ce droit, on devrait pouvoir parler aussi de droit à la réutilisation.
Pourquoi parle-t-on là de la question de l’écrasement des données ? Pourquoi utilise-t-on ce terme ?
Tout le monde sait bien que quand on veut simplement se débarrasser d’informations sur son disque, il ne suffit pas tout à fait de les mettre à la corbeille et de vider la corbeille, évidemment les données restent là. En fait, on n’efface jamais un disque dur, on n’efface pas les données. Il y a quatre façons de faire.
Soit on écrase, effectivement, et écraser des données ça veut dire qu’on va réécrire sur tous les secteurs d’un disque dur et on utilise des outils qui sont faits pour ça. Nous en avons certains, des outils libres, mais qui n’ont absolument pas de certificat. C’est-à-dire qu’on fait des passes, plusieurs passes d’écriture de 1, 0, 0 1, de manière aléatoire. La logique veut qu’on en fasse trois a minima, sept quand ce sont vraiment des choses un peu lourdes ou des données archi-confidentielles, etc., mais tout ceci sans certificat.
Il y a d’autres façons de faire : nous voyons des gens qui font de la destruction physique ou du déchiquetage, là ça veut dire qu’on détruit le matériel, on détruit les disques durs. Plusieurs entreprises proposent de donner à Antanak des ordinateurs, mais sans disque dur, parce qu’elles disent « nous n’avons pas le temps de nous occuper des données, on ne veut pas vous les donner, donc on va détruire physiquement nos disques durs ». Ce n’est pas génial pour la réutilisation parce que, après, il faut trouver d’autres disques durs à mettre dessus, ce qui pousse, là aussi, favorise la production, surproduction permanente de nouveaux matériels, l’extraction des matériaux qu’il faut réaliser, etc., bref une catastrophe
L’autre façon de faire c’est du formatage, mais là c’est pareil, avec le formatage, en fait, on sait qu’on cache les données quand on formate le disque dur, on ne les écrase pas vraiment.
Il y a aussi un procédé de démagnétisation qui demande un matériel un peu plus sophistiqué que nous n’avons pas à Antanak et qui, en plus, fonctionne pour les disques durs mais pas pour les SSD qu’on commence à retrouver quand même de plus en plus souvent dans les ordinateurs.

Frédéric Couchet : On va préciser que les SSD sont des disques durs de technologie récente, beaucoup plus rapides, mais aussi beaucoup plus fragiles.

Isabelle Carrère : Voilà, beaucoup plus fragiles, beaucoup plus petits, du coup cette question d’effacement des données est encore plus compliquée.
Du coup, ça fait un petit moment qu’on se pose cette question-là puisque des entreprises, à chaque fois, nous demandent d’effacer leurs données. Certaines entreprises qui nous donnent du matériel font elles-mêmes le travail d’effacer, d’écraser, de purger – chacun dit avec les termes qu’il a – les données que les disques durs contiennent. Nous nous sommes amusés plusieurs fois à faire un petit test avec des outils spécifiques. On a fait un test sur des disques durs qui nous étaient donnés pour être sûrs que les gens avaient réellement fait le travail. En fait, très souvent, on retrouve des fichiers. C’est-à-dire que même des DSI dans des entreprises – les directions des systèmes d’information ou directions des services informatiques –, qui pensent avoir fait le travail, eh bien parfois ce n’est pas complet. C’est pour ça qu’on le refait de toute façon, du coup on a regardé ça. Par contre, quand nous utilisons notre petit outil, Eraser Disk, que nous avons sur une clef, dans la boîte à outils UBCD [Ultimat Boot CD] on constate qu’on a beau aller chercher sur les disques, on n‘arrive pas à retrouver les fichiers en question.
Donc ce qu’on fait est bien fait. Quand on a une entreprise qui nous dit « OK très bien, je vous fais confiance », ça marche, très bien, on garantit qu’on le fait et on le fait.
Mais si une entreprise nous dit « moi j’ai besoin d’un certificat, j’ai besoin de quelque chose par lequel vous m’apportez une preuve matérielle ou, en tout cas, une preuve certifiante », eh bien là on n’a pas. Les seuls outils « sur le marché », entre guillemets, qui donnent une certification de ce type-là sont des outils privateurs, propriétaires, tel que Blancco, UrCube qui fait aussi un partenariat avec Blancco, et on ne va pas utiliser ceux-là, ce ne sont pas des outils libres, en plus ils sont hyper-chers, c’est payant. Tu payes à la fois une licence et après, à chaque fois que tu passes un disque dur dans la machine, tu repayes quelque chose. Il n’en est pas question, donc on est fort embêtés.
Ma chronique d’aujourd’hui avait pour but à la fois de sensibiliser sur ce sujet-là et, en même temps, de faire une espèce d’appel. Quand on a voulu se préoccuper de ce sujet-là, on s’est dit « voyons, vers qui pourrait-on se tourner et quelle serait la bonne façon de faire ? » Les produits en question, par définition, appartiennent à tout le monde puisque ce sont des communautés de libristes qui les ont mis en place, on s’est dit comment pourrait-on faire pour que tout le monde obtienne une certification ? Qu’est-ce que ça signifierait dans le monde du Libre que d’obtenir une certification ?
On s’est aperçu, qu’en fait, il y avait quand même des logiciels libres qui obtiennent des certificats, en tout cas de résultat ou de sécurité ou de choses comme ça. On s’est dit on va s’adresser à l’ANSSI.

Frédéric Couchet : L’Agence nationale de sécurité des systèmes...

Isabelle Carrère : J’allais le dire, j’avais prévu de le dire parce que je savais que tu allais réagir !, Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information. On s’est dit on va leur poser la question, tout bêtement. On est des citoyens, des citoyennes, on va poser la question.
Donc en novembre on a écrit un petit courriel à l’ANSSI : « Bonjour, petite association du 18e arrondissement de Paris, nous menons, entre autres, des activités de reconditionnement de matériels informatiques pour soutenir solidairement la réappropriation numérique et contribuer à la baisse des D3E [Déchets d’équipements électriques et électroniques] via la réutilisation ». On leur explique notre affaire : « Nous sommes confrontés à cette question de l’effacement des données, donc voilà ce qu’on fait, on les écrase, mais on n’a pas de certificat. Qu’est-ce que vous en pensez ? On vient vers vous. Quelle est votre position sur le sujet ? On n’a rien trouvé sur le site — on a vraiment essayé, on a tourné partout dans leur site qui est assez complet, il y a énormément de choses mais rien sur la question de l’écrasement des données —, donc on voulait avoir des informations ». On a envoyé ça à trois adresses courriels différentes qu’on avait trouvées et on a mis un petit mouchard. Hum ! Une des personnes a lu le mail et l’a supprimé immédiatement. On s’est dit bon !, ce n’est pas elle qui va nous répondre ! Une autre a lu le mail puis, silence !, on n’a rien eu. Et l’autre on ne sait pas, elle ne l’a toujours pas ouvert, elle ne devait plus être là.
À part le côté amusant de la chose, on se retrouve avec un vrai problème. Une entreprise nous dit : « J’ai 100 ordinateurs portables pour vous, mais c’est à vous de faire le boulot ». C’est énorme, ils ne se rendent pas compte en fait, ou si, ils se rendent compte, mais ils ne veulent pas le payer, le faire faire, payer la « main-d’œuvre », entre guillemets, pour le faire ou bien ils ne s’en sentent pas les compétences techniques, je n’en sais rien, mais ça nous pose vraiment des soucis.
Du coup on s’est dit que les CESTI, les Centres, ça je ne sais plus, par contre, ce que signifie le sigle.

Frédéric Couchet : Elle me regarde, alors qu’en fait je ne sais pas du tout ce que ce sont les CESTI.

Isabelle Carrère : Tu ne sais pas non plus ? Les CESTI ce sont les centres qui sont agréés par l’ANSSI, par le gouvernement, etc., pour faire ces évaluations de logiciels ou d’équipements, équipements réseau aussi. Par exemple on a une structure comme Oppida ou une autre qui s’appelle Amossys. Bref ! Les CESTI sont des centres qui font ça, qui font, en fait, les évaluations.

Frédéric Couchet : Je l’ai : Centres d’évaluation de la sécurité des technologies de l’information.

Isabelle Carrère : Voilà. Merci ! Donc on s’est dit qu’on peut, peut-être, aller voir vers eux et leur demander comment est-ce qu’on pourrait faire ? Est-ce que ça existe ? Quelle serait la procédure ? Est-ce qu’il y aurait une façon de faire ?
Aujourd’hui ma chronique a pour but d’appeler les auditeurs, les auditrices, les membres de l’April, la foule, que sais-je, tous les gens qui sont autour de ces sujets-là et qui pourraient être intéressés, pour nous aider à monter, je ne sais pas, un groupe de travail, à faire quelque chose là-dessus pour arriver à un résultat. On doit, là aussi à mon avis, saisir les pouvoirs publics sur ce genre de chose. On ne peut parler de réemploi, de réutilisation, si on continue à laisser les entreprises scratcher complètement leurs disques durs sans avoir de possibilité de les réutiliser correctement. C’est un appel.

Frédéric Couchet : C’est un appel qui est lancé. J’espère que tes auditrices et auditeurs pourront y répondre. À notre petit niveau, je peux te proposer de nous transférer ton courriel qu’on va envoyer au directeur de l’ANSSI vu que le directeur de l’ANSSI est venu dans l’émission, donc on a son adresse. C’est quelqu’un de tout à fait sympathique qui saura peut-être le réorienter en interne à l’ANSSI. Par contre, je ne mettrai pas de mouchard pour savoir si le directeur de l’ANSSI a lu le courriel !
Effectivement, les gens qui n’ont jamais fait d’écrasement de données peuvent peut-être penser que c’est très facile, mais, en fait c’est très long, en fonction des outils qu’on utilise ça peut-être très long, il peut y avoir plusieurs phases, donc ça demande aussi de la ressource humaine.

Isabelle Carrère : Ça demande de la ressource humaine pour lancer le processus, après ça tourne tout seul. C’est long parce que selon que ton disque dur a 160 gigas ou un téra, eh bien oui ça peut durer plusieurs heures. Du coup, quand tu en as 100, c’est quand même toute une affaire. Il faut avoir une table énorme. Tu lances toutes tes petites clés UBCD sur tous tes portables, c’est très long. Mais ça, à la limite, on veut bien le faire, ce n’est pas la question. Si derrière l’entreprise dit « et je veux avoir la preuve que », eh bien qu’est-ce que je fais ?

Frédéric Couchet : D’accord. Appel lancé. Transmets-moi le courriel, je l’enverrai au directeur de l’ANSSI sans garantie de résultat, mais au moins j’enverrai le courriel.

Isabelle Carrère : Bien sûr. Très bien. Merci.

Frédéric Couchet : C’était la chronique d’Antanak par Isabelle Carrère sur l’écrasement des données sur les disques durs.
Bonne fin de journée Isabelle et au mois prochain.

Isabelle Carrère : Merci beaucoup.

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Nous voilà de retour en direct après cette première chronique. Pour la précision, Fred a vraiment envoyé le courriel à l’ANSSI, comme promis, mais je crois qu’on n’a toujours pas eu de réponse. C’est ça Fred ?

Frédéric Couchet : Je te confirme. J’ai envoyé un courriel à Guillaume Poupard, mais je n’ai pas eu de réponse. On fera une petite relance en ce début d’année 2022.

Isabella Vanni : Très bonne idée.
Nous allons maintenant faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Après la pause musicale nous aborderons notre sujet principal qui est consacré aujourd’hui au thème « Contribuer au libre »
Pour la première pause musicale, nous allons écouter une chanson hommage à Aaron Swartz qui était militant des libertés informatiques et de la culture libre, convaincu que l’accès à la connaissance est un moyen d’émancipation et de justice. Il s’est suicidé le 11 janvier 2013 à l’âge de 26 ans. Dans l’émission Libre à vous ! 49, de janvier 2020, nous avions consacré une note de lecture du livre de Flore Vasseur Ce qui reste de nos reves consacrée à Aaron Swartz que vous pouvez retrouver sur libreavous.org/49.
Nous allons donc écouter une chanson hommage à Aaron Swartz, d’ailleurs vous écoutez déjà les premières notes, qui date de 2016. Elle s’appelle Aaron par Simon « Gee » Giraudot. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Aaron par Simon « Gee » Giraudot.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter une chanson hommage à Aaron Swartz qui date de 2016, Aaron par Simon « Gee » Giraudot, disponible sous licence libre Creative Commnons CC By SA 2.0 qui permet la réutilisation, la modification, la diffusion, le partage de cette musique pour toute utilisation y compris commerciale, à condition de créditer l’artiste, d’indiquer la licence et d’indiquer si des modifications ont été effectuées. Dans le cas où vous effectuez un remix, que vous transformez ou que vous créez du matériel à partir de cette musique, vous devrez rediffuser votre œuvre modifiée dans les mêmes conditions, c’est-à-dire avec la même licence

[Jingle]

Isabella Vanni : Passons maintenant au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Contribuer au Libre, avec Maiwann pour les Contribateliers et Llaq pour Contribulle

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre par notre sujet principal qui est consacré aujourd’hui au thème « Contribuer au Libre » avec nos personnes invitées : Maïtané Lenoir, alias Maiwann, membre de Framasoft, pour les Contribatetiers, et Le Libre Au Quotidien de Contribulle.
N’hésitez pas à participer à notre conversation sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm bouton « chat ».
Bonjour Maiwann, bonjour Le Libre Au Quotidien ou Llaq.

Maiwann : Bonjour.

Llaq : Bonjour.

Isabella Vanni : Super. Je vous entends tous les deux, c’est déjà une bonne nouvelle.
Merci de participer à l’émission d’aujourd’hui pour parler de ce thème qui nous tient beaucoup à cœur. D’ailleurs notre émission est une émission d’information sur les libertés informatiques qui a aussi envie de donner des idées, des moyens d’action aux personnes qui nous écoutent, donc « Contribuer au Libre » est un thème qui matche très bien avec le but de notre émission.
Pour commencer, je vous propose une question assez classique, je vous propose de faire une courte présentation personnelle et d’indiquer aussi quel est votre rôle dans chacune des initiatives à laquelle vous participez. Maiwann peut-être, veux-tu commencer ?

Maiwann : Oui. c’est parti. Bonjour à toutes et à tous.
Comme tu l’as dit, moi c’est Maïtané ou Maiwann selon qu’on parle de mon pseudo ou de mon prénom. Dans la vie je suis designer, ça veut dire que je parle avec les utilisateurs de logiciels et j’aide à en concevoir. Je passe pas mal de temps à contribuer à des projets qui sont issus soit des communs soit du logiciel libre et je suis membre de Framasoft depuis peut-être trois ans, quelque chose comme ça. Parmi plusieurs choses que je fais à Framasoft j’ai participé à des Contribateliers, j’ai participé un peu à un Contribatelier à Lyon et ensuite j’ai commencé à en lancer à Toulouse puis à Dinan parce que j’ai déménagé au passage, donc j’ai emmené les Contribateliers avec moi.

Isabella Vanni : Merci pour cette première présentation. On a bien compris que tu as participé à des Contribateliers, que tu en as même lancé, on verra plus en détail tout à l’heure.
Llaq ou Le Libre Au Quotidien – je pourrai t’appeler des deux façons au cours de l’émission, pour prévenir nos auditeurs et auditrices – je te laisse la parole pour une courte présentation.

Llaq : Bonjour. Moi c’est Llaq ou Le Libre Au Quotidien. Je contribue au logiciel libre, je fais principalement du développement backend, le backend c’est tout ce que l’utilisateur ne voit pas. Je partage mes connaissances en informatique et sur le logiciel libre sur mon blog et les réseaux sociaux. J’ai découvert le logiciel libre il y a quelques années quand un ami m’a offert un ordinateur pour la première fois sous GNU/Linux alors que j’étais jusque-là assez réfractaire à GNU/Linux.

Isabella Vanni : C’est une belle entrée en jeu. Recevoir un ordinateur sous GNU/Linux, ce n’est pas mal pour commencer ! Par rapport à Contribulle, tu es l’un des fondateurs, on va dire, de cette initiative ?

Llaq : Je ne suis pas un des fondateurs de l’initiative ; j’ai rejoint assez vite l’équipe lors de l’appel à contributeurs de Méli et Maiwann, mais je pense qu’on parlera de ça plus tard.

Isabella Vanni : Tout à fait. Il y a effectivement un lien très étroit entre les Contribateliers qui sont des rencontres initialement physiques et puis, on verra qu’avec la pandémie elles se sont déroulées aussi en ligne, et Contribulle qui est, par contre, un collectif mais aussi et surtout une plateforme, donc un site web qui permet justement de contribuer à des projets autour du Libre. On va voir un petit plus en détail ce dont il s’agit.
Maiwann, je te redonne la parole pour présenter cette fois, brièvement, et après on pourra creuser davantage, ce que sont les Contribateliers, depuis combien de temps ça existe et comment l’initiative est née.

Maiwann : Merci. L’initiative est issue pas mal de l’association Framasoft. On s’est rendu compte, au fur et à mesure du temps, qu’il y avait pas mal d’utilisateurs de logiciels libres mais qu’il n’y avait pas beaucoup de contributeurs. Il y avait cette espèce de gap un peu immense : il peut y avoir vraiment beaucoup d’utilisateurs pour certains logiciels libres, mais le nombre de contributeurs se compte sur les doigts d’une main. On s’est demandé comment on pouvait amener plus de gens, mais aussi des gens qui aient des compétences variées, pas seulement des développeurs qui est un peu la première chose à laquelle on pense – c’est-à-dire pour contribuer à du logiciel libre, il faut savoir développer, il faut savoir faire de la technique –, mais pouvoir brasser plus largement avec des compétences qui soient très différentes.
Framasoft a lancé les premiers Contribateliers, initialement c’était à Lyon. Le premier a eu lieu – j’ai pris des petites notes – le 26 juin 2019. En fait les Contribateliers c’est tout simplement un moment où on se retrouve et où il y a différents types d’ateliers qui sont proposés pour contribuer au logiciel libre ou aux communs, je pourrai y revenir, c’est très varié pour ouvrir à beaucoup de types de personnes différentes. Assez vite Framasoft a essayé de s’en détacher parce que le but n’était pas qu’il y ait encore un nouveau projet Framasoft, mais, au contraire, que ça puisse essaimer, que n’importe qui puisse lancer des Contribateliers, donc on parle de plein de choses variées, des logiciels, pas des logiciels. Aucune connaissance technique n’est requise sur le sujet. Comme tu l’as dit, évidemment vous connaissez l’histoire, c’est un petit peu difficile de se retrouver ces derniers temps, donc les Contribateliers ont un peu muté en Confinateliers, donc on se retrouve aussi en ligne et ça fonctionne de la même façon, il y a des ateliers et on contribue.

Isabella Vanni : Merci. Vous m’expliquerez vous-mêmes davantage, mais je crois que Contribulle, cette plateforme web pour proposer des projets et inviter les personnes à participer, est née d’un Contribatelier ou je me trompe ? Le Libre Au Quotidien, peut-être veux-tu répondre ?

Llaq : Tout à fait. Contribulle est en effet né lors d’un Contribatelier. Pour la petite histoire...

Isabella Vanni : On adore les petites histoires, vas-y !

Llaq : Comme tu as dit, Contribulle est un site qui permet de mettre en relation des projets libres qui cherchent des contributeurs et des personnes qui veulent contribuer. C’est un peu le « Meetic du libre », qui était d’ailleurs le nom de code du projet au départ. L’idée initiale de Contribulle a germé lors du Fabulous Contribution Camp [novembre 2017], un évènement qui a été coorganisé par Framasoft et La Quadrature du Net, qui avait pour but de discuter de la contribution au Libre et où Maiwann était présente. L’idée de Contribulle a été abordée pour la première fois dans ce Fabulous Contribution Camp.
L’idée est restée un peu en stand-by jusqu’à début 2020 quand Méli, qui est designeuse dans le projet, a contacté Maiwann dans le cadre de son master de fin d’études en design et c’est comme ça que Contribulle est né, plutôt ce qui allait devenir Contribulle. Méli et Maiwann ont commencé à chercher des contributeurs lors du deuxième Confinatelier, donc le Contribatelier en ligne. Lors de ce Contribatelier les contributeurs ont commencé à créer le code de Contribulle. Plus tard on a mis en place des réunions hebdomadaires pour avancer la maquette, le design, le code, etc. La première version de Contribulle est sortie en février 2021, ça fait presque un an.

Isabella Vanni : C’est joli. Je n’avais pas en tête les dates, mais c’est effectivement assez récent, presque un an. Merci pour cette première présentation.
Je vous propose d’essayer d’expliquer davantage aux personnes qui nous écoutent comment ça marche. Mettons qu’une personne aimerait bien contribuer, mais justement, comme disait Maiwann, elle n’a pas de compétences techniques donc elle se tâte, elle se dit « finalement je n’ai rien à faire, à part utiliser les logiciels ». Je pense qu’on peut commencer par donner des exemples de projets auxquels vous avez contribué lors des Contribateliers ou lors des Confinateliers et des exemples de projets qu’on peut trouver sur la plateforme Contribulle et auxquels des personnes qui n’ont aucune compétence technique pourraient participer. Ça vous va ? Maiwann, veux-tu commencer ?

Maiwann : Oui. J’ai justement plein d’exemples de choses pour lesquelles il ne faut pas de compétences techniques pour participer, des petits exemples d’ateliers qui étaient proposés aux Contribateliers. Il y avait « imaginez si jamais vous étiez une personne malveillante qui veuille utiliser un logiciel que Framasoft conçoit qui s’appelle Mobilizon » — Mobilizon permet de participer à des évènements et d’avoir plusieurs identités. La designer de Mobilizon avait besoin de savoir comment on pouvait détourner l’usage du logiciel pour poser des problèmes, pour, justement ensuite, améliorer la conception du logiciel pour que ce ne soit plus possible. À un autre moment, moi j’ai appris à sous-titrer des vidéos. La personne a expliqué comment utiliser le logiciel de sous-titrage de vidéo, c’était très intéressant. On peut apprendre à créer des notices Framalibre, des notices pour un logiciel libre, comment on remplit l’annuaire de logiciels libres. Il y a « sélectionner du contenu vidéo qui est sur PeerTube pour le mettre en avant », un logiciel qui propose de mettre en ligne des vidéos. Il y avait aussi un atelier « apprendre à communiquer pour des projets libres », comment fait-on pour communiquer mais pas en reprenant les codes des plateformes qui ont tendance à ne pas avoir les mêmes valeurs que les nôtres, donc comment on réussit tout de même à parler de projets qu’on aime sans reprendre des codes qui sont un peu problématiques. Il y avait aussi des pôles de traduction, de la cartographie. Voilà un petit passage rapide, il y a toujours plein de choses.

Isabella Vanni : Merci. Ça fait vraiment beaucoup de choses. On voit bien que pour contribuer au Libre il ne faut pas être informaticien, informaticienne, il y a vraiment énormément de choses qu’on peut faire aussi sur la plateforme Contribulle. J’ai d’ailleurs envie d’approfondir un petit peu cet aspect. Ce que j’aime bien de cette plateforme c’est que la personne qui choisit, qui se dit j’ai un peu de temps à donner au logiciel libre, peut même filtrer, facilement, par type de compétences. Est-ce que je dis juste Llaq ?

Llaq : Oui, tu dis tout à fait juste. D’ailleurs la fonctionnalité de filtrage des annonces n’était pas là au début de la version bêta de Contribulle. Elle nous a été très demandée, c’est pour cela qu’on l’a faite. Pour répondre à ton autre question à savoir quelques petits exemples de projets qu’il y a sur Contribulle.
Il faut déjà savoir c’est qu’il y a deux types d’annonces sur Contribulle.
Il y a déjà les annonces qui sont publiées par les porteurs et les porteuses de projets, actuellement il me semble qu’il y en a une soixantaine. Les projets qui ont été sélectionnés par l’équipe de Contribulle sont tout en haut de la page, qu’on a appelés « les contributions faciles ». Si une personne veut commencer à contribuer en faisant des trucs très simples, elle peut piocher dans cette liste de projets. Il y a par exemple le projet Common Voice de Mozilla qui consiste à donner sa voix pour construire un moteur de reconnaissance vocale libre. Il y a également « Créer des fiches sur Wikipédia », « Créer des recettes de cuisine sur Cuisine Libre ».
Pour prendre un exemple d’annonce qui a été publiée par des porteurs et porteuses de projets, il y a Open Terms Archive. C’est un projet qui vise à archiver toutes les modifications des CGU, les conditions générales d’utilisation, de centaines et centaines de sites, pour réunir toutes ces données en open data.
Il y a ussi Flus qui est une plateforme en ligne, qui veut simplifier et apaiser la veille numérique, je crois que Maiwann travaille aussi dessus.

Isabella Vanni : Peux-tu répéter, s’il te plaît, le nom de ce deuxième projet dont tu parlais ?

Llaq : Il s’appelle Flus. C’est un outil, une plateforme web qui est, pour le coup, payante, mais qui est libre, qui veut simplifier un peu la veille numérique.

Isabella Vanni : Tu pourras l’expliquer mieux que moi. Tout le monde ne sait pas forcément ce que sont les flux RSS. Ça permet, effectivement, de recevoir, de faire de la veille sur certaines pages, sur certains sites qui nous intéressent. J’avais regardé un petit peu dans cette annonce en particulier et en fait, la personne qui produit, qui développe ce logiciel, demande juste de le tester. Donc c’est finalement quelque chose de très simple que n’importe qui peut faire.
Pour revenir à Commons Voice, là pour le coup si vous avez vraiment peu de temps, que vous avez envie d’apporter votre pierre au logiciel libre, il n’y a rien de plus rapide. Vous pouvez y accéder depuis la plateforme contribulle.org, c‘est le tout premier projet qui est mis en exergue tout en haut, ce dont tu parlais, « les contributions faciles », entre guillemets, et là vous pouvez, par exemple, tout simplement écouter des phrases lues par des personnes comme vous et vous pouvez dire si le niveau de lecture est satisfaisant ou pas, donc aider une intelligence artificielle libre à reconnaître si quelque chose est lu correctement. C’est une aide énorme mais ça prend vraiment une minute. Vous pouvez vous-même prononcer des phrases et, à ce moment-là, d’autres personnes évalueront votre lecture.
C’est marrant parce que tu parles de contributions faciles, je me disais que ce n’est pas mal de mettre en exergue quelques projets comme ça. En ce qui concerne, par exemple, la Cuisine Libre, Wikimedia, Wikipédia et la cartographie, j’ai aussi remarqué que ce sont aussi des projets pérennes, c’est-à-dire qu’on pense, on envisage, on espère que ça durera pour toujours. Merci pour ces premiers exemples.
J’ai envie de demander à Maiwann qui peut organiser un Contribatelier ? Tu nous as dit que tu avais d’abord participé et qu’après tu en as lancé. Comment s’y prendre ?

Maiwann : Je dirais qu’il est important que le principe du projet soit essaimé. En fait, il suffit d’avoir envie pour lancer un Contribatelier. Honnêtement, quand je m’y suis lancée, c’était juste parce que je me suis dit « il n’y en a pas à Toulouse, on pourrait en faire à Toulouse. »
Je peux quand même donner deux/trois petits conseils.
En fait, idéalement, il faut un lieu pour pouvoir accueillir des gens, ce qu’on a un peu appris des Contribateliers de Lyon. Les Contribateliers lyonnais changeaient souvent de lieu, ils prenaient parfois des lieux de coworking, parfois des bars, j’ai l’impression. Ils sont allés parfois dans des bibliothèques. Il y a cette possibilité de changer régulièrement de lieu. À Toulouse nous avons fait un choix différent. Je voulais minimiser le travail d’organisation, du coup je me suis dit OK, pour minimiser il faut un lieu qui puisse nous accueillir de façon récurrente, qui soit ouvert à des horaires qui nous permettent d’accueillir un peu de public soit en journée le week-end, soit le soir, même si le soir c’est un peu compliqué, il m’est arrivé de participer à des Contribateliers, c’est un peu fatigant après sa journée de boulot. Ensuite on a choisi une régularité. Au début je crois que c’était le troisième samedi de chaque mois, quelque chose comme ça.
Pour trouver un lieu, nous avons demandé aux bibliothèques. À Toulouse comme à Dinan on m’a tout de suite dit « oui, c’est super ce que vous proposez, venez ». Elles ont des locaux qui sont faciles d’accès, les parents peuvent venir, laisser leur enfant à côté, contribuer au Libre en parallèle ; il y a du public qui passe, on peut discuter avec, j’ai trouvé ça super.

Isabella Vanni : Excuse-moi. Tu dis que c’était super. Effectivement, ça rend visible l’initiative, donc on peut la promouvoir, la faire connaître à encore plus de monde. Tu as tout à fait raison. Je te redonne la parole.

Maiwann : C’est exactement ça et c’est toujours sympa d’entendre au micro « un Contribatelier se déroule au rez-de-chaussée », comme ça toute la bibliothèque est au courant.
Ensuite il suffit qu’il y ait des gens qui viennent, donc il faut un peu communiquer, il y a des comptes Contribateliers qui sont là pour ça ; avec Framasoft on partage, on essaye de faire un peu de bruit. Et qui vient a potentiellement des choses à proposer. En plus Contribulle peut servir à ça, c’est-à-dire qu’à la fois dans Contribulle et à la fois dans les retours d’expérience des précédents Contribateliers, vous pouvez avoir des idées de choses à faire si jamais vous avez l’impression que ça fait sens. Vous poser avec un ordinateur dans une bibliothèque, avoir d’autres personnes qui écrivent des recettes sur le site de la Cuisine Libre, ce n’est pas très difficile. Ou prendre votre smartphone et aller télécharger une application pour remplir les horaires d’une boutique, c’est StreetComplete, pareil, c’est sur Contribulle en contributions faciles, ce n’est pas très compliqué.
Pour initier le mouvement, il n’y a pas beaucoup de choses à prévoir, peut-être un peu d’anticipation.
Mon dernier conseil quand même, une chose qui est importante, c’est de ne pas commencer seul, moi j’ai commencé seule à Dinan et si ça ne prend pas vous vous sentez un peu isolé, c’est dommage ! Tandis que si vous êtes deux ou trois, au pire vous êtes deux ou trois à vous retrouver, à faire des choses et c’est déjà suffisamment satisfaisant.

Isabella Vanni : Oui, par définition une réunion, une rencontre, c’est au moins deux personnes. Je comprends tout à fait ta préoccupation d’avoir au moins une autre personne avec toi.
Toutes ces astuces que tu es en train de lister sont très utiles. Bien évidemment, comme tu disais, il faut trouver un lieu et ça peut effectivement aider l’organisation d’avoir toujours le même lieu et le même jour dans le mois ou dans la semaine.
Toutes ces astuces, je disais, vous les avez astucieusement listées dans un document qui s’appelle Kit Contribatelier, qui est disponible sur le site contribateliers.org. Si vous avez envie de vous lancer vous aussi dans l’organisation de Contribateliers, je vous recommande vraiment d’aller voir ce kit où, d’ailleurs, vous trouvez aussi une partie qui concerne l’accueil de nouvelles personnes. C’est quelque chose qui est très important, pour moi et pas que, pour tout projet, parce que si la personne est bien accueillie, si elle se sent bien, normalement elle reviendra. C’est quelque chose de fondamental. Il faut qu’elle se sente bien, à l’aise, tout de suite. Je crois qu’il a aussi quelques suggestions concernant justement l’accueil de nouvelles personnes. C’est ça Maiwann ?

Maiwann : Je n’ai pas en tête la totalité du kit. Merci d’en avoir parlé parce que je me suis dit « oh là, là, j’ai oublié le kit, les pauvres copains qui l’ont réalisé ! Ce n’est pas sympa ! ». Effectivement il y a une dimension d’accueil très forte, que ce soit des personnes qui arrivent et, de toute façon vous en aurez toujours, qui disent « je ne sais pas quoi faire et vous savez, moi l’informatique, je ne suis pas très forte ». Donc il faut accompagner les gens, il faut avoir une posture d’ouverture assez forte. C’est vrai que c’est un peu le principe du Contribatelier, ça ne fait trop sens si jamais il n’y a pas ça, en tout cas ça se fait assez naturellement puisque les gens viennent vers vous et qu’ils sont intéressés par ce que vous proposez. Pour le dialogue, il y a toujours quelqu’un qui a une petite anecdote et c’est parti, on intègre les personnes comme ça.

Isabella Vanni : Merci pour ces informations complémentaires.
Je redonne la parole à Le Libre Au Quotidien, Llaq, pour savoir un petit peu, par exemple si j’ai un projet autour du Libre, que ce soit logiciel ou culture libre, comment je fais pour le soumettre sur la plateforme ? Y a-t-il une modération par exemple ? Est-ce que les projets sont soumis à validation avant publication ?

Llaq : Non. Les projets ne sont pas soumis à validation à priori. On a eu une longue réflexion autour de ça pendant nos appels hebdomadaires et on a décidé de ne pas le faire, déjà parce qu’on n’aura pas des disponibilités éternelles donc ça aurait créé un contre-temps avant la publication de l’annonce. Néanmoins on a des outils de modération très efficaces : à chaque fois qu’une annonce est publiée on reçoit un message sur un canal spécial de modération. Si on voit qu’il y a un gros souci sur l’annonce on peut la supprimer, la modérer dans un délai très court.

Isabella Vanni : Très bien. Effectivement, ça peut être aussi une modération à posteriori, c’est encore mieux.
J’ai une question : est-ce qu’il y a le projet Contribulle parmi les projets sur Contribulle ?, c’est-à-dire si je veux contribuer par exemple en donnant mes compétences pour maintenir le site, recevoir les messages, les notifications et faire éventuellement la modération. Je n’ai pas regardé, je me pose la question.

Llaq : Non, il n’y a pas le projet Contribulle dans les annonces. Par contre, si tu regardes dans les projets faciles, j’ai mis une petite case Contribulle « Trouver d’autres fiches comme celle-ci » en fait.

Isabella Vanni : Ah ! D’accord. C’est tout en haut, « Trouver d’autres fiches comme celle-ci ». C’est astucieux. OK.

Llaq : Tout à fait. Donc non, il n’y a pas le projet Contribulle. Pour l’instant on a suffisamment de personnes qui ont contribué à Contribulle, donc on n’a pas particulièrement besoin d’aide. On préfère que les contributeurs réservent leurs forces pour d’autres projets qui en ont plus besoin que nous.

Isabella Vanni : Ça me paraît très bien et c’est une bonne nouvelle qu’il y ait un collectif derrière ce beau projet.
Toujours à propos de projets qui sont soumis, j’ai remarqué qu’il y a une case « Rémunération ». Quand on soumet un projet il y a un formulaire tout à fait classique où on décrit le projet, on met les détails, on précise les compétences qui sont requises pour la contribution, les fameux filtres dont on parlait au début du sujet, et puis il y a une option « Rémunération », « Rémunération financière ou autre », donc on ne prend pas en compte que les contributions bénévoles. J’étais curieuse de savoir quelle est l’incidence de projets pour lesquels une rémunération « financière ou autre » est prévue, proposée, et quels types de rémunération cela peut-il être ?

Llaq : On a mis cette option après une réflexion sur le bénévolat des contributeurs au logiciel libre. C’est vrai que pour les contributeurs qui donnent beaucoup de temps sur des projets, ça peut être très agréable de recevoir une rémunération, qui n’est pas forcément financière, ou un remerciement pour le temps passé sur le projet. Comme tu l’as dit, c’est un champ libre sur Contribulle, donc ce n’est pas un champ uniquement destiné à mettre un montant en euros. Le porteur ou la porteuse de projet peut proposer de l’argent ou d’autres choses, par exemple des crêpes, c’est bon les crêpes !

Isabella Vanni : Pas mal !

Llaq : Ou alors des contreparties sur le service proposé si c’est un service en ligne.

Isabella Vanni : D’ailleurs je crois avoir vu, effectivement sur le projet sur les flux qui propose, vu que c’est un service payant, un abonnement annuel, je crois, aux personnes qui contribueraient au projet. Ça peut être ça aussi.
Comme on voit, en fait la plateforme Contribulle est encore relativement jeune, elle est en train de se constituer, il y a des idées, il y a par exemple les filtres qui ont été demandés, qui ont été développés, elle est en train de se construire, elle peut encore évoluer. On parlera de cela plus tard. Je préfère, pour l’instant, faire une courte pause musicale.
Je vais vous proposer un titre qu’on avait inclus dans le podcast de l’émission du 16 novembre 2021 mais qui n’avait pas été diffusé en direct, on avait eu quelques soucis techniques ce jour-là. Je suis donc ravie de vous proposer ce titre en direct aujourd’hui. Nous allons écouter Whatever Comes My Way par le groupe Vienna Ditto. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Whatever Comes My Way par Vienna Ditto.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter Whatever Comes My Way par le groupe Vienna Ditto, disponible sous licence libre Creative Commons, CC By 3.0.

[Jingle]

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre notre discussion. Je suis Isabella Vanni de l’April. Les autres personnes qui participent à l’émission sont Maiwann, membre de Framasoft, pour les Contribateliers, et Le Libre Au Quotidien ou Llaq de Contribulle. Cette émission est consacrée au thème « Contribuer au Libre ». N’hésitez pas à participer à notre conversation sur le salon web dédié à l’émission, sur le site causecommune.fm, bouton « chat ».
On disait que la plateforme Contribulle est née assez récemment et qu’elle est probablement destinée à évoluer, d’ailleurs sur le site de Contribulle on lit « Contribulle est créée de façon itérative ». Qu’est-ce qu’on entend par cela Llaq ? Ça veut juste dire qu’elle est destinée à évoluer ou quelque chose d’autre ? Je ne suis pas sûre d’avoir compris.

Llaq : Tout à fait. En fait c’est une méthode de travail très souvent utilisée dans le design. Ça veut dire qu’on préfère avancer petit à petit en étant bien attentifs aux besoins des personnes qui vont utiliser ou qui utilisent actuellement Contribulle. Au lieu de vouloir faire toutes les fonctionnalités d’un coup, alors que peut-être nos utilisateurs ne vont jamais utiliser ces fonctions. On a, par exemple, des fonctions qu’on avait prévues de faire initialement, mais comme on n’a eu aucune demande de la part de nos utilisateurs, eh bien on ne va pas les faire, ce qui permet aussi de libérer le temps des contributeurs.
La première version de Contribulle, qui est sortie en février 2021, est très minimale et, avec les retours des utilisateurs, on a pu estimer les prochaines fonctionnalités à développer en priorité. On a mis en ligne ces nouvelles fonctionnalités et on s’adapte au fur et à mesure.

Isabella Vanni : Merci pour cette réponse. Tu parles du retour des utilisateurs, par là tu entends les porteurs de projet, les personnes qui souhaitent contribuer ou les deux ?

Llaq : Il faut savoir qu’on a fait une campagne de retours d’expérience auprès des porteurs de projet et on a également reçu des retours de la part des utilisateurs de notre site alors qu’on n’a pas fait particulièrement d’appels à eux. Ça nous paraissait très important de faire un retour d’expérience de la part de nos porteurs de projet. Pour l’instant une personne nous a dit qu’elle avait trouvé un contributeur grâce à Contribulle, on en est très fiers. On a aussi reçu quelques mails qui nous demandaient de supprimer des annonces, car il y a eu des contributions, mais on n’a pas eu plus d’informations, on ne sait pas si le projet a été annulé, si la personne a trouvé une alternative, si elle a été contactée par une personne en dehors de Contribulle, etc. Également on ne sait pas quelles contributions ont été réalisées parce qu’on n’a pas eu de retours. Donc les retours manquent. On va relancer un appel à témoignage, dans les semaines, mois qui viennent.

Isabella Vanni : Très bien. J’allais justement te demander quelles étaient les prochaines étapes.
Je vais redonner la parole à Maiwann. On parlait du fait qu’on avance à petits pas, qu’il vaut mieux écouter les besoins des personnes plutôt que dépenser des énergies dans des fonctionnalités que personne n’utilise. Tout projet est destiné à évoluer, à s’adapter aux situations. C’est aussi le cas pour les Contribateliers, on en a parlé tout à l’heure : au temps du Covid les Contribateliers s’appellent les Confinateliers. Se rencontrer à distance ça marche, ça peut marcher très bien, mais ça peut aussi déstabiliser certaines personnes, ça peut ne pas donner envie à d’autres personnes qui participaient peut-être aussi parce que les rencontres physiques étaient importantes pour elles, peut-être qu’elles sont moins intéressées à l’aspect de se voir à distance. Je voulais savoir un petit peu comment ça s’est passé, comment ça se passe, comment ça se passera, vu que je sais que tu as probablement envie de lancer d’autres Confinateliers ? Quelques mots sur cette expérience à distance.

Maiwann : Effectivement, au moment où on a dû passer à distance parce qu’il y avait le premier confinement, les Contribateliers se sont transformés, ont mutés en Confinateliers. Il faut bien voir que l’envie principale, dans les Contribateliers, c’est de se retrouver entre gens qui partagent les mêmes valeurs pour contribuer à un monde meilleur, si je simplifie. Une des choses qui est difficile avec les confinements successifs c’est qu’on est quand même pas mal isolés, se retrouver c‘est difficile, même si on n’est plus confinés les regroupements sont compliqués, c’est soumis à conditions. Il y a eu ce mouvement de dire « si jamais se retrouver physiquement c’est difficile, on peut se retrouver en ligne ». Évidemment ça change beaucoup de choses et, en même temps, ça permet quand même des choses différentes, par exemple ça permet à des personnes de coins de la France où des Contribateliers ne seront sans doute pas organisés de pouvoir participer aussi un petit peu.
Le premier a eu lieu le 25 avril 2020. À peu près 80 personnes ont participé, ça fait quand même du monde, dans plein d’ateliers différents, on n’était pas tous les 80 sur une seule discussion.
Il y en a eu plusieurs, d’ailleurs un cinquième est annoncé ; il aura lieu le 20 février. Venez nombreux et nombreuses participer. La façon dont souvent ça se passe, c‘est qu’on donne le lien d’un channel, d’un salon d’accueil où les personnes peuvent se connecter. Souvent on ne parle qu’en audio, on n’a pas du tout besoin de mettre la caméra. Depuis ce salon d’accueil, il y a des personnes qui font la liste de ce qui existe ce qui permet de vous dispatcher vers ce qui vous intéresse le plus. C’est en général comme ça que ça se passe, de 14 heures à 17 heures souvent, je ne suis pas sûre qu’on ait déjà sorti les horaires du prochain, mais ça va sans soute se passer comme ça.

Isabella Vanni : Peux-tu rappeler le jour de la semaine, s’il te plaît ?

Maiwann : Je n’en suis pas sûre.

Isabella Vanni : On va vérifier tout de suite. Tu me disais que c’est l’après-midi, donc c’est probablement le week-end.

Maiwann : Oui, c’est le week-end et c’est le dimanche, merci Le Libre au Quotidien, donc dimanche 20 février. Venez nombreux. Il faut surveiller un peu les réseaux sociaux pour avoir le nom du salon pour pouvoir nous rejoindre.

Isabella Vanni : C’était justement ma prochaine question : comment je fais pour suivre l’actualité des Contribateliers ? D’autant plus, comme tu disais, maintenant qu’ils sont faits aussi à distance, même si je ne suis pas de Lyon ou de Toulouse où il y en avait fréquemment, je peux quand même participer à distance. Comment je fais pour savoir où les trouver et pour avoir l’actualité sur les Contribateliers ?

Maiwann : Il y a le site contribateliers.org qu’on met à jour avec les prochaines dates des Contribateliers. Il y a aussi des comptes sur les réseaux sociaux, Twitter et Mastodon. Il y a un compte général Contribateliers et ensuite, si vous êtes dans une ville où il y a des Contribateliers de façon récurrente, il y a un compte spécifique, je vous laisse trouver celui qui vous conviendra le mieux.

Isabella Vanni : Merci. Tu disais qu’il y a eu jusqu’à 80 personnes lors d’un Confinatelier, ça me paraît énorme. C’est vraiment une belle réussite. Bien évidemment, comme tu disais, les personnes sont dispatchées sur les différents ateliers. Je vois un autre point positif, c’est qu’on arrive à regrouper encore plus de monde parce que je ne vois pas trop comment regrouper 80 personnes lors d’un atelier physique, par exemple dans une bibliothèque. C’est aussi un point à souligner.

Maiwann : Oui, complètement. Du coup ça permet de faire du travail qui est peut-être un peu du travail de masse. Justement pour Contribulle il y a un moment où il a fallu faire une liste de tous les types de contributions qui étaient possibles et là, d’avoir pas mal de monde, ça permettait de brasser une grande variété de profils. Des gens avaient des idées plutôt sur l’aspect rédactionnel, d’autres plus sur l’aspect design, d’autres plus sur l’aspect du code, de la traduction, le nombre faisait l’intérêt. Parfois, en Contribatelier en physique, c’est plus simple de faire du one to one, bref !, de discuter directement avec une personne. Par exemple on a fait un Contribatelier à Quimper cette année, mais aussi en 2019 il me semble, lors d’Entrée libre.

Isabella Vanni : Entrée libre est une manifestation qui a lieu à Quimper, qui a déjà eu lieu deux ou trois fois, je crois qu’il y a déjà eu plusieurs éditions.

Maiwann : Oui, c’est exactement ça. Entrée Libre est organisée par un centre social à Quimper. Il y a eu deux éditions. À la toute première sont venues des personnes qu’on n’aurait jamais vues en ligne. Beaucoup de personnes âgées venaient parce que c’était le centre social, dont une qui est venue et qui ne savait pas utiliser un ordinateur. En ligne on n’aurait jamais pu toucher cette personne, tandis que le Contribatelier en physique permettait ça. Ce qui est bien c’est qu’on a les deux, on a en même trois si on compte Contribulle.

Isabella Vanni : Vous envisagez peut-être de refaire des Contribateliers avec possibilité de se connecter à distance ? Non ! Ça devient trop compliqué ! En tout cas tu as bien raison de dire que si on multiplie les possibilités de contribuer c’est encore mieux.
Je pose la même question à Le Libre Au Quotidien : comment se tenir à jour, comment avoir l’actualité du projet ? Si je suis une personne qui a un peu de temps libre, qui a envie de contribuer et qui trouve que la plateforme Contribulle est très pratique pour cela, est-ce qu’il y a un moyen de, je ne sais pas, s’abonner à un flux, justement ? Quels sont les moyens que je peux avoir pour me tenir à jour ?

Llaq : Les moyens pour se tenir à jour de Contribulle. Déjà, si c’est uniquement pour avoir notre actualité, on a des comptes Mastodon et Twitter. Mais, si vous voulez avoir une liste des annonces qui arrivent en continu, on a un flux RSS qui est normalement dans le footer du site, le footer c’est la barre qui est tout en bas du site, là il y a une petite icône qui contient le lien vers le flux RSS. Sinon vous pouvez aussi aller régulièrement sur le site, même si ce n’est pas le meilleur moyen de se ternir à jour puisqu’il faut y aller, donc le flux RSS.

Isabella Vanni : Très bien. À propos du collectif Contribulle, combien de personnes êtes-vous en ce moment ?

Llaq : Actuellement nous sommes quatre dans le collectif.

Isabella Vanni : Très bien. Comme tu disais, vous arrivez à gérer le projet, vous préférez que les personnes se consacrent, donnent leur énergie et leur temps à d’autres projets libres.
Il y a une question qui est importante pour moi et qui vaut pour les deux projets. Llaq, tu as en partie répondu, mais je voulais avoir aussi le retour de Maiwann, n’hésite pas, toi aussi, à rebondir : quels sont les retours des personnes qui participent à ces projets ? Par exemple, est-ce que vous voyez si une personne qui participe à un projet revient régulièrement ? Arrivez-vous à « fidéliser », entre guillemets, les contributions ? Est-ce que les personnes sont contentes ? Est-ce que vous ajustez l’organisation des évènements ou les choses que vous proposez en fonction aussi des retours ? Je pense que c’est important aussi de faire évoluer les choses, justement comme vous disiez, sur la base des retours. Quels sont ces retours d’expérience ?

Maiwann : Pour moi, concernant les Contribateliers, on s’est beaucoup inspiré de ce qui avait été testé à Lyon par rapport à ce qu’on a fait à Toulouse par exemple. À Lyon c’était organisé tard le soir, ce que je disais au début, donc c‘était un peu difficile de continuer à contribuer, de continuer à travailler après sa journée de travail, donc nous avions décalé ça dans le week-end. Choisir un lieu qui est connu et pas seulement, par exemple, un cybercafé, un espace de coworking qui sont connus par un certain type de population, donc se déplacer en bibliothèque. En général, quand vous dites que tel évènement se passe à la bibliothèque, il y a beaucoup plus de monde qui sait où se trouve la bibliothèque qu’un coworking en particulier. Ça c’est par rapport à ce qui s’est passé à Lyon.
Ensuite, pour être allée à beaucoup de Contribateliers à Toulouse, c’est vraiment difficile parce que soit il y a des gens qui passent de façon très ponctuelle et, dans ces cas-là, ils viennent, posent une question un peu spécifique, contribuent de façon un peu rapide. On leur présente Common Voice ou des choses comme ça, ils contribuent ponctuellement, ils repartent et j’ai l’impression qu’ils ne reviennent pas. Sinon il y a en d’autres qui reviennent, mais ce sont des personnes qui sont déjà acclimatées au Libre. Donc il y a vraiment ce point de difficulté que je trouve vraiment pas facile. Effectivement, on fait rester des personnes, on leur propose un espace où elles ont envie de revenir et c’est compliqué pour plein de choses. Je pense, déjà, parce qu’on essaye de faire venir des gens qui ne sont pas dans nos cercles, du coup ça prend beaucoup plus de temps que de faire venir des copains. Et, en ce moment, je trouve que c’est difficile – peut-être que je vais dire des généralités – on court tous après le temps, la vie est compliquée surtout ces derniers-temps, du coup se dire « je vais libérer une après-midi – même si c’est par mois – pour contribuer », peut-être que c’est lourd pour des personnes. Je n’ai pas encore trouvé la solution magique pour réussir à s’organiser pour faire venir de nouvelles personnes de façon régulière. Je n’ai pas eu de retours d’autres Contribateliers qui ont réussi à faire ça, mais, encore une fois, on parle d’un temps d’il y a deux ans, donc ça commence à dater un petit peu.

Isabella Vanni : D’accord. Et je pense que le fait de proposer, au sein du même Contribatelier, plusieurs projets, ce n’est pas évident. Par exemple si ce soir-là il y a juste une personne animatrice, à ce moment-là il faut dispatcher les gens sur plusieurs projets, j’imagine que ce n’est pas évident. Je ne sais pas si tu t’es trouvée dans cette situation. C’est plus simple s’il y a une soirée ou un après-midi, un projet.

Maiwann : Je ne sais pas. En tout cas systématiquement, dans les Contribateliers où j’étais, il y avait au moins plusieurs personnes. Pour ceux que j’ai faits à Dinan, une personne un peu complice était avec moi pour me soutenir. Par exemple je ne suis pas technicienne, pour éviter de faire des bêtises j’avais cette personne-là à qui je pouvais poser des questions. À Dinan, je faisais une partie présentation et ensuite je proposais un aspect plus contributif où on proposait des choses. Soit les personnes sont autonomes, du coup c’est très facile de les orienter vers des projets où elles peuvent être un peu autonomes, soit elles ne le sont pas du tout et, dans ces cas-là, proposer une seule chose ça les aide bien. À Toulouse il y avait des pôles, « installer un système libre sur son téléphone », « apprendre à contribuer en codant » et ensuite il y avait un pôle Common Voice. Selon l’autonomie des personnes on les dirigeait plutôt vers les uns ou plutôt vers le dernier parce que ce serait plus confortable pour elles.

Isabella Vanni : Très bien. L’importance, comme tu disais, d’avoir des complices, d’avoir des coanimateurs ou coanimatrices.
C’est une superbe initiative, comme pour toutes les choses il peut y avoir quelques difficultés qu’on peut résoudre en parlant, en échangeant. Est-ce que Contribulle a aussi dû faire face à quelques difficultés ? As-tu quelques anecdotes à ce sujet ?

Llaq : Non. Pour le coup on n’a pas particulièrement eu de soucis depuis le début de Contribulle et on en est très fiers.

Isabella Vanni : C’est génial, j’en suis ravie.
Initialement, l’objectif des Contribateliers était plutôt de faire avancer des projets Framasoft, disons que les personnes venaient initialement de là. Mais tu me confirmes, Maiwann, que ça peut être n’importe quel projet ?

Maiwann : Oui. D’ailleurs je me suis rendu compte, en navigant sur le site, qu’on parlait encore, dans la page « À propos », beaucoup de Framasoft. C’était un biais qu’on avait au début et dont on essaie de se départir. Il ne faut absolument pas ni être de Framasoft ni parler des projets de Framasoft dans les Contribateliers, l’important c’est de parler de la culture libre, des communs, et même des projets avec lesquels on est en phase, qui ne connaissent pas le monde du Libre, mais qui sont alignés avec ses valeurs. L’important c’est de faire avancer dans le bon mouvement. Framasoft est juste l’initiateur, rien de plus.

Isabella Vanni : Très bien. C’est bien de le rappeler, d’ailleurs ça s’appelle Contribatelier, ça ne s’appelle pas Framatelier ! Je plaisante ! Mauvaise blague.
À propos des projets qu’on trouve sur Contribulle, c’est vraiment intéressant parce qu’on trouve, comme on a dit tout à l’heure, des projets de personnes développeuses de logiciels qui demandent par exemple à des personnes de les tester. Je crois que j’avais même trouvé un projet posté par une personne du bureau de l’ambassadeur pour les affaires numériques qu’on a eu l’occasion d’inviter dans une émission Libre à vous !, je n’ai plus en tête le numéro de l’émission ; je lis les messages, merci, c’est l’émission 88 si vous souhaitez la réécouter. Comme quoi vous pouvez même contribuer à un projet de l’ambassadeur pour les affaires numériques. Je vous invite vraiment à vérifier, à regarder dans les fiches tous les types de projets qui peuvent être postés.
Au début de l’émission on parlait de cette fonctionnalité qui a été incluse dans un deuxième moment, qui est filtrer les contributions par types de compétences. Vous pensez ne pas avoir de compétences, eh bien voilà, tout au début de la liste des compétences, il y a un bouton qui s’appelle « Aide facile & rapide ». Là-dessus il y a même la proposition, par exemple, de contribuer financièrement, c’est vraiment juste sortir sa carte bancaire. Après vous avez, par exemple, « Amélioration du contenu », « Audiovisuel », « Design », « Développement », différents types de développement, « Graphisme », « Rédaction/Création de continu », « Relations humaines/Communication », comme tu le rappelais tout à l’heure Maiwann, et aussi « Traduction ».
J’en profite pour rappeler qu’à l’April il y a aussi énormément de groupes de travail. La plupart de ces groupes sont ouverts à tout le monde, il ne faut pas forcément être membre de l’April pour participer, au contraire, on essaie d’être le plus ouvert possible. Là aussi il y a plein de moyens de contribuer : par exemple vous pouvez échanger sur les relations entre logiciel libre et le monde associatif, vous pouvez participer en aidant à la transcription de conférences ou des émissions Libre à vous !. Il y a vraiment énormément de choses qu’on peut faire.
Le temps passe vite. Il y a une question à laquelle nous tenons à la fin de nos échanges, c’est demander aux personnes invitées le message qu’elles souhaitent faire passer ou quelles sont les idées les plus importantes qu’il faut retenir de l’échange.
Je vous laisse la parole. Je laisse commencer Le Libre Au Quotidien cette fois. Quel est le message que tu souhaites faire passer, en moins de deux minutes s’il te plaît ?

Llaq : On va y arriver. Je voulais dire que ça paraît assez compliqué de contribuer au Libre et il y a peu d’initiatives pour faciliter ça. Mais promis, le monde du Libre essaye de s’améliorer sur ça ! Vous êtes légitimes, ne croyez pas que vous n’êtes pas légitimes pour contribuer à un projet. Il y aura toujours un type de contribution que vous pourrez faire. Vos connaissances peuvent toujours aider un projet. C’est tout ce que je voulais dire. On ne peut pas avancer correctement si on n’avance pas ensemble.

Isabella Vanni : Merci. Maiwann.

Maiwann : Passer après ça ce n’est pas facile ! Du coup, dans la même veine, en ce moment il ne faut pas rester seul. Que ce soit les Contribateliers, que ce soit Contribulle, c’est de passer du temps si possible ensemble à construire un monde meilleur, en tout cas un monde qui nous correspond mieux et qui partage les mêmes valeurs que les nôtres, que ce soit celles du logiciel libre, que ce soit, comme tu disais, faire de la transcription pour que ce soit accessible à plus de personnes. Donc faire ensemble, construire ensemble pour aller un peu plus loin et prendre soin les uns des autres. Ça sert aussi à ça les Contribateliers, se retrouver pour prendre soin. Peu importe la façon dont vous le faites, l’important c’est d’y aller ensemble.

Isabella Vanni : Tu avais peur de ne pas réussir à faire une conclusion après la belle conclusion de Le Libre Au Quotidien. Je te rassure, c’était une très belle conclusion.<br/
Merci beaucoup à tous les deux d’avoir participé à cette émission. Je vous souhaite une très belle journée et bonne continuation avec vos projets. Merci beaucoup.

Maiwann : Merci.

Llaq : Merci à toi.

Isabella Vanni : Nous allons maintenant faire une pause musicale.

[Virgule musicale]

Isabella Vanni : Après la pause musicale nous entendrons la chronique de Marie-Odile Morandi consacrée au thème « Le numérique que nous voulons ».
Pour cette troisième pause musicale nous allons écouter Night par Cloudkicker. On se retrouve juste après. Belle journée à l’écoute de Cause Commune, la voix des possibles.

Pause musicale : Night par Cloudkicker.

Voix off : Cause Commune, 93.1.

Isabella Vanni : Nous venons d’écouter Night par Cloudkicker, disponible sous licence libre Creative Commons, CC By 3.0.

[Jingle]

Isabella Vanni : Je suis Isabella Vanni de l’April. Nous allons passer au sujet suivant.

[Virgule musicale]

Chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture » de Marie-Odile Morandi sur le thème « Le numérique que nous voulons »

Isabella Vanni : Nous allons poursuivre avec la chronique « Les transcriptions qui redonnent le goût de la lecture », de Marie-Odile Morandi, sur le thème « Le numérique que nous voulons ».
Mon collègue Frédéric Couchet disait, sur le salon de discussion, qu’on innove aujourd’hui. En effet c’est Laure-Élise Déniel, bénévole à l’April, qui va prêter sa voix, ou bien qui a prêté sa voix à Marie-Odile. Nous écoutons, en fait, un sujet qui a été pré-enregistré et on se retrouve juste après.

[Virgule sonore]

Marie-Odile Morandi - Voix de Laure-Élise Déniel : Bonjour à toutes, bonjour à tous. Meilleurs vœux pour cette nouvelle année.
Lors de ma dernière chronique, fin 2021, j’avais parlé de l’une des conférences faisant partie d’un cycle de trois intitulé les Mardis du numérique éthique, organisé par le pôle écolo de la région Auvergne-Rhône-Alpes.
Aujourd’hui mon coup de cœur se porte sur la transcription de la seconde table ronde de cette série intitulée « Formation et culture numérique. Un numérique inclusif, accessible et choisi » qui s’est tenue le 1er juin 2021. BigBlueButton était le système libre de visioconférence utilisé lors de cette table ronde.

La notoriété des personnes présentes n’est plus à démontrer : Dorie Bruyas s’occupe d’inclusion numérique, d’éducation aux médias numériques et de numérique éducatif en région Auvergne-Rhône-Alpes. Judicaël Courant est docteur en informatique, ingénieur et ancien professeur d’informatique en classe préparatoire. Jean-Christophe Becquet, que nous connaissons bien, est vice-président de l’April mais aussi formateur en informatique libre et grand contributeur à OpenStreetMap. La table ronde était animée par Vincent Mabillot, enseignant chercheur en science de l’information et de la communication avec la participation de Florian Cartellier du pôle écolo.
Durant une heure et demie sont abordées les problématiques concernant l’appropriation d’un numérique inclusif, accessible en termes de culture et d’éducation, et choisi.

L’inclusivité commence par l’accessibilité. Pour pouvoir utiliser le numérique il faut y avoir accès. La région peut agir pour s’assurer que les personnes qui en sont le plus éloignées soient incluses et, notamment dans les territoires ruraux, aient accès à Internet. C’est une question de justice sociale et d’équité que de couvrir le territoire aussi bien d’un point de vue technologique et de raccordement que du point de vue des services et de l’accompagnement. Il conviendra d’agir avec éthique et discernement pour s’adapter aux enjeux sociaux, culturels et économiques des divers territoires.

Aujourd’hui nous utilisons les outils informatiques pour communiquer, apprendre, travailler, exercer notre vie citoyenne, consommer. À chaque instant et dans tous les aspects de nos vies, personnelle ou professionnelle, nous sommes dépendants de ces outils, mais personne n’est nativement compétent. Nous avons tous besoin d’être formés et plusieurs acteurs interviennent :
l’école, lieu de sensibilisation, d’apprentissage des usages éclairés d’un numérique non contraint ;
la formation professionnelle qui doit permettre d’améliorer la manière de communiquer, d’interagir, de s’afficher en public, mais aussi de monter en compétences et d’acquérir une maîtrise de l’outil plutôt que le subir ;
l’éducation populaire, avec tous les acteurs de la médiation numérique ainsi que les réseaux associatifs qui accompagnent ces usages.

En 2022, la très grande majorité des services de l’État et des collectivités territoriales, voire 100 %, devrait être dématérialisée, objectif affiché par le gouvernement, avec l’idée d’un service public augmenté jusqu’au dernier kilomètre. La plupart des actions devraient pouvoir se faire en ligne à partir de téléphones ou d’ordinateurs. Mais ce numérique est un numérique subi, contraint. On le leur a imposé sans demander leur avis et ils n’ont contribué à quoi que ce soit.
Situation vécue par Judicaël Courant au sein du lycée dans lequel il exerçait : la région avait décidé, sans consulter personne, de remplacer tous les serveurs par du tout Microsoft, sans tenir compte de la réalité de chaque établissement et sans aucune formation prévue au niveau humain pour que les choses puissent être adaptées localement. Erreur que l’on retrouve, dit-il, depuis 1985 et le Plan Informatique pour Tous.

Comprendre les concepts est extrêmement important, car des choix sont faits au moment du développement de ces outils. La question de l’éducation au numérique est une question d’émancipation avec l’idée qu’on va pouvoir s’autonomiser, se saisir des choses et les changer, agir sur son environnement.
Comprendre et maîtriser son outil informatique, c’est ce que permet le logiciel libre. Il offre à chacun, en fonction de là d’où il part, de son appétence, un moyen fabuleux pour comprendre comment fonctionne un logiciel et comment fonctionne un ordinateur. Le logiciel libre permet d’aller au-delà des compétences instrumentales, manipulatoires, afin de développer ses propres compétences stratégiques.
Jean-Christophe Becquet nous rappelle que les logiciels sont du savoir, que les quatre libertés accordées à chacun par le logiciel libre et les licences libres sont des outils juridiques pensés pour permettre l’accès à ce savoir.
Historiquement, le numérique était plutôt un projet collectif. La philosophie du logiciel libre permet l’accès à tous, le partage des savoirs et leur amélioration collaborative : construire collectivement et enrichir un ensemble et le partager.
Les ressources numériques sont non rivales. Ce sont des communs et la licence libre est une sorte de contrat social que se donnent les contributeurs pour travailler sur un même projet. Les contributions sont partagées sous licence libre et chacun bénéficie, en retour, de nouveaux savoirs, de nouvelles ressources ajoutées par tous les autres. On pense à Wikipédia, OpenStreetMap, mais aussi à ce qu’on appelle les communs pédagogiques.

Dorie Bruyas pointe les usages problématiques du point de vue de l’impact écologique comme le stockage des données, le streaming, la gestion des matériaux rares. Mais le numérique permet d’éviter des déplacements, les usages collectifs se passent plutôt en ligne. Les réseaux sociaux permettent des mobilisations citoyennes, des prises de conscience, avec émergence de formes politiques qui, au départ, n’avaient pas d’audience dans les principaux médias.

Il s’agit d’un changement sociétal. 17 % de la population est en difficulté face au numérique. Que fait-on pour ces 13 millions de Français qui ont besoin de pouvoir, évidemment, accéder à leurs droits ? La médiation numérique permettra à chacun et chacune de devenir un citoyen numérique, d’utiliser les technologies de manière active comme un levier d’expression ou de participation citoyenne. Comprendre permettra d’agir politiquement, de réagir, de faire des choix de société reposant sur des bases décidées collectivement. En contribuant, on peut adopter un modèle de valeurs, choisir la philosophie qui permettra de construire une culture numérique bâtie sur du lien et non sur la captation de profits par quelques multinationales, d’où l’importance du choix d’un numérique libre.

L’April défend la priorité au logiciel libre d’abord dans l’éducation – le numérique subi commence souvent à l’école et si on enseigne l’informatique avec des logiciels non libres, on prescrit à des futurs consommateurs des outils non maîtrisés et non maîtrisables, mais aussi dans l’administration et dans tous les aspects de la vie publique, parce que c’est le seul moyen qu’on a de maîtriser son informatique et de devenir autonome et libre sur le long terme.
Jean-Christophe Becquet insiste sur la question des données ouvertes, de l’open data. Avoir à disposition des données publiques librement réutilisables constitue un formidable objet pédagogique qui permet d’appréhender des outils divers comme les tableurs, les logiciels de base de données, de visualisation, de données géographiques dont les citoyens peuvent s’emparer dans un esprit d’entraide, d’ouverture et de bienveillance. Cela devient aussi un lieu de rencontres et de mutualisation de toutes ces compétences pour participer à un projet commun, librement partagé et réutilisable dont les retombées sont illimitées.
Une culture numérique libre et choisie permet de mettre en commun des capacités, de développer de nouvelles solutions et les faire évoluer en Libre. Avec la mise à disposition de services numériques basés sur des outils libres, dans le respect des données, chacun et chacune profite de tous les avantages du Libre en développant son autonomie et en préservant sa liberté.

J’ai vraiment trouvé toutes les interventions de cette table ronde d’une très grande richesse dont cette chronique d’une dizaine de minutes n’en est que le pâle reflet. J’invite les auditeurs et les auditrices qui ne l’auraient pas encore fait à lire la transcription, sinon à la relire et pourquoi pas, en ce début d’année, à participer à notre groupe Transcriptions en s’intéressant, par exemple, à la troisième table ronde de cette série, qui n’a pas encore été transcrite.

[Virgule sonore]

Isabella Vanni : Merci à la fois à Marie-Odile Morandi pour la rédaction de cette chronique et à Laure-Élise Déniel pour sa lecture. D’ailleurs, vous aurez remarqué que le texte a été enregistré avec une formulation à la première personne, c’est pour ça que je disais que Laure-Élise prête sa voix à Marie-Odile. Trouvez-vous ça bien ? Peut-être préférez-vous que le texte soit à la troisième personne ? C’est typiquement une contribution que vous pouvez faire pour notre émission. N’hésitez pas à nous écrire à contact chez libreavous.org ou à écrire sur notre salon de web-chat pour nous dire ce que vous en pensez.
Nous approchons de la fin de l’émission.

[Virgule musicale]

Quoi de Libre ? Actualités et annonces concernant l’April et le monde du Libre

Isabella Vanni : Aujourd’hui nous n’avons pas d’annonces particulières à faire.
Je vous rappelle que vous pouvez consulter le site de l’Agenda du Libre, agendadulibre.org, pour trouver des évènements en lien avec les logiciels libres ou la culture libre près de chez vous.

Notre émission se termine.

Je remercie les personnes qui ont participé à l’émission : Maiwann, Le Libre Au Quotidien, Isabelle Carrère, Marie-Odile Morandi, Laure-Élise Déniel
Aux manettes de la régie aujourd’hui, pour sa grande première, Frédéric Couchet avec le soutien technique d’Étienne Gonnu.
Merci également aux personnes qui s’occupent de la post-production des podcasts : Samuel Aubert, Élodie Déniel-Girodon, Lang1, bénévoles à l’April, et Olivier Grieco qui est le directeur d’antenne de la radio.
Merci aussi à Quentin Gibeaux, bénévole à l’April, qui découpera le podcast complet en podcasts individuels par sujet.

Vous retrouverez sur notre site web, libreavous.org, toutes les références utiles ainsi que sur le site de la radio, causecommune.fm.
N’hésitez pas à nous faire des retours pour indiquer ce qui vous a plu mais aussi des points d’amélioration. Vous pouvez également nous poser toute question et nous y répondrons directement ou lors d’une prochaine émission. Toutes vos remarques et questions sont les bienvenues à l’adresse contact chez libreavous.org.

Nous vous remercions d’avoir écouté l’émission.
Si vous avez aimé cette émission, n’hésitez pas à en parler le plus possible autour de vous et à faire connaître également la radio Cause Commune, la voix des possibles.

La prochaine émission aura lieu en direct mardi 18 janvier 2022 à 15 heures 30. Notre sujet principal portera sur la politique logiciel libre de la ville d’Échirolles.

Nous vous souhaitons de passer une très belle fin de journée et on se retrouve en direct mardi 18 janvier. D’ici là, portez-vous bien.

Générique de fin d’émission : Wesh tone par Realaze.