- Titre :
- Décryptualité du 24 février 2020 - La liberté d’expression sur Internet attaquée sous tous les prétextes
- Intervenant·e·s :
- Manu - Mag - Nico - Luc
- Lieu :
- April - Studio d’enregistrement
- Date :
- 24 février 2020
- Durée :
- 15 min
- Écouter ou enregistrer le podcast
Revue de presse pour la semaine 8 de l’année 2020
- Licence de la transcription :
- Verbatim
- Illustration :
- Vive la liberté d’expression, Taymaz Valley, Flickr - Licence CC BY 2.0
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l’April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Description
Covid-19, Affaire Griveaux, haine sur Internet sont de multiples occasions de remettre en cause la liberté d’expression sur Internet en toute mauvaise foi ou en manquant de traiter le fond du problème.
Transcription
Voix off de Luc : Décryptualité.
Voix off de Nico : Le podcast qui décrypte l’actualité des libertés numériques.
Luc : Semaine 8. Salut Manu.
Manu : Salut Mag.
Mag : Salut Luc.
Luc : Qu’a-t-on au sommaire de cette petite revue de presse ?
Manu : Oui. Ce sont les vacances donc nécessairement on est un peu faible. On n’a que quatre articles qui parlent de logiciel libre ou des sujets qui nous intéressent en général.
Mag : Mais ils sont sympas !
Génération-NT, « La FSF envoie à Microsoft un disque dur pour libérer Windows 7 », par Jérôme G.
Manu : C’est un vrai troll ce truc, parce que, en gros, une association de logiciels libres envoie au plus gros fabricant de logiciels privateurs un disque dur pour leur proposer de mettre dessus leur système d’exploitation.
Luc : C’est la énième semaine qu’on parle de ce sujet-là !
Manu : Mais le disque dur ça reste drôle.
Mag : Ça me fait rire à chaque fois !
Luc : Voilà. Microsoft a quand même dit qu’ils étaient les champions de l’open source et qu’ils étaient à donf, donc c’est rigolo de profiter de cette déclaration.
Mag : Quitte à ne pas maintenir Windows 7, autant l’ouvrir, c’est logique !
Tribune de Genève, « Informatique : "L’être humain va devoir s’interroger sur son rapport au monde numérique" », par Olivier Wurlod.
Manu : C’est toute une discussion sur l’Europe et la gestion de son informatique, notamment en lien avec Crypto AG, un scandale qui vient d’apparaître sur une entreprise suisse qui fait de la sécurité dont on s’aperçoit, finalement, qu’elle appartient à la CIA en sous-main.
Mag : Qui faisait de la sécurité, donc !
[Rires]
Manu : Je crois que c’est encore le cas, ça reste compliqué, mais de toutes façons les technologies évoluent, elle n’était plus forcément au cœur de ce qui se fait aujourd’hui. Là, l’Europe s’interroge sur comment on fait pour être indépendant au niveau de son informatique, comment on fait pour avoir nos propres champions. Et en plus, on l’a appris aujourd’hui, on est lundi, début de semaine, la Commission européenne vient de recommander à tous ses employés d’utiliser Signal, une plateforme libre, un logiciel libre, chiffré de bout en bout avec un code que l’on peut vérifier, auditer, donc c’est plutôt positif.
Mag : Signal ça remplace l’envoi de SMS.
Manu : Notamment, mais aussi des applications comme WhatsApp.
Mag : Ce sont des messages qui sont chiffrés. Ça permet aussi de discuter à plusieurs donc de créer un groupe de discussion toujours avec des échanges chiffrés, des échanges clé GPG, donc c’est vraiment sympa comme petit logiciel.
Manu : Ça ne doit pas être GPG mais l’équivalent ; c’est un truc un peu novateur il me semble.
Mag : ZDNet France, « Voici les principaux composants des logiciels open source, et leurs problèmes », par Steven J. Vaughan-Nichols.
Manu : C’est la Linux Foundation qui fait toute une analyse et qui remonte une problématique qu’on a déjà rencontrée c’est que les logiciels libres dépendent de logiciels libres qui dépendent de logiciels libres. C’est un peu l’optique, c’est un peu cette idée de solidarité et de mise en commun de beaucoup de briques, eh bien cette mise en commun, des fois, elle pose des problèmes, c’est déjà arrivé l’an passé : une petite librairy qui s’appelait Left-pad, qui a été abandonnée par son développeur, eh bien tout un écosystème JavaScript s’est effondré ce jour-là. Ça a été facile de le remettre en place mais quand même, ça a choqué du monde. Il y a plein de logiciels comme ça, JavaScript mais pas que, qui sont très utilisés dans la communauté, qui sont un petit peu des pierres angulaires qu’il faut faire attention à bien maintenir et s’assurer qu’ils sont toujours là, sinon ça peut poser des problèmes.
Mag : 3Dnatives, « Thingiverse : des fichiers 3D gratuits pour l’impression 3D », par Mélanie R..
Manu : Thingiverse, c’est toi qui connais le plus Luc.
Luc : De très loin parce que je ne m’en suis jamais vraiment servi. C’est un site sur lequel des tas de gens peuvent déposer des modèles 3D pour l’impression 3D.
Manu : Là ça parle des plans qui sont partagés et qui sont tous, pour l’essentiel, en Libre, ce qui peut poser des problèmes parce qu’il y a de tout et n’importe quoi.
Luc : Pas spécialement en Libre, il y a de tout.
Manu : Le sujet de la semaine ?
Luc : La semaine dernière on a rappelé cette affaire qui montrait l’importance de la vie privée et on avait pointé le fait qu’il y avait pas mal de trucs complètement cons qui étaient dits là-dessus, qui étaient même totalement faux, notamment sur cette question de l’anonymat sur Internet puisque, dans cette affaire, il n’y a pas d’anonymat. Il y a eu notamment Marc Rees qui est…
Mag : Un des journalistes de Next INpact et qu’on salue au passage.
Luc : Rédacteur en chef de Next INpact qui, sur Twitter, avait sorti quelques citations qui montrent qu’un certain nombre politiciens ou de journalistes sont vraiment très attachés à essayer de casser la liberté d’expression au travers d’Internet et des réseaux sociaux et que, derrière, il y a vraiment un projet politique qui ne dit pas tout à fait son nom, qui est très autoritaire et qui voudrait vraiment limiter cette capacité aux gens de partager des informations. On peut vaguement le comprendre quand ce sont des informations foireuses et ce genre de choses, que ça va contre la loi, mais dans toutes les affaires récentes cette question surgit.
Mag : Il faut savoir qu’il y a plusieurs lois qui existent déjà pour protéger la liberté d’expression ou pour punir des abus de liberté d’expression. Ça existe déjà. Donc la dernière loi qu’ils nous font contre la haine, eh bien elle est inutile puisque c’est déjà réglementé avant et, du coup, ils font passer des choses dedans qui n’ont rien à voir avec le débat qui pourrait être en cours.
Manu : On peut rapidement dire que cette loi qui est en train d’être élaborée est là pour contrôler ou essayer de contrôler les plateformes, notamment les GAFA, des trucs Twitter, Facebook, et pour s’assurer que des contenus dits haineux soient effacés automatiquement en moins d’une heure. Le côté automatique est un peu particulier, original et inquiétant.
Luc : Je précise quand même que la question de la haine sur Internet est un vrai sujet. Il y a effectivement des gens qui se font harceler.
Manu : On a eu des cas il n’y a pas si longtemps, une jeune fille qui s’appelle ?
Luc : Il y avait Mila, l’affaire Mila qui a fait beaucoup de bruit dans les médias et justement c’est intéressant puisque les premières prémices de ces bruits dans les médias c’était une tribune qui parlait des lâches, donc tous les gens qui sont extrêmement prompts notamment à condamner les islamistes et tout ça et qui n’avaient absolument rien à dire sur cette affaire-là parce que cette fille n’était personne avant que cette affaire ne prenne de l’ampleur et personne n’a voulu se mouiller sur cette affaire-là.
Mag : Ce qui est tragique c’est que l’État va faire passer cette loi-là, mais il se déresponsabilise : ce n’est pas lui qui va devoir gérer les problèmes, ce sont les plateformes, les hébergeurs qui doivent faire des choses automatiques, des scripts et ainsi de suite pour que ça ne se reproduise pas. Mais l’État ne fait rien !
Luc : On peut imaginer, quand on est dans un espace public, et Internet devrait être considéré comme un espace public, que si on déconne dans un espace public la sanction ultime c’est que la police nous tombe dessus et nous sanctionne. Ce n’est jamais parfait, mais normalement c’est le boulot de l’État.
Mag : Donc cette menace qui plane peut, peut-être, réguler les infractions. Peut-être !
Luc : En tout cas les moyens existent et aujourd’hui on constate que même si ces lois existent, comme tu le disais Magali, elles ne sont pas appliquées. Quelqu’un de complètement standard qui serait victime de harcèlement aujourd’hui et qui va dans son commissariat, il ne se passe à peu près rien : aujourd’hui, effectivement, l’État ne veut pas le faire et veut déléguer tout ça.
Manu : À chaque fois, chose amusante, l’anonymat n’entre pas vraiment en jeu parce que, que ce soit ces petits idiots mais que ce soit aussi Piotr Pavlenski, celui qui a fait révéler les vidéos de Griveaux, ils étaient connus ou ils se sont fait connaître au bout d’un mois.
Luc : Ça se discute parce que le Piotr en question, effectivement, là-dessus il n’y a pas photo, en revanche sur des forums, les gens sont derrière des pseudonymes, donc il y a la notion de pseudonymat. Il y a énormément de vidéos YouTube qui sont envoyées notamment à des petits jeunes, ça parle de jeux vidéos, etc., par des boîtes de VPN [Virtual Private Network] qui permettent de passer par Internet et de sortir dans un autre pays et potentiellement de se payer un anonymat. La question n’est pas complètement absurde, elle est souvent utilisée complètement à tort. Dans les citations qui avaient été remontées par Marc Rees il y a Éric Woerth sur France Info, qui dit : « Faut-il supprimer l’anonymat sur Internet ? L’anonymat c’est une horreur – affirme-t-il –, on a besoin de beaucoup plus d’autorité sur les réseaux sociaux. »
Manu : C’est un truc bien de droite !
Mag : Du coup ce n’est même plus Internet, ce sont juste les réseaux sociaux.
Manu : Parfois ils ciblent quand même. Effectivement, ils ne disent pas Internet ou le Web, souvent il y a ce côté « les plateformes, les réseaux sociaux ».
Luc : Il faudrait regarder les statistiques de qui va où, mais les réseaux sociaux pèsent très lourd sur l’usage d’Internet des gens et sur leur expression.
Il y a d’autres choses qui ont été utilisées. On a, bien sûr, l’affaire Griveaux où il y a eu toutes les affaires, mais derrière notamment le virus en Chine.
Manu : Le Coronavirus, le Covid-19.
Luc : Covid-19. Christophe Barbier qui est un journaliste a dit : « Les Chinois arrivent bien à bloquer tous les mots qui parlent de démocratie, pourquoi on n’arrive pas à bloquer tous les mots qui franchissent la loi et tous les internautes qui, sous couvert d’anonymat, franchissent les bornes de la loi ? » Là on voit une volonté de dire qu’on devrait avoir un système automatique qui censurerait les paroles délictueuses, ce qu’il est interdit de dire.
Manu : Petit détail, les Chinois n’y arrivent pas. Ils essayent de le faire, ils le font dans une large mesure, mais ils n’y arrivent pas et quand ils le font, ils le font à mauvais escient. On sait que pour le coronavirus, ils ont essayé de contrôler l’information au début, elle est finalement ressortie et ça leur a un fait grand mal, c’est-à-dire que la crédibilité de l’État central a bien diminué ; ils ont retardé d’autant la prise de conscience de l’importance de ce virus et ça a créé plein de problèmes. Je voudrais citer un autre cas, Tchernobyl, très bien contrôlé par l’État qui a empêché l’information de sortir mais, en fait, ça a été contre-productif et ça a fait beaucoup de mal au gouvernement. Déjà qu’il partait de loin, ça n’a pas aidé.
Luc : Christophe Barbier parle de la capacité de la Chine à bloquer l’usage démocratique et la liberté d’expression. J’avais lu un article il y a quelque temps où, en Chine, le gouvernement avait interdit de faire des jeux de mots dans les titres d’articles parce que les censeurs eux-mêmes n’arrivaient pas à savoir s’il y avait un jeu de mots ou pas.
Manu : Oui. C’est vraiment une course. À chaque fois on invente des termes, en plus ce sont des idéogrammes en chinois, parfois les idéogrammes ressemblent à des termes qui peuvent être des critiques.
Luc : Ce qui est complètement stupide dans ce que dit Christophe Barbier, il dit « bloquer des mots », mais bloquer des mots ça n’a aucun sens ! Je peux utiliser le mot « islamisme » pour dénoncer l’Islam ou je peux utiliser le mot « islamisme » pour dire « il y a de l’anti-islamisme » et je devrais être libre de m’exprimer là-dessus. Donc le mot en lui-même n’a aucun sens, c’est le contexte. Or les ordinateurs, les machines ne savent comprendre le contexte. Les intelligences artificielles que pourtant on nous vend sont absolument stupides sur cette question de la compréhension.
Mag : Sans parler de l’humour et de l’ironie !
Luc : Oui, tout à fait.
Manu : On pourrait revenir à ce qui faisait il y a quelques dizaines d’années notamment à la télévision : interdire des listes de mots. Il y avait les sept mots d’insultes aux États-Unis qui étaient assez connus parce qu’on ne pouvait pas, on n’avait pas le droit de les utiliser à la télé, c’était assez bien contrôlé.
Mag : C’est assez ridicule parce que si on ne peut pas utiliser ces sept-là, autant en utiliser d’autres.
Manu : Bien sûr, c’est ce qui se passait.
Mag : Surtout qu’en France on a un vocabulaire qui est extrêmement riche donc ça ne doit pas être très compliqué.
Luc : Oui, je pense aussi dans tous les pays.
Autre citation stupide, c’est de notre nouveau ministre de la Santé.
Manu : Ça commence bien !
Luc : Qui dit : « La Chine a une capacité de réactivité, elle a pris ses responsabilités en prenant des mesures de confinement très rapidement. Je ne suis pas sûr qu’il serait possible de réaliser ça dans un pays où les réseaux sociaux seraient ouverts. » Il s’appelle Olivier Véran, il a dit ça sur France Inter.
Manu : C’est assez sidérant et effectivement je ne sais même plus comment réagir quand j’entends quelque chose comme ça.
Luc : En fait, ça fait écho à ce que tu as dit tout à l’heure.
Manu : C’est que finalement ce genre de choses ne marche pas.
Luc : De fait, leur blocage a plutôt freiné les mesures qu’autre chose, donc c’est de la désinformation
Manu : On sait que le dirigisme, de manière générale, peut avoir une efficacité localement, ponctuellement, mais qu’à terme ça a toujours de grosses dérives en corruption, en contrôle de l’information, en élites qui vont profiter du système parce qu’on peut être sûr que s’il y a un blocage pour vous empêcher de sortir de la ville, ça ne marchera peut-être pas pour les dirigeants du Parti. Ce genre même de concept-là ne va pas fonctionner jusqu’au bout. Au contraire, on a besoin de lanceurs d’alerte, on a besoin de journalistes critiques qui sont capables d’aller au fond des histoires pour s’assurer que la démocratie soit honnête, on a besoin de vérifier.
Mag : Et on a besoin de liberté d’expression. C’est totalement contraire aux droits de l’homme ce qu’il est en train de dire.
Luc : C’est complètement surfait les droits de l’homme ! Regarde tous les problèmes qu’on a, c’est à cause des droits de l’homme ! À un moment, il faut dépasser ça ? Non ?
Manu : Il faut être moderne, on va être modernes.
Luc : La dernière citation que j’ai vue passée c’est d’Alexandra Bensaid, qui est également sur France Inter, qui a interviewé le patron de Facebook France. Le patron de Facebook France a récité son texte, en tout cas tout le début c’est vraiment de la récitation.
Manu : Il a eu un beau tunnel.
Luc : Il a eu un beau tunnel, on l’a laissé parler.
Mag : Elle lui pose une question, non seulement il ne lui répond pas, mais en plus il parle, il parle, non-stop quoi !
Luc : C’est sur l’affaire Griveaux, en tout cas elle dit : « Vous n’avez certes pas hébergé les vidéos, mais on a pu avoir des liens pour cliquer dessus et les Gilets jaunes ont partagé les liens. »
Mag : Lui répond : « Oui, mais les liens ça veut dire que ce n’est pas téléchargé sur nos plateformes, donc nous on n’est pas en tort ! » Mais il y a quand même les liens !
Luc : Elle a dit : « Notre problème ce sont les liens. »
Mag : C’est ça. Donc tu donnes une voie directe vers des vidéos qui ne sont, non pas regardables, mais…
Luc : Le truc c’est attaquer les liens. Le lien d’une page à une autre page c’est l’essence même du Web.
Manu : C’est sa base.
Mag : Mais d’un autre côté comment voulez-vous qu’on contrôle des milliers de liens jour par jour ? Ce n’est pas possible !
Manu : Avec des moteurs d’indexation, brutaux, qui vont être bien bourrins et qui vont tout bloquer.
Luc : Même si c’est très difficile à faire, ça veut dire que cette volonté est là et ce n’est pas la première fois que quelqu’un dit « mais les liens sur Internet c’est quand même insupportable ! » Ce qui veut dire qu’Internet, en tout le cas le Web, est insupportable. Tout ça nous fait un joli panorama de cette volonté. La loi Avia sur la haine sur Internet…
Manu : Qui est en cours.
Luc : Qui est en cours, ne manque pas mal le sujet. Pour moi il y a trois solutions, trois choses qui devraient être mieux faites. D’une part la question que l’État prenne ses responsabilités. Il y a plein d’autres domaines dans la vie où on a des missions de police qui sont là pour taper sur les gens qui font n’importe quoi ; il y aura toujours une proportion de connards dans la population, c’est inratable !
Manu : Twitter, Facebook deviendraient des espaces publics qui seraient gérés par la loi publique ?
Mag : Twitter et Facebook sont déjà des espaces publics, des espaces où les gens peuvent s’exprimer. C’est déjà un espace public, sauf que ce n’est pas géré en France parce que les serveurs sont en Californie.
Luc : Mais la loi fait que tu es quand même responsable de ce que tu as dit publiquement sur un Facebook ou un Twitter. Facebook, on est censé pouvoir avoir des bouts en privé. En tout cas Twitter c’est, en principe, complètement ouvert.
Manu : C’est un nid à trolls.
Luc : Voilà. Et l’affaire Mila a montré ce que ça peut déclencher, mais, de fait, il faut effectivement qu’il y ait un pouvoir de police. On n’aura jamais tout le monde, mais il faut que quand il y a des problèmes qu’il y ait au moins un minimum de réaction.
Mag : Et c’est vrai que toucher au portefeuille des Français en leur donnant des amendes ça a toujours marché.
Manu : Non ! En tout cas ça pourrait être une étape. Ce serait une première solution pour toi.
Luc : Oui. En tout cas ça me parait important. Ça ne sera jamais la solution ultime, je ne crois pas que les gens sont tous bien. Il y aura toujours une frange d’enfoirés et je pense qu’il y a une niche écologique pour les prédateurs y compris dans la société et que, quoi qu’on fasse, il y en a et que, du coup, il faut qu’on les régule d’une façon ou d’une autre.
Manu : Personnellement, je préférerais une deuxième solution qui est de changer l’architecture des logiciels et des systèmes qui sont utilisés, notamment en les décentralisant. Avoir des petites communautés comme Mastodon [1] où il y a des modérateurs locaux. Les modérateurs vont gérer ce qui va être diffusé sur quelques autres communautés autour et là on a une gestion dont on sait qu’elle fonctionne aujourd’hui.
Mag : Moi j’ai une troisième solution, qui est ma solution depuis des années, c’est l’éducation. Les réseaux sociaux nous sont arrivés comme ça, on n’a jamais été formés aux réseaux sociaux, on n’a aucune idée des conséquences, des responsabilités qu’on a sur les réseaux sociaux, et ce serait peut-être bien d’en informer les gens, surtout les jeunes. Les plus jeunes qui arrivent sur les réseaux sociaux, qui n’ont jamais entendu parler de ça à part leurs parents qui sont sur leurs téléphones et ils n’ont rien : ils n’ont rien comme information, ils n’ont rien comme responsabilité, ils n’ont rien comme punition si tu veux, en tout cas leur apprendre ce que c’est et jusqu’où ça peut aller.
Manu : Les conséquences. Et effectivement, ce qu’ils postent aujourd’hui va peut-être les suivre toute leur vie, ça va être compliqué de s’en dépatouiller. Et peut-être savoir comment gérer l’agression sur Internet, parce que si on a une page Twitter qui va attirer tous les idiots, ça peut faire du mal. Oui, la formation ça peut sûrement faire du bien.
Luc : Il faut sans doute, je pense, les trois en même temps.
Mag : Et arrêter de faire des lois inutiles.
Luc : Très bien. Merci à tous les deux. On se retrouve la semaine prochaine.
Manu : À la semaine prochaine.
Mag : Salut.
Luc : Salut.