- Titre :
- À quoi sert Etalab ?
- Intervenants :
- Laure Lucchesi - Journaliste
- Lieu :
- École polytechnique - Entretiens enseignants-entreprises - Institut de l’entreprise
- Date :
- août 2017
- Durée :
- 5 min 10
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- Licence de la transcription :
- Verbatim
- Illustration :
- copie d’écran de la vidéo
Les positions exprimées sont celles des personnes qui interviennent et ne rejoignent pas nécessairement celles de l’April, qui ne sera en aucun cas tenue responsable de leurs propos.
Transcription
Laure Lucchesi : Je dirige Etalab [1] qui est un service du Premier ministre et qui contribue à la transformation numérique de l’action publique. Chez Etalab on le fait globalement sur deux volets.
D’abord avec plus d’ouverture, c’est le volet open : faire en sorte que l’action publique soit plus ouverte. Plus ouverte qu’est-ce que ça veut dire ? Ça veut dire qu’elle soit à la fois plus transparente et qu’en ouvrant et en partageant des données, de l’information sur l’action de l’État justement, l’État rende des comptes, donc rende l’action publique plus compréhensible aux citoyens. Qu’elle soit également plus ouverte à la participation des citoyens, des usagers du service public, que les usagers puissent évaluer, donner leur satisfaction, éventuellement eux-mêmes, d’ailleurs, proposer des améliorations sur le service public. Ce que permet le numérique c’est aussi de mobiliser l’intelligence collective ; il n’y a pas que les experts qui peuvent avoir des propositions à formuler. Cela permet beaucoup plus d’interaction et la participation des citoyens à la décision et à l’action publique. On a beaucoup de consultations, par exemple, qui sont menées, ouvertes, en ligne sur des plateformes sur lesquelles les citoyens, les associations mais aussi les entreprises d’ailleurs peuvent participer et contribuer à l’élaboration de la décision publique.
Ça c’est le volet ouverture.
Et puis, le deuxième axe sur lequel on travaille beaucoup, c’est faire en sorte que cette action publique soit plus fondée sur les données. L’État produit des données dans ses systèmes d’information. Il y a des données qui concernent les usagers, qui sont des données à caractère personnel, qui ne sont pas partagées ; elles peuvent être utilisées pour concevoir des meilleurs services publics mais elles ne sont pas partagées. Mais il y a beaucoup de données - des données statistiques, des données géographiques… - qui peuvent être ouvertes et partagées à tous pour que des innovateurs, des développeurs, des entreprises, inventent eux aussi des nouveaux services publics qui viennent prolonger ce que fait l’État.
Et puis, que l’on utilise aussi ces données pour prendre de meilleures décisions. Maintenant on est là à Polytechnique, il y a beaucoup de compétences en data science, en science des données ; qu’en utilisant les données qu’on a dans nos propres systèmes d’information ou qui sont des données externes d’ailleurs, on puisse prendre de meilleures décisions pour mieux prédire, par exemple, où vont avoir lieu les vols de voiture ; pour prédire des entreprises qui sont susceptibles - parce qu’elles sont en train de se développer et en croissance - d’embaucher dans un secteur ou dans un territoire donné. Donc on a, par exemple avec Pôle Emploi, travaillé à un service qui permet à des demandeurs d’emploi d’identifier les entreprises qui, sur un territoire donné et sur un emploi donné, vont peut-être recruter dans les années à venir, et d’envoyer une candidature spontanée.
Ça c’est l’autre partie ; c’est vraiment utiliser les données pour mieux construire les politiques publiques, mieux les évaluer, mieux les piloter.
Donc ce sont l’ouverture et la donnée, les deux grands axes sur lesquels travaille Etalab [2].
Il y en a aussi beaucoup d’autres. Le numérique change la façon pour l’État de conduire son action : il peut être plus agile, c’est-à-dire ne plus travailler dans des tunnels de développement, notamment en matière informatique, mais travailler de façon plus itérative. Donc tout cela change la façon dont l’action publique est menée.
Journaliste : Oui, parce que c’est aussi un changement de culture, c’est une métamorphose globale. Est-ce que le rôle d’Etalab va jusqu’à une sorte d’acculturation permanente des services publics ?
Laure Lucchesi : Oui. C’est vraiment ce que l’on fait au quotidien. À la fois parce qu’on anime un dialogue avec les différentes administrations : nous avons, en tant que service du Premier ministre, un rôle de coordination, également aussi, parfois d’arbitre sur certaines décisions. Ça, c’est vraiment le travail interministériel. Et puis on agit aussi parce qu’on contribue à l’évolution du cadre juridique et réglementaire. En tant qu’administration, on est aussi mis à contribution pour élaborer certains pans de la législation, de la loi. Ça, c’est le domaine du cadre juridique, mais ce qui est assez innovant et assez atypique, c’est qu’on a aussi des projets concrets sur lesquels on travaille : donc on développe nous-mêmes des sites internet ; on a des développeurs en interne. Donc c’est un modèle d’action qui est assez atypique et assez innovant. Tout cela se fait vraiment en contact permanent avec les différents ministères, les administrations centrales, mais aussi les administrations territoriales, les collectivités. D’ailleurs ce n’est pas seulement dans un sens descendant : il y a beaucoup d’innovations qui se font dans les territoires. Donc voilà ! Ce qui est vraiment chouette chez Etalab, c’est qu’on est à la fois très exposé aux différentes administrations mais aussi au monde universitaire, à la société civile et aux organisations, aux associations par exemple, à l’entreprise. Donc on a vraiment un travail très partenarial.